"Je vous dois la vie, je vous fais désormais une confiance aveugle" : ce jour qui m'a rendu fier d'être médecin
Chaque été, Egora donne la parole à ses lecteurs. Médecins, vous avez été nombreux à nous raconter ce moment où le choix de votre profession a pris tout son sens. Diagnostic posé à temps, reconnaissance des patients… Voici une sélection de vos témoignages.
Responsabilité
"J'étais interne en Saspas. Je vois un patient d'une trentaine d'années pour un certificat de sport. Il avait un antécédent de CIV opérée et stable depuis une dizaine d'années. Il y avait un souffle au cœur résiduel mais coté à 2/6 par le cardio il y a 2-3 ans. Il n'avait aucun symptôme, il courait tous les jours sans souci. Quand je l'examine, je cote le souffle à 4/6 - première fois que j'entendais un pareil souffle. J'étais mitigée entre l'envoyer de suite au cardio ou attendre son rendez-vous habituel, fixé dans 4 mois. Finalement, je décide quand même d'avancer son rendez-vous cardio et de lui interdire le sport. Résultat : il a été opéré en urgence, la valve était complètement inopérante. Je n'ai eu la suite de l'histoire qu'un an plus tard, quand je suis revenue faire un remplacement chez mon ancien MSU, et que j'ai revu ce patient. Il m'a dit : "Je vous dois la vie, je vous fais désormais une confiance aveugle". J'ai ressenti un sentiment de fierté et en même temps de peur. Elle pèse lourd, la responsabilité d'avoir la vie des gens entre ses mains."
Fin de vie
"Ma plus grande fierté en tant que médecin : les accompagnements de patients en fin de vie à leur domicile. Accompagner, rassurer, soulager, écouter… et la mort qui arrive juste au bon instant. Une complicité avec les aidants, la famille pour prendre soin de la vie jusqu'au bout. Je me souviens de chacune des personnes. J'ai leur visage. J'ai leur soupir. Je garde au cœur la gratitude de la famille. C'est une parenthèse de vie sincère, juste et alignée. C'est un temps hors temps. Une parenthèse qui se referme. Une trace dans mon vécu de médecin de famille jusqu'au bout qui accompagne la vie. " Dre Lisa OTTON, Roanne.
Triple pontage
"Je suis médecin du sport et j'habite en Occitanie. J'effectuais la surveillance d'une épreuve cycliste de haut niveau en Bretagne, à 8h de route de mon domicile donc, avec plus de 400 sportifs. J'ai été appelé vers 14 heures pour le malaise d'un spectateur de 76 ans : nausées, vomissements, pâleur, sueur, douleur thoracique...Il est évacué sous notre tente avec les secouristes : test à la trinitrine positif, allo la régulation, perfusé sur place. Le Samu arrive, infarctus massif... Le patient est évacué au centre hospitalier mais pas de nouvelles si ce n'est qu'il est dans un piteux état. Je refais la surveillance médicale de cette épreuve l'année suivante : la famille du patient vient me voir pour me dire que le patient est dans un centre de réadaptation cardiovasculaire. L'hiver dernier, toujours sur la même épreuve, je revois... le patient, ému aux larmes, et je pleure. Il est vivant. Triple pontage...mais VIVANT!"
Lapins
"Installé depuis trois mois à la campagne, une patiente vient à la consultation avec un cabas dans chaque main. Je l examine, fais la prescription et alors que je termine l'entretien, elle brandit ses cabas, qui s'agitaient bizarrement, les pose et sort deux magnifiques rouquins de Bourgogne. Des lapins, dont elle me fait cadeau. Devant ma stupéfaction, elle me dit que c'est pour me remercier des bons soins prodigués à son mari. Évidemment, ils ont eu une longue vie."
Céphalées
"Je reçois un matin une jeune fille qui se plaint depuis plus d'un mois de céphalées permanentes avec des nausées intermittentes. Etudiante dans la commune où j'exerce, elle a déjà consulté plusieurs confrères dans sa ville d'origine. Ceux-ci lui ont diagnostiqué une migraine et lui ont donc prescrit des anti-migraineux. Or, elle me signale qu'ils sont inefficaces sur ses symptômes et que les maux de tête ont même augmenté. Cette jeune patiente ainsi que ses parents n'ont jamais eu de crises de migraine dans le passé. L'examen neurologique est pauvre. Je demande alors un scanner en urgence : il révèle la présence d'une tumeur cérébrale qui s'avère être un glioblastome débutant. Elle est opérée rapidement au CHU de sa ville d'origine et je la perds de vue. Plusieurs mois passent sans nouvelles… Et un jour, je vois cette jeune demoiselle arriver dans mon cabinet. Je l'interroge sur sa santé. Elle m'offre alors en souriant une bouteille de champagne : "C'est pour vous docteur. Je vais bien. Les spécialistes m'ont dit que je suis guérie. Je ne vous remercierai jamais assez, vous m'avez sauvé la vie". Ce jour-là, ces quelques phrases m'ont ému, me suis dit que je n'avais pas choisi mon métier de généraliste pour rien."
"Merci Docteur"
"J’étais médecin du travail dans une grande entreprise. Je vois un monsieur pour la première fois, 40 ans environ, qui présente en haut du bras une lésion étendue de plusieurs centimètres présentant toutes les caractéristiques d’un mélanome. J’organise la prise en charge et deux jours après il a été opéré. La semaine suivante, j’ai trouvé un bouquet de fleurs sur mon bureau avec ces simples mots : merci docteur."
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