Vertiges d’origine vestibulaire : la place centrale de la rééducation

09/11/2023 Par A.V.
ORL
La rééducation vestibulaire doit être la plus précoce possible. La SFORL fait le point sur les nouvelles recommandations.

  "Les patients présentant un déficit vestibulaire aigu (DVA) ou un déficit vestibulaire unilatéral chronique mal compensé doivent avoir une rééducation vestibulaire (RV) avec le fauteuil rotatoire le plus précocément possible", souligne le Pr Vincent Darrouzet, ORL et président du congrès. Pour ceux ayant des déficits vestibulaires et des sensations vertigineuses visuellement induites, la prise en charge (PEC) est une stimulation optocinétique. Chez les patients ayant un déficit du réflexe vestibulo-oculaire (RVO) ou de lacuité visuelle dynamique (AVD), les exercices de stabilisation du regard sont recommandés. Une PEC précoce facilite la compensation et accélère le processus physiologique de croissance neuronale. "Il a été parfaitement démontré, encore récemment que, dans le cerveau, le système de l'équilibre est la partie la plus capable de se compenser", précise le Pr Darrouzet. "L'objectif est de favoriser la perception du soi dans l’espace, c'est-à-dire connaître la position des yeux dans l'orbite et la position de la tête dans l'espace. Il faut coupler les deux", complète le Pr Christian Van Nechel, neurologue, La PEC du patient cervicalgique vertigineux instable nécessite une kinésithérapie active du rachis cervical. Elle suppose un diagnostic étiologique préalable permettant d'éliminer un problème vestibulaire et neurologique pour ensuite envisager le cervical (isolé ou associé). La kinésithérapie peut être complémentaire à une RV. La réalité virtuelle à usage thérapeutique n'est pas recommandée pour des patients n'ayant pas bénéficié d'un bilan vestibulaire préalable. Elle est proposée en complément de la RV conventionnelle. "Et surtout, elle est contre-indiquée pour les sujets représentant des épilepsies photosensibles ou un cyber malaise durable", intervient le Pr Darrouzet. Selon le Pr Van Nechel : "la réalité virtuelle est un extraordinaire créateur de discordance sensorielle car elle vous informe que vous bougez dans une direction donnée alors que votre motricité et d'autres capteurs proprioceptifs ne vous l’indiquent pas. Toutefois, elle est efficace dans la désensibilisation de l’acrophobie au même titre que l’arachnophobie. Mais cet aspect est relativement restreint". Les vertiges positionnels paroxystiques bénins (VPPB) sont les vertiges les plus fréquents. "Le dispositif de vidéonystagmoscopie (VNS) est indispensable. Les critères de la Barany doivent être appliqués pour le diagnostiquer car attention aux faux VPPB. Le traitement d’un VPPB repose sur les manoeuvres d’Epley ou de Sémont. La forme géotropique [nystagmus déclenché par les deux positions de décubitus et battant du côté où est couché le patient, NDLR] repose sur celles de Guffoli ou de rotation de barbecue de Lempert. Il n’existe pas de consensus sur les agéotropiques ou VPPB antérieurs car ce sont des situations extrêmement hétérogènes. Les agéotropiques peuvent avoir une origine neurologique centrale et le bilan diagnostique doit être très poussé, sûrement jusqu'à l'examen IRM", indique le spécialiste. La névrite vestibulaire doit être traitée par une RV le plus précocément possible. Le processus d'adaptation est privilégié sur celui d'habituation avec un protocole personnalisé pour chaque patient. Concernant la maladie de Ménière, les séances de RV ne sont pas recommandées chez des patients non stabilisés ou en période critique. Elle a un intérêt chez ceux ayant des troubles de l'équilibre chroniques ou un déficit vestibulaire spontané et non compensé d'installation progressive ou provoqué par un traitement chirurgical ou des injections de gentamicines. La RV est également recommandée chez ceux souffrant de VPPB intercritiques. L’activité physique est conseillée excepté en cas d’atteinte vestibulaire intercritique. "Le déficit bilatéral (DVB), situation peu fréquente, est une maladie complexe avec des diagnostics neurologiques plus ou moins précis", précise le Pr Darrouzet. La RV doit être proposée ainsi que l’adaptation incrémentale du RVO et la stimulation optocinétique. Les patients souffrant d’un PPPD (Persistent Perceptual Postural Dizziness) doivent avoir une rééducation associée à une PEC pharmacologique et psychique (anxiété). Pour le Pr Van Nechel : "ces patients ont des symptômes non pas par déficit, mais par hypersensibilité. Ce sont des PEC à long terme". Dans les troubles de vergence (ie de la coordination des deux yeux), la rééducation orthoptique a un rôle important. En raison d'une possibilité de vertiges liés à des migraines induites par les troubles visuels ou oculomoteurs, un examen ophtalmologique ou orthoptique est requis. Lorsqu'un patient présente des troubles de l’équilibre alors qu’il est traité par des médicaments vestibulotoxiques ou neurotoxiques pour un cancer ou une infection grave, il est recommandé de poursuivre le traitement de la maladie causale en l’adaptant si possible. L’étiologie du vertige doit être recherchée. La PEC symptomatique est associée. "Les vertiges centraux nécessitent une enquête étiologique. Le rôle du neurologue est essentiel. Il est recommandé de réaliser une rééducation multisensoriale et motrice en cas d'atteinte centrale et de l'adapter en fonction des autres atteintes neurologiques associées", pointe le spécialiste. "Chez le sujet âgé, les troubles de l'équilibre sont systématiquement multifactoriels", indique la Pre Cécile Parietti-Winkler, ORL, qui poursuit "au vieillissement de la fonction d’équilibration se rajoutent un vieillissement de l'effecteur moteur et des comorbidités associées… Souvent, nous ne savons pas par quelle problématique commencer. L'évaluation du risque de chute est très importante. Qui dit chute dit souvent pathologies en cascades qui aboutissent à une institutionnalisation, voire au décès. À mon sens, cela nécessite une PEC en urgence pour rechercher une pathologie vestibulaire et préserver l'autonomie de ces patients". Enfin, la RV est recommandée en cas de cinétose, ou mal des transports. "Chez l’enfant, la RV est très sous-estimée. Beaucoup considèrent qu'elle n'a pas d'intérêt. Elle est pourtant recommandée chez les enfants dont l’atteinte vestibulaire entraine des troubles fonctionnels ou des symptômes de vertiges et chez ceux ayant eu un traumatisme crânien avec des vertiges ou des troubles de l’équilibre persistants. Il n’est pas recommandé d’utiliser les stimulations optocinétiques ni la réalité virtuelle", conclut le Pr Darrouzet.  

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