
Rhumatismes : les bienfaits du régime méditerranéen
Plusieurs travaux ont confirmé les bénéfices du régime méditerranéen dans le cadre de pathologies rhumatologiques chroniques. Mais les effets restent modestes. Les spécialistes conseillent, en outre, d’éviter les régimes d’exclusion.

Comme l’activité physique, l’alimentation joue un rôle important dans les maladies rhumatismales, dont la polyarthrite rhumatoïde ou l’arthrose. « Elle est très connectée à l’inflammation systémique : en modifiant son alimentation, on peut avoir un impact sur la façon dont l’inflammation évolue au cours d’une pathologie. Notamment du fait que la membrane synoviale, au sein de l’articulation, est très vascularisée, et qu’elle est en contact avec l’environnement, donc avec l’alimentation », explique le Pr Sébastien Czernichow, chef du service de nutrition à l’hôpital européen Georges-Pompidou (Paris).
C’est ce lien entre alimentation et maladies rhumatismales que la Société française de rhumatologie (SFR) a exploré lors de recommandations publiées en 2022(1). « Nous avons mené ce travail parce que les patients se posent, et nous posent, de nombreuses questions », explique Sébastien Czernichow. Dans la lignée de ces recommandations, le médecin nutritionniste et son collègue le Pr Jérémie Sellam, du service de rhumatologie de l’hôpital Saint-Louis (Paris), ont publié en octobre un ouvrage destiné aux patients, intitulé « Arthrose, arthrite : je me soigne en mangeant »*. Objectif : démêler le vrai du faux, afin de prodiguer aux patients des conseils s’appuyant sur des connaissances scientifiques étayées.
Premier message : il n’existe aucun aliment, aucun régime, qui ait d’effet miracle contre les rhumatismes. « Aucune intervention d’ordre nutritionnel n’a montré de bénéfice supérieur aux médicaments », constate Sébastien Czernichow. « Rien ne nous permet de dire qu’il serait possible d’arrêter de prendre une biothérapie grâce à tel ou tel aliment. Contrairement à ce qu’affirment les messages charlatanesques qu’on voit circuler. Les interventions nutritionnelles sont certes cruciales, mais elles ne viennent qu’en complément des traitements. »
Gare aux régimes d’exclusion
De même, aucun régime d’exclusion, qu’il s’agisse de sans gluten, de sans lactose, de régimes vegan ou de jeûne intermittent, ne présente de bénéfice chez les patients atteints de rhumatismes. Selon le nutritionniste, « il est même important d’éviter ces régimes, qui peuvent engendrer des carences nutritionnelles. Par exemple sur la santé osseuse pour un régime sans lactose, ou une carence en vitamine B12 pour les régimes végans stricts. Si jamais, pour une raison ou une autre, un patient souhaite en suivre un, nous lui conseillons de faire appel à un professionnel, diététicien, médecin nutritionniste ou médecin traitant, qui pourra surveiller que cela n’engendre pas de carences ».
Le sujet est loin d’être anodin : selon les résultats de l’étude française Rhumadiet, menée sur près de 400 patients souffrant de rhumatismes, « 26 % d’entre eux suivaient ou avaient suivi au moins un régime d’exclusion, principalement des régimes sans lait de vache et sans gluten ou de type détox ou jeûne », constatent les auteurs(2). Pire : « seuls 18 % des patients qui ont modifié leur alimentation l’ont fait sur les conseils d’un médecin, alors que 45 % des patients ont suivi des recommandations provenant d’Internet, des réseaux sociaux, d’amis ou de leur famille (…). Ceci témoigne bien de l’intérêt des patients envers l’alimentation pour essayer de soigner leur rhumatisme, de leur solitude vis-à-vis de ce sujet, loin des médecins, et de leur persévérance à adopter tel ou tel régime au quotidien », ajoutent-ils.
Les bénéfices avérés du régime méditerranéen
Toujours selon l’étude Rhumadiet, seuls 5% des patients interrogés suivaient une alimentation proche du régime méditerranéen. Or c’est celui-ci, varié et équilibré, riche en fibres et en acides gras polyinsaturés (dont les fameux oméga-3), qui semble le plus bénéfique. Plusieurs études d’associations, menées dans la polyarthrite rhumatoïde, l’arthrose du genou et la spondylarthrite ankylosante, ont en effet montré que plus un patient adhère au régime méditerranéen, plus son rhumatisme est contrôlé, moins il progresse(3)(4). De même, ces bénéfices ont été confirmés par plusieurs essais contrôlés.
Quant aux compléments alimentaires à base d’oméga-3, « cela peut-être un plan B, seulement de deuxième intention » si les apports alimentaires sont insuffisants, note Sébastien Czernichow. Dans la polyarthrite rhumatoïde, des études, ne dépassant pas une durée de trois mois, ont suggéré des bénéfices sur la douleur, la raideur, les articulations gonflées et l’inflammation sanguine, surtout lorsque les oméga-3 sont d’origine animale et à des doses supérieures à 2 g par jour. Les résultats paraissent moins assurés dans l’arthrose, avec un bénéfice significatif, mais très modeste, à de fortes doses (4 g/jour).
*« Arthrose, arthrite : je me soigne en mangeant », 3 octobre 2024, 240 pages, Prs Sébastien Czernichow et Jérémie Sellam, éditions Solar.
Daien C et al., Revue du rhumatisme, 10 décembre 2021
Renard D et al., Revue du rhumatisme, 18 décembre 2022
Veronese N et al., Clinical Nutrition, 4 décembre 2018
Charneca S et al., European Journal of Nutrition, 24 juin 2023
Sigaux J et al., Arthritis Research & Therapy, 7 mai 2022
Stonehouse W et al., American Journal of Clinical Nutrition, 2 septembre 2022
Références :
D’après un entretien avec le Pr Sébastien Czernichow, chef du service de nutrition de l’hôpital européen Georges-Pompidou (Paris), et la session « Alimentation et activité physique : comment faire et que dire aux patients arthrosiques ? » au 37ème Congrès français de rhumatologie (Paris, 8-10 décembre 2024).
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