
Les médecins libéraux sont-ils impactés par l'abaissement du seuil de la franchise de TVA ?
C'est une mesure qui a fait grand bruit ces dernières semaines. L'abaissement drastique du seuil de la franchise en base de TVA de 37400€ à 25000€, prévu dans le projet de loi de finances pour 2025 a été adopté via l'article 49.3 de la constitution. Face à la levée de boucliers de tout bord contre cette mesure, le Gouvernement décidait le soir même de son adoption d'en suspendre l'application. Mais suspension ne veut pas dire suppression et l'épée de Damoclès reste toujours présente.

Contrairement à ce que l'ont peut trop souvent lire, la franchise en base n'est pas réservée aux auto-entrepreneurs. C'est un mécanisme qui permet à tout entrepreneur de ne pas appliquer de TVA tant qu'il ne dépasse pas un certain seuil de recettes. L'abaissement conséquent de ce dernier à 25000€ entrainerait de nombreux indépendants à devoir désormais facturer de la TVA dès qu'ils dépassent ce seuil dans l'année civile en question, mais aussi obligatoirement l'année suivante, et ce dès le premier euro facturé ! Les indépendants les plus modestes qui ont une clientèle de particuliers se verraient placés devant un choix cornélien : soit diminuer leur marge et leur revenu, soit augmenter leurs tarifs et perdre des clients.
Les médecins semblent à l'abri de ce choc fiscal puisqu'ils sont comme les autres activités médicales et paramédicales réglementées non assujettis à TVA, au regard des soins qu'ils dispensent. Mais si la modification du seuil ne concerne pas leur activité première, elle peut néanmoins les impacter au moins à deux niveaux. En premier lieu, si les médecins exercent en marge de leur activité de soins une activité libérale accessoire comme une activité de consultant, d'expertise médicale, de soins non réglementées, ils deviennent assujettis à TVA pour ces activités. L'abaissement du seuil en dessous duquel ils peuvent être exonérés les concerne donc.
En deuxième lieu, lorsque le médecin intervient dans le cadre d'un contrat de collaboration (à distinguer du contrat de remplacement), la redevance qu'il verse au titulaire du cabinet pour la mise à disposition du local, du plateau technique, de la patientèle est soumise à TVA. En général cette redevance est fixée à 30% des honoraires perçus par le collaborateur. Avec l'abaissement de la franchise, la TVA viendrait troubler le jeu beaucoup plus rapidement. Avec un seuil de franchise à 37400€, un médecin collaborateur qui reversait 30% de ses honoraires pouvait réaliser 123000€ d'honoraires sans s'inquiéter de la TVA. Avec un seuil à 25000€, la TVA apparait dès 83000€ d'honoraires. Le médecin titulaire devra alors reverser sur la redevance qu'il perçoit 20% de TVA à l'état, à compter du jour de dépassement. Ce n'est donc pas anodin et cela change toute l'économie du contrat.
La sélection de la rédaction