Les biologistes indépendants s’inquiètent d’une financiarisation de la santé

06/05/2022 Par Pauline Machard
Système de santé
Pour le réseau, cette tendance présente des risques pour la prise en charge des patients. Il enjoint les responsables politiques à prendre les mesures nécessaires pour préserver "une biologie médicale entrepreneuriale qui privilégie les valeurs plutôt que la valeur".  

 

 

Informer les Français des risques de la financiarisation de la biologie médicale pour les professionnels de santé et pour la prise en charge des Français. Telle est l’ambition de la campagne de sensibilisation lancée jeudi 5 mai par le réseau Les biologistes indépendants, qui rassemble des médecins et des pharmaciens biologistes, entrepreneurs, qui, “face à la montée en puissance des grands groupes, ont choisi en 2016 de s’unir”.  

Le réseau dresse d’abord le constat de la mutation à l'œuvre pour les laboratoires de biologie médicale, “essentiellement liée au phénomène de regroupement engendré par les acquisitions massives réalisées par des groupes financiers, notamment étrangers”. Il souligne qu’alors qu’il y a 20 ans, il n’existait pas de groupes financiers dans la biologie médicale de ville en France, “aujourd’hui, 6 groupes financiers possèdent 67% de ces entreprises de biologie médicale de ville”. Il fait valoir que, “de 2005 à 2021, avec les rachats successifs, le nombre de laboratoires de ville été pratiquement divisé par 10”.  

Une concentration aussi ressentie par les Français. Selon une enquête Ipos* réalisée pour le compte du réseau, ils sont 77% à avoir le sentiment que les laboratoires sont de plus en plus rachetés par des grands groupes financiers, et 67% à considérer que ce n’est pas une bonne nouvelle car “cette tendance risque de conduire à une réduction des investissements matériels et humains, pour dégager le plus de profits possible”. Selon ce même sondage, 89% des médecins interrogés auraient aussi ce sentiment de mainmise de la finance sur la biologie médicale française et ils seraient 75% à considérer que c’est une mauvaise chose.  

Une concentration qui n’est pas sans conséquences pour le réseau, qui y voit la cause de la réduction considérable du nombre d’intervenants indépendants, du triomphe de la logique financière sur celle du soin”, et de l’accentuation de la désertification médicale de certains territoires “délaissés par les investisseurs en raison d’une densité de population jugée trop faible pour présenter des ratios de rentabilité satisfaisants”.  

Pour y remédier, le réseau interpelle les responsables politiques sur la nécessité de “renforcer la réglementation en vigueur”. Celle-ci prévoit, rappellent Les biologistes indépendants, que plus de la moitié du capital et des droits de vote d’une société d’exercice libéral (SEL) soit détenue par les professionnels de santé exerçant dans la SEL et que les non-biologistes sont limités à 25% du capital. Parmi les problèmes : “depuis 2001, des biologistes n’exerçant pas dans une SEL identifiée peuvent y être majoritaires”, ce qui a “permis à des fonds financiers d'utiliser des sociétés de biologie étrangères qu’ils contrôlent pour prendre des participations majoritaires dans les laboratoires hexagonaux”.  

*Sondage Ipsos réalisé pour Les biologistes indépendants en mars et avril 2022 auprès de 400 médecins généralistes et de plus de 1000 Français de plus de 18 ans.  

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Nathalie Hanseler Corréard

Nathalie Hanseler Corréard

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