Allergies alimentaires, respiratoires, asthme sévère... Les informations marquantes du congrès francophone d’allergologie

27/05/2023 Par A.V.
Allergologie
La 18e édition du Congrès francophone d’allergologie (CFA), organisée conjointement par la Société française d’allergologie (SFA) et l’Association nationale de formation continue en allergologie (Anaforcal), s’est tenue du 25 au 28 avril au Palais des congrès de Paris. Avec pour fil conducteur "l’allergologie et la médecine 6P" (preuves, prévention, prédiction, précision, participation, parcours), cet événement a été l’occasion de présenter les nombreuses avancées dans ce domaine.

  Au sommaire : 

 

 

"Il convient d’être extrêmement économes sur les corticoïdes oraux"

De nouvelles données concernant la prise en charge thérapeutique, les cures de corticothérapie, l’immunothérapie allergénique, ou encore les fausses allergies médicamenteuses, ont été présentées. Tour d’horizon avec le Pr Pascal Demoly* (CHU Montpellier), président de la SFA.  

Egora.fr : Quelles sont les dernières données concernant les immunothérapies allergéniques ? 

Pr Pascal Demoly : L’immunothérapie allergénique (lTA) est le seul traitement capable de « guérir » les allergies. L’analyse des grandes bases de données allemandes, danoises et françaises en vie réelle ont démontré de façon claire qu’une ITA prescrite à un patient souffrant de rhinite allergique prévient l'apparition de l’asthme. Et chez un asthmatique, elle évite les exacerbations. C’est une actualité majeure. 

Les dernières études publiées (1, 2, 3) montrent que les ITA préviennent également les exacerbations viro-induites (qui sont les plus fréquentes). Et maintenant, des études mécanistiques permettent de comprendre par quels mécanismes une ITA aux acariens, par exemple, protège un épithélium. Réalisée au Danemark, une étude très robuste (4) en double aveugle contre placebo, a analysé l’efficacité d’une ITA aux acariens. Les chercheurs ont cultivé des biopsies de bronches qu’ils ont infectées ex-vivo avec des virus respiratoires. Ils ont démontré que l'ITA, après six mois d'utilisation, protège l’épithélium de l'infection virale en augmentant la réponse interféron bêta et gamma et en diminuant les réponses alarmines, de type Interleukine 33. Ces résultats sont très importants. Cela veut dire que les patients, souffrant d’une rhinite modérée à sévère à qui ne sont prescrits qu’un traitement anti-histaminique oral ou nasal et des corticoïdes nasaux et qui rentrent dans les indications d’une ITA, ont une vraie perte de chance. C'est une information cruciale car une fois que la maladie est en place, il n’existe pas de retour en arrière. 

 

Que montrent les dernières analyses de bases de données concernant la toxicité des corticoïdes même prescrits sur de courtes périodes ? 

Les courtes cures de corticoïdes oraux ne sont pas anodines. Un patient asthmatique ou rhinitique qui ne va pas bien a souvent une prescription de prednisolone à 0,5 mg/kg/jour. Or, la toxicité est cumulative-vie et dose-dépendante. Une étude réalisée à partir de bases de données de médecins généralistes anglais (5) a montré qu'à partir d’1 g - vie de corticoïdes (soit environ trois cures dans la vie), les patients ont tous les effets secondaires de ces traitements : diabète, hypertension, ostéoporose (multipliée par 1,5 à 2,5), sur-hospitalisation… Il convient d’être extrêmement économes sur les corticoïdes oraux, même en courte période. C'est un message très fort.  

 

Une "fausse" allergie médicamenteuse peut-elle être source d’antibio-résistance ? 

Il est extrêmement délétère d'éliminer, sans exploration, un médicament chez une personne pensant y être allergique. C’est une information extrêmement importante. Une analyse des bases de données de médecins généralistes anglais a montré que la moitié des staphylocoques multi-résistants et un tiers des clostridium difficile apparaissent chez des individus ayant une fausse étiquette d'allergie aux pénicillines (suite à une réaction pendant l’enfance). Et depuis, d’autres antibiotiques que les beta-lactamines leurs sont prescrits en cas d’infection ce qui a pour conséquence de sélectionner les germes. C'est une cause majeure d’antibiorésistance arrivée à notre attention puis à celle de la Direction générale de la santé. Ainsi, dans le cadre du programme antibiorésistance, les allergologues vont formuler des recommandations dans les mois à venir pour lutter contre ce fléau en intégrant tous les prescripteurs (médecins, sages femmes, dentistes, pharmaciens). En effet, près de 9 fois sur 10, ces patients ne sont pas allergiques aux beta-lactamines. Les médecins généralistes doivent donc envoyer ces patients chez l'allergologue afin d’effectuer un bilan. Éviter chez un non allergique, c'est aussi grave qu'administrer chez un allergique démontré. 

 

Quel est le rôle du médecin généraliste face à l’augmentation du nombre d’allergies alimentaires (AA) ? 

Le nombre d’AA explose. Dans chaque classe en France, au moins un ou deux enfants sont allergiques. Cela pose problème lors des repas. Nous avons travaillé avec l'Éducation nationale et les médecins scolaires afin de mettre en place des projets d'accueil individualisés. Vue l’épidémiologie, les médecins généralistes ont forcément dans leur clientèle des patients ayant des AA. Nous devons collaborer ensemble pour explorer et réaliser un bilan des allergies de leurs patients. Pour les formes sévères, nous mettons en place des immunothérapies orales dans les unités transversales d’allergologie à l'hôpital. 

 

Les allergologues disposent depuis un an du droit de prescription des biothérapies. C’est une avancée dans la prise en charge des formes sévères ? 

Les biothérapies ciblent les mécanismes cellulaires des allergies selon l’endotype du patient. En ayant le droit de prescription de ces nouveaux traitements de précision, les allergologues aident à la prise en charge de toutes les formes sévères. C’est une information intéressante pour les médecins généralistes car certains départements en France n’ont pas de pneumologue ou d’autres spécialistes pouvant prendre en charge ces patients. 

 

*Le Pr Demoly déclare n’avoir aucun lien d’intérêt concernant les données présentées dans cet article.

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