ESC 2020 : l’arsenal thérapeutique s’élargit dans l’insuffisance cardiaque

18/09/2020 Par Corinne Tutin
Cardio-vasculaire HTA

Le congrès digital qu’a organisé la Société européenne de cardiologie (ESC), du 29 août au 1er septembre 2020, est un bon cru. Avec des études favorables sur les inhibiteurs de SGLT2 chez les patients insuffisants cardiaques ou porteurs d’une néphropathie, l’arrivée d’un premier traitement de la cardiomyopathie hypertrophique, et les effets positifs d’un vieux médicament, la colchicine, dans la maladie coronaire. D’autres recommandations et études plaident pour une évolution de la prise en charge dans la fibrillation atriale ou pour un traitement plus ambulatoire de l’embolie pulmonaire.   Concernant l’insuffisance cardiaque, plusieurs nouvelles données ont été présentées, susceptibles de faire évoluer la prise en charge. Données. En particulier, l’empagliflozine pourrait devenir un nouveau traitement de l’insuffisance cardiaque à FE altérée. Lors du congrès européen de cardiologie de 2019, un inhibiteur du cotransporteur sodium-glucose de type 2 (i-SGLT2), la dapagliflozine, avait démontré son efficacité dans l’étude Dapa-HF avec une réduction du nombre d’événements cardiovasculaires de 26 % après 18 mois de suivi chez des insuffisants cardiaques avec une fraction d’éjection (FE) altérée (1). Cette année, c’est un autre inhibiteur de SGLT2, l’empagliflozine qui démontre son intérêt dans cette forme d’insuffisance cardiaque (IC). L’étude Emperor-reduced, qui a inclus 3730 insuffisants cardiaques, diabétiques ou non, avec une fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG) égale ou inférieure à 40 %, décrit en effet une diminution significative de 25 % en comparaison du groupe placebo du nombre de décès cardiovasculaires et d’hospitalisations pour IC (critère de jugement primaire de l’essai) après prise, pendant en médiane 16 mois, de 10 mg/j d’empagliflozine (p < 0,0001) (2). Sous ce traitement, le taux d’hospitalisations  pour IC a été abaissé de 30 % (p < 0,001) et le taux d’événements rénaux (réduction importante du débit de filtration glomérulaire, dialyse, transplantation) a été réduit de moitié (1,6 % contre 3,1 %,  p < 0,01), a rapporté le Dr Milton Packer (Baylor University Medical Centre, Dallas, États-Unis).

Les effets bénéfiques de l’empagliflozine ont été plus importants chez les patients avec une IC sévère (au vu de la FEVG et du taux de NT-proBNP), mais indépendants de l’existence ou non d’un diabète. La tolérance de l’empagliflozine a été satisfaisante  (pas de majorations des hypotensions, des hypoglycémies) même si un accroissement des infections uro-génitales non compliquées (1,3 % contre 0,4 % sous placebo) a été observé, un effet classique des inhibiteurs de SGLT2. Au vu des résultats de cet essai et  de ceux de Dapa-HF, le Dr Packer a estimé que « les inhibiteurs de la SGLT2 comme l’empagliflozine et la dapagliflozine pourraient devenir le nouveau standard thérapeutique dans l’IC à FE altérée ».   Des résultats plus mitigés pour le sacubitril/valsartan dans l’IE à FE préservée Dans l’IC à FE altérée, l’association de sacubitril et de valsartan a démontré son efficacité, dans l’étude Paradigm-HF publiée en 2014 (3). En revanche, dans l’IC à FE préservée, cette combinaison a échoué dans l’étude Paragon-HF à démontrer une...

efficacité statistiquement significative (-13 % pour le critère de jugement primaire représenté par les hospitalisations pour IC et décès cardiovasculaires, p = 0,06), même si une tendance positive a été relevée en faveur de cette combinaison pour prévenir les hospitalisations pour IC (- 15 %) (4). Un des faits mis en avant pour expliquer ces résultats décevants est que l’association sacubitril/valsartan avait été comparée non à un placebo mais au valsartan. Or, les ARAII ne sont ni toujours prescrits, ni un traitement de référence dans l’IC à FE préservée. Une autre étude, Parallax, vient de comparer chez 2572 patients avec une IC à FE préservée l’association sacubitril/valsartan (97/103 mg) à un traitement optimisé individualisé, constitué par l’énalapril (10 mg 2 fois/j), le valsartan (160 mg 2 fois/j) ou un placebo. Les résultats sont en demi-teint car, a indiqué le Pr Burkert Bieske (Hôpital de la Charité, Berlin), « si l’association sacubitril/valsartan a réussi à modifier positivement le 1er critère de jugement primaire de l’essai : réduction du taux de NT-proBNP à 12 semaines (- 16,4 % en comparaison du traitement optimisé individualisé, p < 0,0001), la différence était statistiquement non significative pour le 2nd critère primaire de jugement retenu à savoir la distance parcourue pendant le test de marche des 6 minutes. Les deux stratégies ont montré des résultats similaires en termes de tolérance, de qualité de vie et de modifications du stade de l’insuffisance cardiaque.   1/McMurray JJ, et al. N Engl J Med. 2019 Nov 21 ; 381 : 1995-2008
2/Packer M, et al. N Engl J Med. 2020 Aug 29 .doi: 10.1056/NEJMoa2022190
3/Mc Murray JJ, et al. N Engl J Med. 2014 Sep 11 ; 371 : 993-1004.
4/Solomon SD, et al. N Engl J Med. 2019 Oct 24 ; 381 : 1609-1620. 

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