Covid

Avec le Covid-19, le diabète de type 2 est reparti à la hausse

Mortalité, incidence, prévalence… Depuis 2010, tous les indicateurs épidémiologiques du diabète de type 2 (DT2) étaient à la baisse. Cette décrue a été stoppée net par la crise sanitaire de 2020. Sans que l’on sache si cet effet Covid-19 sera transitoire ou durable.

17/04/2024 Par Romain Loury
SFD 2024
Covid

Depuis 2010, les chiffres du DT2, aussi bien en prévalence qu’en d’incidence ont fléchi. Selon des données présentées en 2023, lors du précédent congrès annuel de la Société francophone du diabète (SFD), l’incidence a baissé de 1,04% par an entre 2010 et 2020 chez les hommes, de 1,74% par an chez les femmes. Quant à la prévalence, elle s’est stabilisée chez les femmes (voire a décru dans les départements d’outre-mer, les plus touchés par le diabète), tandis que sa hausse a décéléré chez les hommes. Observé dans d’autres pays occidentaux(1), ce ralentissement semble indiquer que les efforts de prévention, en matière d’alimentation et d’activité physique, commencent enfin à payer contre le DT2.

 

Mortalité en baisse, surmortalité en hausse
Selon de nouveaux résultats présentés par Sandrine Fosse-Edorh, coordinatrice du programme de surveillance du diabète de Santé publique France (SpF), la mortalité a elle aussi reculé. Pour montrer cela, les épidémiologistes ont recouru aux données de remboursement du Système national des données de santé (SNDS). Leurs résultats montrent que, chez les hommes diabétiques de type 2, le taux de mortalité a enregistré une baisse significative de 0,52% par an sur la période 2013-2019. Chez les femmes, la tendance est aussi à la baisse (-0,16% par an), sans atteindre la significativité statistique. De même, l’âge moyen au décès chez les hommes diabétiques est passé de 75,4 ans en 2013 à 76,7 ans en 2019, tandis qu’il est passé de 80,2 ans à 81,2 ans chez les femmes sur la même période.

Une comparaison avec la population générale atténue toutefois la portée de ces résultats. Si le nombre de décès diminue chez les patients diabétiques de type 2, cette maladie est liée à une surmortalité de 42% par rapport à la population non diabétique, pour les hommes en 2019. Or ce chiffre a très légèrement augmenté au cours des dernières années. Ce qui signifie que, même si la mortalité diminue chez les diabétiques, le recul est encore plus prononcé chez les non-diabétiques. D’où un écart grandissant entre diabétiques et non-diabétiques, que Santé publique France peine à s’expliquer.

 

En 2020, décès et nouveaux cas en hausse
Ces tendances favorables ont connu un brusque coup d’arrêt en 2020, avec la crise Covid-19. Rapidement identifié comme un important facteur de vulnérabilité, le DT2 a été lié à un surrisque de 64% de développer une forme grave de Covid-19, de 75% d’en décéder, par rapport à la population générale (2). Raison pour laquelle, selon d’autres chiffres de SpF présentés lors du congrès de la SFD, la mortalité des diabétiques de type 2 est très nettement repartie à la hausse en 2020. Pour cette année-là, SpF estime le surplus à 7 458 décès chez les hommes et 4 404 décès chez les femmes, par rapport aux niveaux attendus. Et ces chiffres se sont accrus d’environ 50% en 2021, malgré l’arrivée des vaccins.

Selon Sandrine Fosse-Edorh, il s’agit là d’« un effet direct de la mortalité par Covid. En population générale, le Covid-19 est resté la troisième cause de mortalité en 2021. Ou bien d’un effet indirect dû à un moindre recours aux soins : ce phénomène a aussi été observé pour la mortalité liée aux complications aigües des maladies endocriniennes, nutritionnelles et métaboliques », elle aussi en forte hausse en 2020 et en 2021.

Encore plus frappant, l’incidence a aussi connu un bond lors de la crise du Covid-19. Pour 2021, Santé publique France estime à 30 057 et 26 169 le surplus de nouveaux cas de DT2, respectivement chez les hommes et les femmes, par rapport aux niveaux attendus par extrapolation de la période 2013-2019. Ce regain diabétique pourrait s’expliquer par l’impact du confinement sur le mode de vie (alimentation, activité physique), situation qui a peut-être précipité le passage du prédiabète (qui touche environ 10% des adultes) à un diabète déclaré. Selon Sandrine Fosse-Edorh, l’infection par le Sars-CoV-2 pourrait aussi avoir eu un effet direct sur l’équilibre glycémique. Selon l’épidémiologiste de SpF, « on observe une interruption des tendances favorables observées lors de la période pré-Covid. Il faut absolument poursuivre la surveillance épidémiologique afin de mieux comprendre ces changements de tendance. Cet effet peut être transitoire, s’il est directement lié à la Covid-19, mais aussi s’inscrire sur le long terme, s’il est dû au changement de mode de vie ou à un moindre recours aux soins. Dans ce cas, il est nécessaire de mettre rapidement en place des actions de prévention".

Au sommaire du congrès :
-    Boucle fermée, greffe d’îlots, sujet âgé… Que faut-il retenir du congrès de la Société francophone du diabète ?
-    La boucle fermée tient ses promesses "en vie réelle"
-    Diabète du sujet âgé : traiter sans surtraiter
-    Ménopause du diabète : les effets bénéfiques du traitement hormonal
-    La thérapie cellulaire, nouvel horizon de la greffe d’îlots

(1)Magliano DJ et al., Lancet Diabetes & Endocrinology, 23 février 2021
(2)Semenzato L et al., Lancet Regional Health Europe, 16 juillet 2021

Références :

Congrès de la Société francophone du diabète (Toulouse, 19-22 mars). D’après la présentation de Sandrine Fosse-Edorh (Santé publique France), lors de la session "Epidémiologie-santé publique".

 
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