Rémission dans le VIH : traiter très précocement pourrait être la clé

17/01/2024 Par Marielle Ammouche
Infectiologie
Des données observationnelles ont montré que certains patients porteurs du VIH et traités pour cela sont capables de se retrouver en rémission durable, c’est-à-dire de maintenir une absence de virémie en l’absence de tout traitement.

  C’est le cas, en particulier, des sujets de la cohorte Visconti, datant d’il y a près de dix ans, qui a regroupé une trentaine de ces sujets dits "contrôleurs post-traitement". Certains des participants de cette cohorte sont en rémission sans traitement depuis plus de 20 ans. L’analyse des caractéristiques des membres de cette cohorte a suggéré que le fait de commencer le traitement antirétroviral précocement est nécessaire pour obtenir cette rémission. Pour approfondir cette question, des chercheurs de l’Institut Pasteur ont mené une étude sur des primates. Infectés par le virus d'immunodéficience simienne (SIV), ils ont été séparés en trois groupes : certains ont bénéficié du traitement antiviral précocement, dans les quatre semaines suivant l’infection (soit en phase aiguë), alors que d’autres n’ont été traités que plusieurs mois après (en phase chronique) ; enfin, un dernier groupe ne recevait aucun antiviral. Pour les animaux des deux premiers groupes, le traitement était poursuivi deux ans avant d’être arrêté. Les analyses ont alors mis en évidence que le traitement précoce favorisait "très fortement" le contrôle viral après interruption du traitement, souligne l’Institut Pasteur, dans un communiqué accompagnant la parution de cette étude. En revanche, lorsque le traitement était commencé en phase chronique, aucun effet protecteur n'a été constaté.  Mais les auteurs sont allés plus loin en établissant le rationnel sur le plan biologique de ce phénomène. Ainsi, ils ont montré que la mise en place d’un traitement précoce et prolongé, favorise le développement des cellules T CD8 mémoire ; et ces dernières permettent de contrôler efficacement le rebond viral qui apparaît après interruption du traitement. "On constate que le traitement précoce maintenu pendant deux ans optimise le développement des cellules immunitaires. Elles acquièrent une mémoire efficace contre le virus, pour l’éliminer naturellement lors du rebond viral après arrêt du traitement", explique Asier Sáez-Cirión, responsable de l’unité Réservoirs viraux et contrôle immunitaire à l’Institut Pasteur, et co-auteur principal de l’étude.   Fenêtre courte de mise sous traitement Les résultats de cette étude constituent donc un nouvel argument pour améliorer le plus possible le dépistage précoce et la prise en charge rapide des personnes infectées par le VIH. "Notre étude indique l’existence d’une fenêtre d’opportunité pour favoriser la rémission de l’infection par le VIH", commente Asier Sáez-Cirión. Et cette fenêtre paraît courte, puisqu’un retard de six mois constitue déjà une perte de chance. Or ce délai "est déjà considéré comme très court par rapport à ce qui se passe en clinique actuellement, où la plupart des personnes avec VIH démarrent leur traitement des années après l’infection à cause du dépistage trop tardif", constate Roger Le Grand, directeur de l’infrastructure nationale de recherche préclinique sur les maladies infectieuses (IDMIT) et co-auteur principal de l’étude. Le bénéfice du traitement est double : individuel, mais aussi collectif, en évitant la transmission du virus.

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