Hystérectomie avant la ménopause pour une pathologie bénigne : faut-il ou non conserver les ovaires ?

16/02/2017 Par Pr Philippe Chanson

Avant la ménopause, beaucoup de femmes à qui l’on réalise une hystérectomie se voient proposer, alors qu’elles n’en ont pas d’indication spécifique, une ovariectomie bilatérale comme mesure prophylactique contre le risque de cancer de l’ovaire. Quels sont réellement les avantages (protection contre le cancer de l’ovaire) et les inconvénients (diminution de la production endogène d’estrogènes, ce qui pourrait augmenter le risque de pathologie cardiovasculaire ou de mortalité globale) à long terme de cette ovariectomie ?

Afin de répondre à cette question, une analyse rétrospective d’une base de données britannique des hospitalisations reliées à des registres nationaux a été réalisée auprès de 113 679 patientes âgées de 35 à 45 ans qui avaient eu une hystérectomie pour une pathologie bénigne entre avril 2004 et mars 2014. Ont été comparées l’ovariectomie bilatérale et l’absence d’ovariectomie bilatérale ou la préservation d’un ovaire. Un tiers des patientes ont eu une ovariectomie bilatérale. Après l’hystérectomie, les patientes du groupe "conservation ovarienne" avaient moins de risques d’être hospitalisées pour une pathologie cardiaque ischémique que ne l’avaient celles du groupe "ovariectomie bilatérale" (hazard ratio ajusté = 0.85 ; IC 95 % = 0.77-0.93, p = 0.001). Il y avait aussi moins souvent d’admissions pour cancer en général (hazard ratio ajusté = 0.83 ; 0.78-0.89, p < 0.001). Une différence significative dans la mortalité globale a aussi été observée : 0.60 % chez les patientes avec conservation ovarienne et 1.01 % chez les femmes avec ovariectomie bilatérale. Là encore cette différence était en faveur de la conservation ovarienne (hazard ratio ajusté à 0.64 ; 0.55-0.73 ; p < 0.001). Moins de décès en lien spécifiquement avec une pathologie cardiaque (hazard ratio ajusté = 0.5 ; 0.28-0.90 ; p = 0.02) et en relation avec un cancer (0.54 ; 0.45-0.65 ; p < 0.001) sont survenus dans le groupe "conservation ovarienne" en comparaison du groupe "ovariectomie bilatérale". Il n’y avait pas de différence significative entre les groupes en termes de suicide. En conclusion, les patientes qui avaient une conservation ovarienne avaient un risque significativement inférieur de mortalité globale en comparaison de celles qui avaient une ovariectomie bilatérale ; elles avaient aussi un moindre taux de décès par pathologie cardiaque ischémique ou cancer. Il en était de même pour les admissions hospitalières. Même si l’ovariectomie bilatérale protège contre le développement ultérieur d’un cancer de l’ovaire, les femmes qui sont opérées de l’utérus avant la ménopause doivent être averties que ce bénéfice se fait au prix d’une augmentation du risque de pathologie cardiovasculaire et du risque de survenue d’autres cancers (plus fréquents) et d’une mortalité globale supérieure.

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