Un hôpital du Nord utilise l'intelligence artificielle pour prédire le flux de patients aux urgences 

24/02/2020 Par La rédaction
Pour mieux gérer l’afflux de patients aux urgences, l’hôpital de Valenciennes (Hauts-de-France) utilise un logiciel d’intelligence artificielle via lequel les médecins peuvent visualiser le nombre de patients entrant, sortant et présents dans les services avec un taux de fiabilité de plus de 90%.  

 

Régulièrement confronté à des épisodes de tension aux urgences, l'hôpital de Valenciennes s'est doté d'un logiciel d'intelligence artificielle capable de prédire le nombre de patients attendus chaque jour, permettant ainsi aux médecins d'anticiper les besoins. 

Tout est parti du constat de l'augmentation de l'activité des urgences, quand les capacités d'accueil, elles, n'ont pas suivi. Entre 2008 et 2019, le nombre de patients admis chaque jour est, en effet, passé de 119 à 195 (+ 64%). "Cela génère de plus en plus d'épisodes de tension", assure le docteur Maisonneuve, chef du service. "Avant, il pouvait y en avoir un ou deux par an, maintenant c'est très régulier, jusqu'à plusieurs fois par mois." 

Pour éviter de laisser des patients sur des brancards, de les accueillir dans des services inadaptés ou de les transférer dans d'autres établissements, le centre hospitalier de Valenciennes (CHV) a élaboré avec la société suisse Calyps un logiciel d'intelligence artificiel unique en France. Sur son ordinateur, chaque médecin peut visualiser le flux attendu pour chacun des sept prochains jours : le logiciel indique le nombre de patients entrant, sortant et présents dans le service, avec un degré de précision à l'heure près et un taux de fiabilité supérieur à 90%.  

"On attend aujourd'hui 215 patients, dont 37 de plus de 75 ans", explique le Dr Maisonneuve, pointant les chiffres sur son écran. "Entre 11H00 et midi, il y aura 13 admissions. Mais ce qui m'intéresse, ce sont les chiffres à trois jours, pour adapter les moyens", en termes de lits comme de personnel. "Ça m'apporte une vision au-delà de celle que je peux avoir, à une heure, en fonction des admissions à l'accueil ou des alertes du Samu." L'hôpital ambitionne pour 2020 de rendre ensuite accessible le logiciel dans cinq "services aval", qui reçoivent les patients après leur passage aux urgences s'ils doivent être hospitalisés.

 

"Du stress en moins" 

"Ça serait pour nous un grand élément de stress en moins", reconnaît Cédric Gozé, praticien hospitalier, au CHV depuis 17 ans. "C'est plus rassurant...

, plutôt que de se retrouver à faire ce qu'on connaît depuis des années, les fameuses réunions de crise où on se dit voilà, on n'a plus que deux lits dans tout l'hôpital, ce n'était pas prévu. On pourra anticiper." 

A terme, le logiciel doit permettre non seulement d'anticiper les flux, mais aussi les durées d'hospitalisation et proposer une répartition optimale des patients sur les lits disponibles. Calyps s'appuie sur les données - anonymisées - récoltées depuis plusieurs années par l'hôpital à chaque séjour d'un patient et les croise avec d'autres données, notamment sur la météo, les événements locaux (manifestations, matchs...) ou le trafic routier : l'algorithme peut ainsi faire des corrélations entre épisodes de verglas et entrées aux urgences. 

"L'algorithme apprend à reproduire ce qu'il a vu dans le passé, à différentes échelles : il s'est passé ça hier, donc il se passera ça demain, il s'est passé ça le mois dernier, donc il se passera ça demain...", explique Hugo Flayac, directeur scientifique chez Calyps. 

Pour prédire les durées de séjour, les données sont plus individualisées : "il y a l'âge du patient, le sexe et, bien sûr, le plus important, le diagnostic", poursuit-il. "On complète la vision qualitative du médecin, son ressenti, avec une approche quantitative. On vient mettre des chiffres sur ce ressenti qui se vérifie ou pas." 

Affiné en permanence grâce à des données supplémentaires, le logiciel en est à sa "cinquième ou sixième version en un trimestre", précise Frédéric André, directeur du système d'information au CHV. "On entre un nouveau paramètre, on voit ce que ça donne et, si ça colle à la réalité, on l'intègre." Après Valenciennes, ce logiciel pourrait être adapté ailleurs : tandis que les situations d'engorgement des urgences se multiplient, des hôpitaux franciliens, néerlandais et suisses ont approché Calyps. 

 

 

[avec AFP] 

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