Cancer chez les sujets âgés : la Ligue alerte sur des spécificités mal prises en compte

08/06/2017 Par Marielle Ammouche
Cancérologie

La Ligue contre le cancer publie les derniers résultats de son Observatoire sociétal du cancer, consacré cette année aux personnes âgées de plus de 75 ans. Ils mettent en évidence des difficultés d’accéder à une prise en charge optimale, ainsi que des besoins spécifiques et un manque d’essais thérapeutiques dédiés.

Aujourd’hui, plus d’un nouveau cas de cancer sur trois touche les personnes de 75 ans et plus. Et cette proportion devrait à l’avenir prendre de l’ampleur : on estime qu’en 2050, elle passera à 1 sur 2. Le cancer survenant chez les sujets le plus âgés représente donc un enjeu de société majeur, comme le souligne la Ligue contre le cancer, qui y a donc consacré la dernière édition de son Observatoire sociétal du cancer. Les résultats de cette vaste enquête annuelle viennent en effet d’être rendus public. "Pour la première fois, une étude permet de recueillir des informations sur le vécu des personnes âgées atteintes d’un cancer, ainsi que l’avis du grand public, des professionnels de santé et des aidants", détaille ainsi Emmanuel Jammes, délégué Société et politiques de santé de la Ligue contre le cancer. Cette étude met en lumière les particularités de cette population face à la maladie, ainsi que leurs besoins spécifiques et les insuffisances observées dans la prise en charge. Un diagnostic tardif Au total, un million de Français âgés de 75 ans et plus ont ou ont eu un cancer au cours de leur vie, et près de 700 000 d’entre eux sont actuellement en traitement ou suivis pour cette affection. En outre, la mortalité y est élevée : la moitié des décès par cancer touche les personnes de 75 ans et plus. Pourtant, l’un des enseignements essentiels de l’Observatoire est que, pour les personnes âgées, le cancer n’est ni une fatalité, ni synonyme de fin de vie. "Elles veulent croire en leur avenir et poursuivre leur vie normalement", ajoute Emmanuel Jammes. Et ce sentiment est partagé par l’ensemble de la population : 85% des Français estiment que tout doit être mis en œuvre pour soigner une personne âgée, et 72% que les seniors doivent pouvoir bénéficier des meilleurs traitements. Par ailleurs, 64% n’adhèrent pas à l’idée que soigner le cancer d’une personne âgée coûte trop cher à la Sécurité sociale. Pourtant, force est de constater que la prise en charge des personnes âgées souffrant d’un cancer est loin d’être optimale. Elle est souvent tardive, avec pour conséquences des traitements plus lourds, porteurs de plus d’effets secondaires. Et les options thérapeutiques sont souvent réduites en raison des comorbidités. Au final, les chances de guérison sont plus faibles que pour l’ensemble de la population. "Aujourd’hui, les personnes âgées atteintes de cancer sont le plus souvent traitées en adaptant les traitements « standard » utilisés pour les personnes plus jeunes", affirme la Ligue. Et seules 1 à 2 % des personnes âgées de 75 à 85 ans sont incluses dans des essais cliniques en cancérologie, même s’il faut reconnaitre que ce chiffre est en augmentation ces dernières années. En outre, malgré la forte proportion de personnes âgées, peu d’essais sont spécifiquement dédiés à ces malades, alors que leur prise en charge est complexe et spécifique.     L’impact majeur des conditions de vie L’Observatoire met aussi en lumière combien les conditions de vie des personnes âgées ont un impact important sur le vécu de la maladie. Ainsi, cinq facteurs aggravent la situation des personnes âgées atteintes d’un cancer : avoir de moins bonnes relations avec ses proches, se sentir seul, être éloigné des structures de soins, avoir besoin d’aide dans les tâches quotidiennes, et avoir de nombreuses comorbidités. Or, l’Observatoire montre que plus des 2/3 des personnes âgées cancéreuses vivent seules ; 40% vivent avec moins de 1 000 euros par mois ; et 2/3 souffrent d’un ou plusieurs autres problèmes de santé. "Ce n’est pas tant le cancer qui dégrade les conditions de vie, mais les conditions de vie dégradées qui aggravent le vécu du cancer", résume la Ligue. Au contraire, être bien entouré et conserver une activité préserve la qualité de vie. Lorsque les conditions de vie sont plus favorables (meilleurs revenus, vie en couple, plus d’autonomie, etc.), les personnes âgées de 75 ans et + atteintes de cancer vivent globalement bien leur maladie (46% des personnes interrogées).   Développer des outils d’information et de sensibilisation spécifiques Au vu de ces résultats, la Ligue contre le cancer souhaite mettre l’accent sur trois domaines : le diagnostic précoce de la maladie, l’accès aux meilleurs traitements et des réponses spécifiques adaptées aux besoins de cette population vulnérable sur le plan physique, mais aussi souvent sur le plan social et économique. Elle propose, en particulier, de créer une consultation spécifique avant 75 ans "permettant au médecin traitant de faire le point, avec ses patients, sur leurs facteurs de risque de cancer et leurs pratiques de dépistage", ainsi que l’envoi de deux lettres de sensibilisation au fait que les personnes âgées ne bénéficieront plus des programmes organisés de dépistage des cancers du sein et du côlon-rectum à partir de 75 ans, et encourageant donc à consulter son médecin pour une surveillance surveillance régulière et des examens de dépistage si besoin. La Ligue souhaite aussi le développement des essais cliniques de phases avancées, spécifiques aux personnes âgées de 75 ans et plus, avec des protocoles adaptés à leurs spécificités ; ainsi que l’amélioration de la formation des professionnels de santé (médecins spécialistes et généralistes, paramédicaux, etc.) aux spécificités de la prise en charge du cancer chez les personnes âgées ; et le développement de référentiels de prise en charge des cancers spécifiques à l’oncogériatrie. Enfin, elle insiste sur la nécessité de mieux prendre en compte les conditions de vie des personnes âgées : promotion de solutions d’hébergement non médicalisées pour éviter aux personnes âgées éloignées de leur centre de soins de trop nombreux et trop longs trajets durant leur traitement ; et prise en charge des frais de transports pour favoriser le suivi post-traitement.

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