Accès direct aux paramédicaux : ce que contient la PPL Rist votée par les députés

19/01/2023 Par Louise Claereboudt
Politique de santé
La proposition de loi Rist, qui vise à instaurer un accès direct aux IPA, aux kinés et aux orthophonistes, a été adoptée ce jeudi 19 janvier par l’Assemblée nationale. Le texte, contesté par l’ensemble des syndicats médicaux, sera examiné par les sénateurs le 14 février.

  Le texte a été voté à l’unanimité. Ce jeudi 19 janvier, les députés ont adopté en première lecture la proposition de loi Rist portant sur l'amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé. Le Rassemblement national et Les Républicains se sont toutefois abstenus. La PPL Rist sera ainsi examinée par les sénateurs le 14 février prochain.

Le texte instaure un accès direct aux infirmières en pratique avancée, aux masseurs-kinésithérapeutes et aux orthophonistes. Depuis le départ, les syndicats médicaux et le jeune collectif Médecins pour demain se sont fermement opposés à ce texte, alertant sur le risque d’une médecine à plusieurs vitesses et dénonçant une volonté de contourner le rôle du médecin généraliste traitant dans le parcours de soins.

Dans un entretien accordé à Egora jeudi dernier, la députée de la majorité Stéphanie Rist a répondu ne pas avoir "de doute sur l’importance de la place du généraliste au centre du parcours du patient. Mais pour moi, central ne veut pas dire ‘en premier’". La rhumatologue de profession a au contraire défendu une mesure justifiée par "l’urgence d’améliorer l’accès aux soins". Dans le détail, le texte instaure l’accès direct aux IPA et leur permet d’accéder à la primo-prescription dans le cadre d’un exercice coordonné. "L’exercice de ces professionnels ne se fera pas de façon isolée", a promis Stéphanie Rist, listant sur ses réseaux sociaux les modes d’exercice coordonné : établissements de santé ou médico-sociaux, équipes de soins primaires, maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), centres de santé ou encore CPTS (un volet dédié devra être inscrit dans le projet de santé de la CPTS). Un décret déterminant les modalités de la primoprecription devra être pris en Conseil d'État, après avis de la Haute Autorité de santé (HAS). Par ailleurs, deux types d’IPA avec des modalités d’exercice différents sont créés : des IPA spécialisés et des IPA praticien Un amendement a par ailleurs enrichi le texte : il autorise toutes les infirmières, dans le cadre d’un exercice coordonné, à prendre en charge la prévention et le traitement de plaies comprenant la prescription d’examens complémentaires et de produits de santé. Et ce après avoir suivi une formation dédiée – dont les modalités seront définies par décret. Les résultats des examens complémentaires et le compte-rendu des soins devront être "systématiquement" transmis au médecin traitant. L’accès direct aux kinés dans le cadre d’un exercice coordonné (selon les mêmes définitions que pour les IPA) a également été voté. Là encore, pour les CPTS, les modalités de prise en charge devront être inscrites dans le projet de santé. Le kiné pourra ainsi pratiquer son art sans prescription "dans le cas où le patient n’a pas eu de diagnostic médical préalable". L’Assemblée nationale a limité cet accès direct à 10 séances, contre 5 prévues initialement dans la PPL. Les kinés devront prendre prioritairement en charge les patients en ALD. Et transmettre systématiquement un bilan et un compte-rendu au médecin ainsi qu’au patient. Il s’agissait d’une "demande de longue date" de l’Ordre des kinés, qui a salué son adoption dans un communiqué. Un amendement voté par les députés, et porté par Karl Olive, ouvre également la possibilité aux masseurs-kinésithérapeutes de prescrire une activité physique adaptée (APA) aux patients éligibles, notamment ceux en ALD. Objectif avancé par le député macroniste : "lever les freins sur le développement de ce dispositif dont l’efficacité n’est plus à prouver en matière de santé publique". L’accès direct aux orthophonistes dans le cadre d’un exercice coordonné est également inscrit dans le texte.   La PDSa élargie à d’autres soignants Le texte renforce également les missions d’autres professions de santé, à commencer par les assistants dentaires, via la création de l’assistant dentaire de niveau 2. Les compétences des pédicures-podologues ont-elles aussi été élargies. Ils pourront – si le texte est adopté à l’issue de son parcours parlementaire – prescrire des orthèses plantaires ou encore des séances de soins de prévention adaptées. Et également prévue la gradation du risque podologique des patients diabétiques. Autre mesure votée, qui concerne cette fois les pharmaciens "Déjà autorisés à renouveler pour 1 mois les ordonnances de traitements chroniques, nous permettons aux pharmaciens de renouveler jusqu’à 3 mois celles-ci", indique Stéphanie Rist. Une expérimentation de 18 mois autorisant les pharmaciens biologistes à dépister le cancer du col de l’utérus a été votée. Elle aura lieu dans 5 départements. Les assistants de régulation médicale, actuellement en grande souffrance, ont par ailleurs été reconnus comme professionnels de santé. Indiquant que la permanence des soins ambulatoires par les médecins ne permet pas de garantir une couverture complète de tout le territoire, un amendement gouvernemental introduit la notion d’une "responsabilité collective" de participation à la permanence des soins, "tant en établissement de santé qu’en ville". Il élargit également à de nouveaux soignants la PDSa : aux chirurgiens-dentistes, sages-femmes et infirmiers diplômés d’Etat. "Ceci permettra de répondre à des demandes régulées par les SAMU-centres 15 et les services d’accès aux soins qui n’ont pas vocation à être prises en charge par un médecin, dans le strict respect des compétences de chacun."   Les négos conventionnelles "sous tutelle" Enfin, un autre amendement de dernière minute a été validé. Et il n’a pas manqué de faire sortir de ses gonds le syndicat MG France. Il est relatif aux négociations conventionnelles – qui viennent d’être suspendues, les syndicats ayant claqué la porte. L’amendement adopté vise à "renforcer l’accès aux soins de tous" en "reconnaissant les engagements des médecins qui s’investissent en ce sens". Ainsi, il "confie aux partenaires conventionnels le soin de définir les modalités de l’engagement territorial des médecins afin de définir les modalités appropriées de reconnaissance et de valorisation de ces professionnels qui s’engagent en faveur de la coopération, l’accès aux soins de proximité, aux soins non programmés, avec des pratiques tarifaires maitrîsées et en participant aux actions de santé, notamment l’exercice coordonné, au bénéfice de la population de leur territoire au-delà de leur patientèle propre". "On met les négociations sous tutelle", a dénoncé la cheffe de file des généralistes, la Dre Agnès Giannotti.

 
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