C’est sous un soleil radieux – annonciateur des meilleurs auspices – que s’est tenue ce vendredi 23 juin la première Journée de l’exercice coordonné (Jexco), organisée par Concours pluripro. Un temps d’échange entre les acteurs des soins primaires qui font face aujourd’hui à un "défi majeur", a souligné Karen Ramsay, rédactrice en chef du magazine : répondre aux besoins de santé des Français dans un contexte de vieillissement de la population, d’augmentation des maladies chroniques et de démographie médicale en berne. "En choisissant d’y répondre à travers le regroupement et la constitution d’équipes, vous avez opté pour l’une des meilleures solutions possibles", a-t-elle déclaré aux participants, lançant officiellement cette Journée inédite. Alors que le Président de la République a exprimé dès son arrivée à l’Elysée le vœu de faire de l’exercice isolé, "l’exception", l’organisation d’une Journée dédiée à l’exercice coordonné est, selon Agnès Firmin Le Bodo, une bonne chose. "Cela veut dire que la prise de conscience est bien réelle." "Ce sujet est l’une des priorités de la feuille de route du ministère de l’Organisation territoriale et des Professions de santé ", a-t-elle ajouté. L’exercice coordonné fait face à plusieurs enjeux : d’abord un enjeu de "qualité des soins", un enjeu "de réponse à une demande de soins qui augmente et avec des ressources qui diminuent", et un enjeu de refondation du système de santé.
"Je sais bien que certains s’impatientent, a reconnu la ministre, neuf mois après le lancement du volet santé du Conseil national de la refondation (CNR). Certains pensent que refonder notre système de santé va être spectaculaire, rapide… Eh bien non. Il faut du temps pour refonder notre système de santé parce qu’il faut apprendre à travailler ensemble. Ça ne se décrète pas, ça se construit. Apprendre à travailler ensemble, ça se fait naturellement à l’hôpital, bien moins naturellement en ville." En ce sens, la pharmacienne de profession a dit vouloir agir en "facilitatrice". "La solution unique" aux problèmes d’accès aux soins "qui viendrait du 7e étage de l’avenue Duquesne ne marcherait pas", a-t-elle admis. Cela doit venir du terrain. Les professionnels de santé de ville "n’ont pas attendu les consignes" du chef de l’Etat pour s’organiser à l’échelle de leur territoire, a rappelé Karen Ramsay. Forte de ses 708 déplacements sur le terrain, Agnès Firmin Le Bodo confirme cet engagement. "La crise sanitaire a été un accélérateur de cette volonté liée à une nécessité de travailler ensemble", a complété la ministre, confiant avoir elle-même changé d’avis sur les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). "Il y a quelques années je n’étais pas convaincue." "Toutes les pierres qui se dessinent sont là, la volonté des professionnels est là", a-t-elle tenu à rappeler. "La MSP symbolise le mieux l’exercice coordonné" Si cette prise de conscience est "réelle", il apparaît indispensable "d’organiser cet exercice coordonné des soignants dans des structures", a estimé Agnès Firmin Le Bodo. 45 millions d'euros seront d’ailleurs débloqués pour accompagner les nouveaux projets de création ou d’agrandissement de maisons de santé. Car d’ici 2026, le Gouvernement veut porter leur nombre à 4 000, contre 2 000 à l’heure actuelle. Soit environ 400 créations par année jusqu’à la date butoir. La maison de santé "symbolise, je crois, le mieux l’exercice coordonné. L’idée, c’est de faire de ces 4 000 MSP, les moteurs de la transformation des soins primaires." Autre objectif de l’exécutif : arriver à 700 centres de santé (CDS) d’ici 2026. "L’Igas est en train de réfléchir au modèle économique de ces CDS. Il est important de pouvoir regarder quels sont les différents modèles – j’ai cru en détecter six, et de se poser la question de la pérennité."
"Une fois qu’on a ces structures, il nous faut organiser cet exercice", a poursuivi la ministre. Cette dernière a lancé début mars un tour de France des CPTS afin de mesurer leurs apports dans les territoires, les succès et les failles. L’objectif du Président de la République est que 100% du territoire soit couvert par ces CPTS. A ce jour, 800 sont en fonctionnement. "Nous pensons que c’est le bon outil pour permettre le rassemblement de tous les professionnels de santé", a soutenu Agnès Firmin Le Bodo, qui s’est dit frappée lors de ses déplacements par le fait que "les soignants se connaissent assez mal entre eux". Les CPTS "ne sont pas des structures de soins mais elles vont devenir incontournables", a-t-elle assuré. "Elles permettront de concrétiser le lien ville/hôpital." Les conclusions du tour de France des CPTS devraient être rendues dans "quelques jours". En découleront des propositions. Car si "c’est un outil extraordinaire", "il nous faut l’améliorer", a reconnu la ministre de l’Organisation territoriale et des Professions de santé, qui constate que "certains soignants ne veulent pas en faire partie" craignant qu’il ne s’agisse d’une strate administrative de plus. De nouveaux métiers visent par ailleurs à "faciliter l’exercice coordonné". Le coordonnateur de CPTS, mais aussi l’assistant médical – "un assistant médical on dit que c’est 15% de temps médical gagné, soit en moyenne 2 consultations par jour". Cette émergence de nouvelles professions fait naître de nouveaux "enjeux", a indiqué la ministre, citant le cas des infirmières en pratique avancée (IPA) en ville, "qui n’ont pas trouvé leur place". "Pourtant quand un médecin travaille avec une IPA, c’est tout bénéf pour lui, tout bénéf pour le patient et c’est intéressant pour l’IPA. Ce binôme fonctionne bien, il faut que nous arrivions à trouver la place des IPA en ville. Mais peut-être parce qu’on ne sait pas leur faire la place."
"Il va aussi falloir se pencher sur l’organisation du travail en équipe", a-t-elle poursuivi, citant plusieurs modèles : équipes de soins primaires, équipes de soins spécialisées… Si "le médecin restera bien au cœur de l’équipe ou la pierre angulaire de notre système de santé", pour Agnès Firmin Le Bodo, "il n’y a pas un pilote dans l’avion mais des pilotes". "Le pilote de l’accès aux soins est dans chaque cabinet médical, dans chaque maison de santé, à l’hôpital, et dans tous les établissements", a-t-elle estimé, clôturant ainsi son intervention, avant de partir à Lille rencontrer les acteurs de terrain. Jusqu’à la fin d’après-midi, les tables rondes se sont enchaînées pour mettre en lumière les actions de terrain, rendre compte des difficultés, tenter de les dépasser grâce à la coordination. Une première édition riche. Concours pluripro donne d’ores et déjà rendez-vous à l’ensemble des acteurs du système (institutions, usagers, médecins, paramédicaux…) l’année prochaine pour une deuxième édition, qui se déroulera le 14 juin 2024.
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