Débusquer une hypotension orthostatique

20/10/2023 Par Brigitte Blond
Gériatrie

[Journée scientifique de Broca] Les derniers chiffres de la démographie en France confirme l’augmentation importante de la part des seniors dans la société. Ainsi, selon l’Insee, au 1er janvier 2023, 21,3% de la population française avaient 65 ans ou plus, alors qu’ils n’étaient que 17,1 % dans cette tranche d'âge en 2012. Dans ce contexte, la santé des plus âgée est au cœur de la pratique professionnel de nombreux médecins. La Journée scientifique de Broca, qui a eu lieu le 28 septembre, a permis de faire le point sur l’hypotension orthostatique. A un certain âge, l’hypotension orthostatique doit systématiquement être recherchée, car c’est une question vitale. Mode opératoire à la lueur de recommandations dédiées en cours d’actualisation*.   « L’hypotension orthostatique (HO) est définie par une diminution de la pression systolique d’au moins 20 mm Hg et/ou de la diastolique d’au moins 10 mm Hg dans les 3 minutes du lever (et non 5 minutes comme dans l’ancienne définition, établie par un consensus d’experts en 2014) », rapporte le Pr Hanon (Hôpital Broca à Paris). Elle peut être symptomatique ou non. Et il n’est bien sûr pas question d’attendre le symptôme pour la mettre en évidence et agir... La pression artérielle doit être mesurée à une et 3 minutes. Il peut arriver qu’elle survienne plus tard, à 9-10 minutes, et c’est dans ces cas que le Holter tensionnel peut être précieux. C’est, en effet, l’outil le plus efficace dans ce cas, à porter au moins sur la journée. Et il n’est pas forcément nécessaire de passer par le cardiologue. Pour juger de la réalité de l’HO, le patient doit être couché plutôt qu’assis avant de se mettre debout (le résultat est sinon moins sensible). Une fois l’HO confirmée, il s’agit de déterminer si celle-ci est d’origine neurogène (pour laquelle il existe un traitement spécifique) ou liée à une hypovolémie, les deux étant souvent intriquées. A la station debout, la fréquence cardiaque normalement s’accélère, mais de moins de 20 battements par minute si le système nerveux autonome fonctionne moins bien. Au-delà de 20 battements par minute supplémentaires, l’HO est a priori “hypovolémique“. A noter, la Mapa (automesure à domicile) ne renseigne pas sur la position du malade en situation d’hypotension, uniquement sur la “charge“ d’hypotensions.   Dysautonomie ou hypovolémie Les différences de pression jour/nuit peuvent orienter : des variations de pression sont en faveur d’une dysautonomie (avec une hypovolémie, la pression est basse en permanence), comme l’absence de baisse nocturne de la pression ou une hypotension au décours d’un repas ou au réveil (alors qu’il devrait se produire une hypertension relative en décubitus à cette heure de la journée). 30 % des personnes de plus de 65 ans ont effectivement une HO. C’est pourquoi la pression artérielle doit être systématiquement prise aussi debout dans cette population, et surtout chez les hypertendus, les patients diabétiques, insuffisants rénaux ou avec une maladie de Parkinson, les patients dénutris, etc., ainsi que lorsque les signes cliniques sont présents et évocateurs : perte de connaissance, trouble visuel, vertige, etc., et ce, après une première station couchée : « ce sont les mesures de pression qui conviennent », insiste le Pr Hanon. Une HO, même asymptomatique, est grave dans la mesure où elle est un facteur prédictif de chute (+ 73 %), d’infarctus du myocarde (+ 30 %), d’accident vasculaire cérébral (+ 64 %), de démence par hypoperfusion (+ 37 %) et de mortalité (+ 36 %).   Prise en charge holistique Une HO neurogène peut compliquer un diabète, une insuffisance rénale, une amylose cardiaque, etc. Une déshydratation, une anémie, un régime désodé, une dénutrition, etc. ou la prise de médicaments (antihypertenseurs, psychotropes, etc.) sont à l’origine d’HO secondaires ; ce sont autant de facteurs déclenchants à identifier. « Les patients les plus âgés cumulent les raisons d’HO, ce qui justifie la prise en charge nécessairement holistique », résume-t-il. Si antihypertenseurs il y a, la solution n’est pas de les arrêter mais de faire le tri. Les b bloquants sont à l’évidence les plus pourvoyeurs de HO (le risque est multiplié par 7 !) : « mieux vaut garder les inhibiteurs calciques et les IEC en réduisant légèrement les doses, conseille-t-il, anticalcique le matin, IEC le soir ». En cas d’HO neurogène, si les mesures non pharmacologiques adoptées en première intention (voir encadré) ne suffisent pas, on peut tenter une bithérapie (midodrine et fludrocortisone) en 2 à 3 prises par jour à faibles doses pour limiter autant que possible les effets secondaires de l’un ou de l’autre médicament. *Consensus d’experts de la Société Française d’Hypertension Artérielle et Société Française de Gériatrie et Gérontologie  

HO et mesures non pharmacologiques
Pour minimiser une hypotension orthostatique (HO), quelle qu’en soit la cause, il existe quelques conseils : se lever doucement bien sûr, boire 2 litres d’eau par jour, incliner la tête du lit de 10° vers le haut (pour éviter les hypertensions nocturnes), et porter une compression veineuse (bas ou chaussettes) la journée de classe 2 ou 3 (nouvelles générations).
En cas d’accident hypotensif, on peut pratiquer des manœuvres de secours : s’agripper les deux mains, serrer fortement une petite balle dans la main, piétiner et/ou boire un grand verre d’eau.
Enfin, pour limiter le risque d’HO post-prandiale, il est utile de fractionner les repas, qui doivent être pauvres en glucides d’absorption rapide, et de consommer de la caféine et de l’eau pendant le repas. Les antihypertenseurs doivent être pris à distance des repas. Une sieste est conseillée.

 

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Médecine du travail
il y a 6 mois
Caféine préconisée lors des repas ! Trop bien, merci ! Quand j’étais très jeune je n’avais qu’une crainte : qu’une maladie ne me contre-indiquât un jour mon petit café de midi. Quel ne fut pas le soul...Lire plus

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