Point de surprise. Vers 18h30 ce mercredi, la Première ministre a recouru une nouvelle fois au 49.3 à l’Assemblée nationale, sur la partie recettes du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2024. "Malgré nos ouvertures, une fois de plus, l’usage selon lequel les groupes d’opposition refusent de voter un budget, quel qu’il soit, a prévalu", a-t-elle justifié. Sous les huées, elle a poursuivi : "Si cette deuxième partie n’est pas adoptée nous priverons tout notre modèle social de ses ressources." Quelques jours plus tôt, Elisabeth Borne avait déjà fait usage de cet article décrié de la Constitution pour faire adopter sans vote son projet de loi de finances (PLF) en première lecture.
En réaction, une motion de censure a été déposée par la présidente du groupe LFI, Mathilde Panot, ainsi que Cyrielle Châtelain et André Chassaigne. Elle a été cosignée par plus de 100 autres députés écologistes et communistes. "Le manque d’ambition de ce Gouvernement compromet la soutenabilité de notre modèle de protection sociale, qui faisait hier encore la fierté de la nation." Le RN a annoncé qu’il ferait de même. La date d’examen de ces motions n’a pas encore été fixée mais elles pourront être mises au vote à partir de ce vendredi soir, au plus tôt. Elles ont néanmoins peu de chances d’aboutir, sans le vote des Républicains.
Élisabeth Borne a activé son 14ème 49.3 sur le budget austéritaire de la Sécurité sociale pour 2024.
— Groupe parlementaire La France Insoumise - NUPES (@FiAssemblee) October 25, 2023
Nous déposons une motion de censure, co-signée par des député·es des groupes Ecologiste - NUPES et GDR-NUPES pic.twitter.com/2HfsU6qV89
"Le tableau totalement noir dressé par certains lors de l’examen du PLFSS ne me paraît pas juste pour autant. On peut dire à la fois les fragilités de notre système et en même temps son caractère magnifique", a réagi sur X (anciennement Twitter) le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, souhaitant avouer "une forme de malaise".
1/6 J’avoue ce soir une forme de malaise. J’hésite à le formuler mais je m’y risque. J’étais hier « au banc » lors de la discussion générale du PLFSS. Oui, le système de santé souffre. Oui, certains territoires et certains professionnels sont en grande difficulté. Aucun déni.
— Aurélien Rousseau (@aur_rousseau) October 25, 2023
Et maintenant ?
Avant l’arrivée d’Elisabeth Borne au sein de l’hémicycle, l’Assemblée nationale venait de rejeter les trois premiers articles du texte, notamment la révision à la hausse du déficit pour 2023 (à 8,8 milliards d’euros contre les 8,2 milliards prévus initialement), ainsi que la rectification de l’Objectif national de l’Assurance maladie (Ondam) pour l’année en cours. Les députés des oppositions dénonçaient des rallonges insuffisantes ne permettant pas de redresser le système de santé. La semaine dernière, la commission des Affaires sociales avait elle aussi appelé l’exécutif à revoir sa copie, en rejetant son budget de la Sécu pour 2024.
Si les motions de censure sont rejetées, la partie recettes du PLFSS sera considérée comme adoptée. Le recours au 49.3 permet également au Gouvernement d’intégrer dans son texte les amendements de son choix, parmi les plus de 3 000 déposés. Il a d’ores et déjà ajouté son propre amendement qui crée un délit de "promotion et de facilitation" de la fraude sociale, "pendant du délit qui sera instauré pour l'incitation à la fraude fiscale". La lutte contre la fraude constitue un volet important de ce PLFSS 2024, qui entend réaliser 3,5 milliards d’euros d’économies l’an prochain pour freiner les dépenses de santé en s’attaquant également aux arrêts de travail, ainsi qu’aux dépenses de médicaments.
En revanche, le mystère plane toujours sur le doublement de la franchise médicale. Mesure qui ne figure pas clairement dans le PLFSS mais que le Gouvernement n’a pas non plus écarté. "On pense que c'est l'un des leviers qu'on croit pouvoir activer", a indiqué hier le ministre délégué chargé des Comptes publics, Thomas Cazenave. L’exécutif pourrait mettre en œuvre cette mesure par voie réglementaire. "Il n'y a aucune clarification, pour nous c'est insupportable", a de son côté dénoncé le député socialiste, Jérôme Guedj.
[avec AFP]
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