Le scanner chez le coronarien : vers un changement de paradigme

08/02/2023 Par D.R.
Cardio-vasculaire HTA
Les 33èmes Journées européennes de la Société française de cardiologie (JESFC) se sont déroulées au Palais des Congrès de Paris du 11 au 13 janvier 2023. Elles ont porté une attention particulière à l’ensemble des actualités de la cardiologie, sans oublier la pratique de la cardiologie clinique, en particulier dans les coronaropathies, l’insuffisance cardiaque ou encore la mort subite. En particulier, un point a été fait sur la place du coroscanner. En effet, qu’il s’agisse des coronaropathies aiguës ou chroniques, voire du dépistage, tout indique que le coroscanner devrait prendre de plus en plus de place dans un avenir proche, en raison de son énorme potentiel. 

 

"L’efficacité du scanner utilisé en urgence pour s’assurer de l’absence de sténose coronaire obstructive est bien connue", souligne le Pr Luc Christiaens (CHU de Poitiers). En situation aiguë, celui-ci incite à ne pas se contenter du seul score calcique*. "En effet, poursuit le spécialiste, on retrouve dans plusieurs études, ainsi que dans une méta-analyse ayant rassemblée près de 92 000 patients, 4% de sténoses coronaires obstructives malgré un score calcique à 0 en cas de douleur thoracique aiguë. Il ressort d’une autre méta-analyse de 12 000 patients souffrant de douleur thoracique aiguë, à faible risque de syndrome coronaire aigu, que 33% présentaient une sténose significative mais non obstructive." 

De plus, le scanner présente l’avantage de montrer des structures autour du cœur, et ainsi d’identifier éventuellement des lésions comme une atteinte aortique ou une embolie pulmonaire par exemple, ce que ne peuvent évidemment pas faire un score ou un stress test. 

Pour le Pr Christiaens, "le scanner injecté peut utilement servir de 'gate keeper', notamment en l’absence d’antécédents coronaires connus, ce qui a un impact sur le suivi et le traitement ultérieur du patient".  

 

Une place également chez le coronarien stable 

"Le coroscanner permet d’analyser les lésions et de les quantifier, faisant de cet outil un examen relativement complet", souligne le Dr Patrick Dupouy (clinique Les Fontaines, Melun). 

C’est ainsi, notamment, que dans l’étude Scot-Heart de 2018 (environ 5 000 patients), dans laquelle le coroscanner était comparé au bilan classique incluant des tests fonctionnels, le groupe des patients coronariens chroniques ayant bénéficié du scanner a enregistré une diminution de 38% du nombre de décès et de 40% de celui des infarctus non-fatals. Résultat attribué au fait que...

la mise en évidence d’un athérome ou d’une sténose a conduit à un traitement plus efficace, comprenant par exemple un antiplaquettaire.  

Un autre aspect potentiellement intéressant chez ces patients va sans doute être représenté par l’utilisation de la FFR-CT, même si celle-ci est encore difficile d’accès. Rappelons que la FFR (Fractional Flow Reserve), ou mesure de la réserve coronaire – intégrée récemment dans les recommandations européennes, s’est imposée depuis quelques années comme un outil essentiel dans l’arsenal diagnostique. En effet, il est maintenant possible de calculer la FFR sur des images de scanner, cet index physiologique étant un indicateur précieux d’un éventuel besoin de revascularisation. Ce qui a été confirmé par plusieurs études, parmi lesquelles A, FFR-CT Ricord, Platform et Precise-CT. 

"Nul doute que le coroscanner ne devienne un outil central d’évaluation dans le cadre de la prise en charge des patients coronariens", conclut le Dr Dupouy. 

 

Vers un rôle dans le dépistage ? 

Si, pour l’instant, le dépistage coronarien fait une large place aux scores et aux tests fonctionnels, les choses pourraient évoluer au profit du coroscanner, selon le Dr Alain Tavildari (hôpital Saint-Joseph, Marseille). 

Le scanner présente en effet l’avantage, sur un test de probabilité (Score) ou un test fonctionnel (binaire par essence), de pouvoir mettre en évidence toutes les phases de développement d’un athérome. Avec l’atout supplémentaire de pouvoir identifier une inflammation sur une plaque athéromateuse dont on sait le danger. 

Selon le Dr Tavildari, les résultats attendus d’ici 4 ans de l’étude Scot-Heart 2 devraient apporter des réponses décisives sur l’intérêt du scanner coronaire dans le dépistage. 

 

Des progrès considérables en gestation 

Entre évolutions des machines, amélioration de la qualité des images ainsi que des logiciels/algorithmes d’analyses d’image et véritables ruptures technologiques, dont certaines font leurs premiers pas, l’avenir du coroscanner apparait comme particulièrement riche dans l’objectif à terme d’une vision complète et intégrative des patients. 

C’est ainsi que parmi les avancées à différents niveaux, le Dr Laurent Macron (GHP Ambroise Paré – Hartmann) évoque, en plus de la FFR-CT déjà citée, l’optimisation des protocoles d’injection des produits de contraste, le calcul automatique du score calcique, les détecteurs à comptage photonique (permettant des images de très haute résolution), l’analyse de la graisse péricoronaire (marqueur de risque de l’instabilité des plaques), la détection automatique de l’athérome et une meilleure détermination de la charge athéromateuse aidant à quantifier le risque d’événements. 

*Le score calcique coronaire est une évaluation chiffrée de l’étendue des dépôts athéromateux calcifiés observés au niveau des parois des artères coronaires, à partir d’un simple scanner thoracique sans injection de produit de contraste. 

 

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