Tenant à rester anonyme, un médecin ophtalmologue a décidé de se confier après avoir constaté une accumulation de pratiques frauduleuses dans cinq centres de consultation en région parisienne. Tout a commencé lorsqu’il est contacté par un chasseur de têtes. Ce dernier lui propose a minima 1.200 euros net par jour. Le médecin se dit, dans les colonnes du Parisien, “abasourdi”. Mais, puisque la proposition concerne un centre de santé associatif, donc “sans but lucratif”, il accepte la proposition. “On me proposait trois fois le gain d’un remplacement en cabinet libéral ! Je suis tombé sur de vraies arnaques”, se désole-t-il aujourd’hui.
Il raconte que dans certains centres, il arrivait le matin au centre de consultation et qu’il se trouvait face à une liste de 150, 200 voire 300 patients à voir en une journée… Alors qu’il effectuait en réalité 30 à 40 consultations par jour. “En fait, les autres étaient souvent pris en charge par les paramédicaux, notamment les orthoptistes. Je n'ai signé aucune ordonnance, tout se faisait au secrétariat, mais j'ai vite compris qu'il y avait un problème. Il est arrivé que je sorte du cabinet et que je vois des patients que je n'avais pas reçus avec des ordonnances à la main ! J'ai protesté, car c'est prendre le risque de ne pas détecter une pathologie”, raconte-t-il. Désoeuvré, il affirme qu’il ne pouvait “rien faire”, puisqu’une fois que les cartes vitales étaient dans les mains des secrétaires, ce sont elles qui s’occupent de la facturation tandis que le patient ne se doute de rien. “C’est comme ça que certains patients sont facturés pour des actes inutiles ou fictifs, parfois sur 2-3-4 jours, alors qu'ils ne sont venus qu'une fois. Si ces centres étaient parfaitement honnêtes, croyez-vous qu'ils paieraient leurs médecins 1500 euros nets par jour ?”, lâche aussi le médecin au Parisien. Le médecin explique enfin que l’objectif de ces centres est purement “lucratif” et qu’ils n’achètent pas leur matériel. Il est loué trois fois le prix du marché à des “sociétés complices” qui “paient de fausses prestations de conseil” et paient également un loyer “beaucoup plus élevé que la normale à une société foncière” qui est “dans la boucle”, confie-t-il.
Selon le Collège national professionnel d'ophtalmologie (CNPO), ces “actes peu justifiés” et ces “stratégies de facturations hautement critiquables” ont été relevés de manière plus large par “différentes sources” ces derniers mois. “Des contrôles ont été engagés par la Caisse nationale d'Assurance maladie laquelle a aussi identifié ces déviances, alors que l'on assiste à une multiplication rapide du nombre de ces centres”, a aussi assuré le CNPO dans un communiqué. Toujours selon Le Parisien, qui a eu accès au rapport interne de l’Assurance maladie, c'est l'envolée des remboursements réclamés par ces centres de santé, en plein essor depuis 2018, qui aurait fait naître les soupçons. “Pour une patientèle passée de 400.000 personnes en 2015 à 800.000 en 2019 (+100%), le coût des remboursements s'est envolé de 245%", pour atteindre "69 millions d'euros", souligne notamment ce rapport. [avec Le Parisien]
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