Agnès Buzyn met le paquet sur les jeunes médecins contre les déserts

07/02/2018 Par F. Na.
Démographie médicale

Faut-il y voir l'œuvre des jeunes médecins Sophie Augros (ex présidente de Reagjir) et Thomas Mesnier (urgentiste et député LREM), délégués du plan d'accès aux soins ou la volonté manifeste d'Agnès Buzyn de confier plus de responsabilités à la jeune génération ? Toujours est-il que les jeunes médecins occupent une belle place dans le Plan d'accès aux soins voulu par la ministre de la santé.

"Développer les stages en ambulatoire, c'est notre chantier numéro 1. C'est une clé majeure dans le renforcement de l'accès aux soins", a martelé Cécile Courrèges, directrice générale de l'offre de soins au sortir du premier Comité de pilotage du Plan pour renforcer l'accès aux soins. Un plan qui fait effectivement la part belle aux jeunes. "Beaucoup des sujets que nous portons depuis longtemps ont été repris", admet volontiers le Dr Yannick Schmitt, président de Reagjir. "La nouvelle équipe n'a pas la même vision que la précédente, le dialogue se fait plus facilement, ils sont plus à l'écoute, assure pour sa part Maxence Pithon, président de l'Isnar-IMG. Il a été plus facile pour nous de présenter et de faire entendre nos idées."   La maîtrise de stage sera revalorisée   Consacré au développement des stages en ambulatoire dans les zones médicalement sous denses, le premier des six chantiers du plan se décline en deux volets : maîtrise de stage et accueil des étudiants et des internes. Réclamé de longue date, la maîtrise de stage sera revalorisée pour les praticiens en zone sous-dense. Les signataires d'un "contrat de stabilisation et de coordination médecin" recevront en plus, "au moins" 300 euros par mois pour l'accueil d'un étudiant ou d'un interne. "L'élément financier, c'est bien, nuance le Dr Yannick Schmitt. Mais à côté de ça, nous avons un besoin de formation en pédagogie, et cette formation a été réduite dans le cadre du DPC. Jusqu'ici, on n'avait pas de limite puisque cette formation est hors-quota. Mais il a été décidé de limiter cette possibilité. Ça pose un problème d'harmonie." Concernant la formation, le ministère assure que des discussions sont en cours avec le Collège national des généralistes enseignants et l'Agence nationale du DPC pour harmoniser et simplifier la formation des maîtres de stage.   200 euros par mois pour les internes en stage ambulatoire   Au-delà des moyens, se pose la question du recrutement des maîtres de stage. Comment convaincre des médecins déjà débordés d'accueillir et de former des étudiants ? "Il faut les convaincre dès la sortie de leurs études !, plaide le Dr Sophie Augros. Par forcément en étant maître de stage tout de suite, mais en les impliquant dans le tutorat, l'enseignement dans les facs… Si je suis moi-même maître de stage en rural, c'est parce que ça permet de faire évoluer ma pratique. Et aux médecins qui se plaignent de ne pas trouver de successeurs, je leur dis 'Mais pourquoi n'êtes-vous pas maîtres de stage ?'" Pour ce qui est de l'accueil des étudiants et des internes, le Plan prévoit une prime de 200 euros mensuels pour les internes en stage ambulatoire en zone sous-dense, qui n'ont pas d'hébergement sur place. Le décret est attendu pour cet été, et devrait donc bénéficier aux internes en stage à la rentrée prochaine. Par ailleurs, le ministère encourage les collectivités locales à proposer des lieux d'hébergement pour rendre les stages "plus accessibles financièrement", et leur glisse : "lorsque le logement est partagé entre plusieurs professionnels de santé stagiaires, il peut également favoriser la convivialité et donc l'attractivité de ces terrains de stage". Aussi simple que l'idée puisse paraître, elle fait mouche chez les internes. "Il faut accompagner les étudiants dans les territoires, ne pas les envoyer en stage et les laisser seuls, plaide Maxence Pithon. Il faut des lieux de vie en commun, qui hébergeraient les étudiants en stage. Ça permettrait de créer une solidarité intergénérationnelle, mais aussi de développer un réseau interprofessionnel parce qu'on pourrait inclure les étudiants paramédicaux par exemple."   Simplification des démarches   Pour l'heure, le ministère anticipe une hausse de 500 terrains de stage, et de 350 maîtres de stage grâce aux mesures prévues. "En Mayenne, 70% des jeunes qui sont venus en stage y sont restés, rapporte ainsi la sénatrice Elisabeth Doineau, co-déléguée du Plan. Ils ont trouvé une pratique pluridisciplinaire avec des outils modernes." Autre chantier qui résonne dans le cœur des jeunes médecins, mais aussi des moins jeunes, la simplification des démarches. "Nous allons créer une plateforme pour accompagner les professionnels dans toutes les moments clés de leur vie professionnelle, explique Cécile Courrèges, de la DGOS.  Les médecins sont les premiers à le reconnaître, leurs études ne les préparent pas à ces démarches et ce sont parfois des obstacles très difficiles à surmonter". Au-delà des guichets uniques déjà existants dans certains départements pour aider à l'installation, cette plateforme proposerait des ressources pour tous les moments clés de leur carrière. Ainsi, dans chaque région, ce service devra être mis en place dans les prochains mois. Il devra associer a minima l'ARS et l'Assurance maladie, mais Cécile Courrèges invite d'autres partenaires telles que les collectivités locales ou l'Urssaf à y participer. "Des études ont montré qu'en vrai les démarches ne sont pas si difficiles, assure Maxence Pithon, mais elles ont une sale réputation. Il faut désacraliser les démarches pour rassurer les futurs médecins."   Manque d'attention portée à la protection sociale   "Nous sommes favorables à tout ce qui concerne la coordination et le travail pluriprofessionnel, ajoute le Dr Yannick Schmitt. Assouplir les statuts, faciliter les remplacements, l'activité mixte, ce sont des bonnes choses même si elles seront difficiles à mettre en place." S'il salue le travail accompli et les ambitions affichées, le généraliste déplore ne revanche le manque d'attention portée à la protection sociale des jeunes médecins. "Le Plan compte six chantiers, et pas un ne traite de la protection sociale. C'est décevant", relève le Dr Schmitt tout en rappelant que des mesures simples existent. "Le contrat de Praticien territorial de médecine générale par exemple, ça marche et ça ne coûte rien ! Certaines ARS les promeuvent, d'autres pas… Il faut les développer. On attend une initiative forte du ministère, avec des moyens qui aillent en face des déclarations d'intention."

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