Médecins seniors : ce qu'il faut faire (et ne pas faire) pour les inciter à exercer encore quelques années
L’Île-de-France, premier désert médical du pays, risque de perdre davantage de médecins dans les prochaines années. D'après les résultats d'une enquête dévoilés ce lundi 30 octobre par l’Union régionale des professionnels de santé (URPS), 6 541 médecins de la région ont plus de 60 ans, soit 46% de l’ensemble des praticiens libéraux d’Île-de-France. 75% d’entre eux ont fait savoir qu’ils prévoyaient de partir à la retraite dans les cinq prochaines années.
Pour établir ces données, l’URPS a envoyé un questionnaire aux médecins libéraux de plus de 60 ans exerçant en Île-de-France. Parmi les 1 146 répondants, 680 sont des médecins actifs non retraités et 466 exerçent en cumul activité-retraite.
4 médecins actifs non retraités sur 10 ont diminué leur activité
Quatre médecins actifs non retraités sur dix reconnaissent avoir diminué leur activité depuis leur 60 ans. Pour la plupart, les raisons évoquées sont une fatigue, un surmenage, des problèmes de santé ou encore la volonté de vouloir profiter de leur temps libre, rapporte l’enquête. Ainsi, ils ont tous déjà programmé leur arrêt d'activité : 7% d'entre eux dans l'année qui vient, 31% dans moins de trois ans, 37% dans trois à cinq ans et 25% dans plus de cinq ans.
Près d'un sur 10 (9%) prévoit de racheter des trimestres afin de partir avant l'âge légal.
Une fois l’âge légal de départ à la retraite atteint, deux tiers des médecins envisagent soit de basculer sur un régime de cumul emploi-retraite, soit d'opter pour une retraite progressive, tandis qu'un tiers souhaitent raccrocher définitivement la blouse. Ces derniers évoquent leur âge élevé, l’épuisement professionnel, le manque de reconnaissance des patients et des pouvoirs publics, le manque d’informations sur le cumul emploi-retraite et la charge administrative de plus en plus lourde, précise l’enquête.
Près de la moitié des médecins prennent leur retraite après 67 ans
Du côté de leurs confrères en cumul emploi-retraite, le constat est similaire. 76,9% d’entre eux ont assuré avoir diminué leur exercice depuis qu’ils ont liquidé leurs droits à la retraite. L’enquête précise que ces médecins ont en moyenne diminué leur activité entre 20% et 50%. Si comme pour les médecins actifs et non retraités, la fatigue et l’envie d’avoir plus de temps libre reviennent, la principale raison pour les médecins en cumul emploi-retraite est la volonté de diminuer leur imposition, qu’ils jugent trop élevée.
La mesure la plus délétère pour les médecins
L’enquête de l’URPS a essayé de déterminer les facteurs qui pousseraient les médecins à cesser précocément leur activité. Pour les médecins actifs non retraités, on retrouve dans un premier temps l’obligation de participer à la permanence des soins : 53,1% des médecins estiment que ce serait la mesure la plus délétère. Puis, arrivent les nouvelles obligations numériques et enfin, l’obligation de prendre en charge davantage de patients. L’obligation d’adhérer à une CPTS ainsi que le manque de reconnaissance des politiques, de l’administration, des médias et des patients sont également mentionnés mais ne figurent pas parmi les trois principales raisons évoquées par les médecins.
Pour les médecins en cumul emploi-retraite, les résultats sont identiques. Le premier frein reste l’obligation de participer à la permanence des soins.
Une autre raison est également avancée par l’enquête : les conditions fixées pour bénéficier de l'exonération des cotisations vieillesse dues au titre de l'année 2023. D’après l’enquête de l’URPS, seuls 27% des répondants assurent qu’ils vont pouvoir bénéficier de cette exonération, contre 28% qui confient ne pas pouvoir en raison de revenus dépassant le plafond légal de 80 000 euros. Le reste des médecins (45%) avouent ne pas savoir s’ils vont pouvoir en bénéficier ou non. D'après la Carmf, 8854 médecins (sur les quelques 13 000 en cumul activité libérale-retraite) se sont vus rembourser des cotisations cette année.
Des droits supplémentaires en 2024
Cette exonération est pourtant déterminante pour 58% des répondants en cumul, qui considèrent qu’elle doit être pérennisée en 2024. 40% pensent qu’elle doit être modifiée, notamment en augmentant le plafond au-delà des 80 000 euros. Seuls 2% souhaitent voir la fin de cette exonération.
La mesure prendra bel et bien fin en 2024, avec l'ouverture de droits supplémentaires pour les médecins en cumul. Mesure qui ne concerne, pour l'heure, que le régime de base.
Alors, en pleine pénurie médicale, comment inciter les médecins de plus de 60 ans à poursuivre leur activité ? L’URPS a cherché à identifier les mesures qui seraient les plus efficaces.
L’exonération des cotisations
Près de neuf médecins actifs non retraités sur dix considèrent que l’exonération des cotisations, la défiscalisation des honoraires et l’ouverture de points retraite supplémentaires en cumul emploi-retraite pourraient les pousser à continuer leur exercice. En revanche, pour environ 45% d’entre eux, la possibilité de salariat ne les poussera pas à continuer à exercer.
Pour les médecins en cumul emploi-retraite, les observations sont les mêmes. La quasi totalité d’entre eux (96,7%) demandent une exonération des cotisations retraite. 91,8% souhaitent l’ouverture de points retraites supplémentaires et 83,1% réclament la défiscalisation des honoraires. Ils ne sont que 47.5% à plébisciter le salariat.
L’URPS médecins termine son enquête en demandant au Gouvernement ainsi qu’aux parlementaires “de prendre les mesures qui s’imposent pour favoriser la poursuite de l’exercice” des médecins.
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