Lupus cutané : le reconnaître, le traiter

12/01/2021 Par Brigitte Blond
Dermatologie

Rare mais pas exceptionnel, le lupus cutané, doit être rapidement identifié pour proposer un traitement qui évite les lésions cicatricielles, définitives. Un point sur cette pathologie a été réalisé lors des Journées dermatologiques de Paris, qui se sont déroulées en virtuel du 1er au 5 décembre 2020.   Un lupus cutané inaugure 25 % des lupus systémiques… Et 80 % des lupus présentent une atteinte cutanée. C’est dire l’intérêt d’une prise en charge conjointe, médecin de famille, dermatologue, interniste, rhumatologue et/ou néphrologue. Sachant qu’un lupus cutané (caractérisé par une dermite d’interface à la biopsie cutanée) peut rester “purement“ cutané toute la vie. Il est classé en 4 grands sous-types qui déterminent la suite des évènements : aigu, subaigu, chronique (discoïde, engelures ou panniculites) ou intermittent, l’évolution de ce dernier étant très liée à l’exposition solaire, et toujours “pur“. Ainsi, un lupus cutané aigu, dans plus de 95 % des cas associé à un lupus systémique, ne laisse pas de cicatrice : il est plutôt du ressort de l’interniste ou du néphrologue. Un lupus subaigu est plus volontiers pris en charge par le dermatologue, puisque le lupus systémique associé (une fois sur 2) est rarement sévère. Un lupus cutané chronique, qui s’accompagne moins souvent d’un lupus systémique (10 à 40 % des cas), est donc pris en charge essentiellement par le dermatologue.   Confrontation anatomo-clinique Classiquement, les lésions lupiques sont photosensibles, touchent le visage et le cuir chevelu pour la forme discoïde (la majorité -80 %- des lupus cutanés), à l’origine d’une inflammation du cuir chevelu (puis d’une alopécie cicatricielle) une fois sur 2. Sur le visage, il s'agit de plaques érythémato-squameuses, les lésions ne guérissant pas et se résolvant en plusieurs mois par une atrophie cicatricielle.

Le dosage des anticorps anti-nucléaires dans le sang est un examen classiquement demandé en cas de suspicion de connectivites -dont le lupus- sur une fatigue, des douleurs diffuses, des mains, un rash malaire et/ou une alopécie. Leur niveau n’est pas déterminant dans la mesure où ils sont élevés chez 15 à 20 % de la population générale (plus souvent chez les femmes), souffrant ou non de lupus, et que leur prévalence croît régulièrement depuis une vingtaine d’années… Par ailleurs, ils peuvent être normaux alors qu’existe un authentique lupus cutané. Les lésions du visage peuvent être confondues avec celles d’une dermite séborrhéique ou surtout d’une rosacée, aggravée elle aussi par le soleil, fréquente chez la femme, comme d’ailleurs le lupus cutané (où le ratio est de 3 femmes pour un homme)… « Notre travail consiste heureusement le plus souvent à écarter l’éventualité d’un lupus », rassure le Dr François Chasset, dermatologue à l’Hôpital Tenon (Paris), et au Centre National de Référence du Lupus à l’Hôpital de la Pitié-Salepétrière (Paris). On peut aussi évoquer à tort un psoriasis, une pelade, etc., sur des lésions du cuir chevelu et/ou la conque des oreilles.   Hydroxychloroquine en première ligne L'hydroxychloroquine (HCQ) est le traitement de première intention d’un lupus cutané. Or il a fait l’objet d’une modification en 2019 de son RCP (résumé des caractéristiques du produit) dans le cadre de la mise en conformité avec la réglementation européenne qui restreint ses indications : est ainsi apparu un pictogramme “danger“ en cas d’utilisation au cours de la grossesse sur les boîtes de médicament en raison de son caractère potentiellement génotoxique. La prescription d’une...

contraception, pendant le traitement et jusqu’à 8 mois après son arrêt, avant d’envisager une grossesse est par ailleurs recommandée dans le RCP, toutes ces précautions étant issues de données anciennes sur la chloroquine (et non l’HCQ) pour la 1ère mise en garde, d’une demi-vie du produit largement surestimée (à 40 jours, alors qu’elle ne serait en réalité que de 5 à 7 jours selon des travaux récents). Des études de génotoxicité sont en cours qui permettront de réajuster la conduite à tenir pour les femmes “lupiques“. Et « des recommandations françaises des sociétés savantes concernées, en 2021, spécifiques à l’HCQ, devraient réhabiliter son utilisation au cours de la grossesse et rassurer sur la bonne tolérance cardiaque du produit au sein d’une population jeune sans comorbidité cardiovasculaire », annonce le Dr Chasset. Ce qui est d’ailleurs déjà le cas dans les recommandations européennes et le PNDS (protocole national de diagnostic et de soins).

  De nouvelles pistes thérapeutiques Enfin, le développement de médicaments est sans doute facilité par la validation, récente, d’un score d’activité spécifique, le Clasi (pour Cutaneous Le Disease Area and Severity Index). Trois grandes voies sont aujourd’hui explorées, celle des lymphocytes B et des plasmocytes, avec le bélimumab, en cours d’évaluation dans le lupus cutané (après une AMM pour le lupus systémique). 2ème piste, celle de l’interféron de type 1 avec un anticorps monoclonal anti-IFN récepteur et un anticorps anti-cellule dendritique plasmacytoïde. Et peut-être la voie des Th1 et Th17… Dernières molécules prometteuses, la thalidomide, qui dispose d’une recommandation temporaire d’utilisation depuis 2015, et, à venir s’il tient ses promesses, un analogue, l’iberdomide.

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