Un comité d’experts, mis en place dans le cadre de la procédure de demande d’autorisation de mise sur le marché (AMM) du baclofène (laboratoire Etypharm) dans la prise en charge de l’alcoolodépendance, vient de rendre un avis négatif concernant le rapport bénéfices/risques de cette molécule dans cette indication.
Ce Comité scientifique spécialisé temporaire (Csst), mis en place par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (Ansm), s’est réuni le 2 février et le 17 avril. Ses conclusions viennent d’être rendues publiques. Il en ressort que l’efficacité du baclofène dans la réduction de la consommation d'alcool chez les patients adultes présentant une dépendance à l'alcool et une consommation d’alcool à risque élevé, telle que présentée dans le dossier de demande d’AMM, a été jugée « cliniquement insuffisante ». Plus précisément, la diminution de la consommation d’alcool par rapport au placebo à 6 mois a été estimée à 11g/jour (critère secondaire de l'étude Alpadir, résultat non statistiquement significatif) et à 6g/jour (critère principal de l'étude Bacloville, résultat statistiquement significatif), « ce qui représente environ 7% de la consommation initiale moyenne » précisent les experts. Ils soulignent, en outre, « les limites méthodologiques importantes » de ces deux études avec : une faible puissance statistique, une forte proportion de données manquantes et un nombre important d’abandons en cours d’étude. De plus, aucun effet-dose « permettant de définir une plage thérapeutique optimale » n’a été montré, ni d’efficacité sur l’abstinence à 6 mois, qui était pourtant le critère principal de l’étude Alpadir. Seule une efficacité sur le craving (composante obsessionnelle/compulsive de l’envie de boire) a été montrée dans les deux études. Concernant la sécurité du baclofène, le comité d’experts constate une proportion plus élevée... d’événements indésirables avec ce traitement qu'avec le placebo (troubles psychiatriques et du système nerveux, asthénie, troubles gastro-intestinaux, principalement). Les événements graves (pouvant aller jusqu’au décès), étaient deux fois plus fréquents avec le baclofène qu'avec le placebo dans l'essai Bacloville mais pas dans l'essai Alpadir. Et cette proportion semble augmenter en fonction de la dose de baclofène reçue. Les auteurs concluent donc que l’efficacité « cliniquement insuffisante » du baclofène, « ajouté à un risque potentiellement accru de développer des événements indésirables graves (y compris des décès) en particulier à des doses élevées, conduit à considérer que le rapport bénéfice/risque est négatif ». Cette analyse d'experts européens doit toutefois être complétée par une approche pluridisciplinaire et par l'audition des praticiens ainsi que des patients utilisant ce médicament dans l'alcoolo-dépendance, précise l'agence du médicament qui prendra la décision finale. L'Ansm réunira les 3 et 4 juillet prochains une commission temporaire formée de médecins, pharmaciens... qui auditionnera les sociétés savantes et les associations de patients concernées. Ces auditions seront diffusées en direct sur le web. Le baclofène est autorisé en France depuis 2014 pour traiter la dépendance à l'alcool, grâce à une recommandation temporaire d'utilisation (RTU) et a fait l'objet en avril 2017 d'une demande d’AMM du laboratoire Ethypharm pour le traitement de l'alcoolo-dépendance.
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