Pas d’exercice coordonné, pas de forfait structure : "les médecins risquent de déplaquer"

Egora.fr : Conformément à l’avenant 7, les médecins libéraux ont jusqu’au 31 décembre 2022 pour s’inscrire dans une démarche d’exercice coordonné, sous peine de perdre leur forfait structure l’an prochain. Mission impossible ?
Dr Luc Duquesnel : Au 31 janvier de cette année, 38 500 médecins libéraux ont déclaré être en exercice coordonné, dont 25 600 médecins généralistes et 12 900 médecins spécialistes, sur un total de 110 à 120.000 médecins libéraux. Ce qui veut dire qu’à l’heure actuelle, pratiquement les deux tiers des médecins libéraux risquent de ne pas remplir les conditions et de voir leur forfait structure supprimé. Quant aux autres, ce n’est que du déclaratif, il n’y a pas eu de contrôle. Vu la pression mise par le Gouvernement sur la nécessité d’être en exercice coordonné, on peut s’attendre à ce que la Cnam ne se contente pas d’une déclaration.

Quelles sont les exigences exactement ?
Dans le texte de l’avenant, certaines formes d’exercice coordonné sont citées : MSP, CPTS, équipe de soins primaires ; d’autres pourront être reconnues, comme les réunions de concertation pluridisciplinaires (RCP), l’appartenance à un réseau... Mais il faut que ce soit formalisé, tracé. Car on sait que tout médecin libéral se coordonne avec d’autres professionnels de santé… dès le début de son exercice. C’est impossible de travailler tout seul ! Mais ce n’est pas suffisant pour remplir cet item-là, qui va passer dans le volet 1 du forfait structure. Alors que ce n’est pas parce que j’adhère à une CPTS que je me coordonne…
En commission paritaire régionale, on nous dit : « On sera souple ». Ce terme ne nous convient pas car cela signifie qu’il y aurait des différences de jugement des médecins en fonction des critères retenus par les CPAM, avec des procédures et des conflits en perspective. Cela doit nécessairement venir d’une décision nationale.
Vous demandez un report de l’application de cet indicateur…
Thomas Fatôme [directeur général de la Cnam, NDLR] nous dit : « C’est dans l’avenant, vous l’avez signé ». Oui, mais entre temps il y a eu la crise sanitaire, qui a retardé tout le monde, y compris les ARS, la DGOS et les CPAM ! L’investissement des professionnels de santé dans les centres Covid en 2020, dans les centres de vaccination en 2021 a fait prendre du retard aux organisations territoriales d’exercice coordonné.
Bien sûr, il n’est pas question de remettre en cause la nécessité de se coordonner. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle on se bat dans le cadre de l’ACI* CPTS ou de l’Acip** pour généraliser les équipes de soins primaires (ESP), les équipes de soins spécialisées (ESS) et les équipes de soins coordonnées autour du patient (Escap). On ne peut pas nous refuser cette généralisation, qui permettrait aux médecins d’être en exercice coordonné, et en même temps les sanctionner l’an prochain parce qu’ils n’y sont pas !
Où en sont les négociations de l’Acip à ce sujet ?
Nous sommes bloqués. On reste sur des expérimentations que l’on va évaluer dans un an. C’est un non-sens, sachant qu’il faut un an pour mettre en place un exercice coordonné. Que va-t-on évaluer ? Les projets de santé ?
C’est vraiment de la mauvaise volonté de la Cnam : on n’a pas besoin d’expérimenter les ESP, les ARS l’ont déjà fait ! Très clairement, la Cnam refuse de permettre à tous les médecins qui le souhaitent de se mettre en exercice coordonné sous forme d’ESP, d’ESS ou d’Escap, quitte à les sanctionner l’an prochain. La seule solution est...
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