Fluoroquinolones : l'ANSM mise hors de cause, les médecins prescripteurs dans le viseur
Le parquet de Paris a écarté une faute de l'ANSM dans l'enquête sur les fluoroquinolones à la suite de plaintes de patients ayant eu des effets indésirables majeurs. Les plaintes ont été transmises aux parquets de résidence des plaignants afin qu'ils statuent sur une éventuelle faute "commise lors de la prescription par le médecin".
Le parquet de Paris a classé sans suite des plaintes visant notamment les autorités administratives et émanant de personnes ayant subi des effets indésirables majeurs, jusqu'à des paralysies, après avoir pris des fluoroquinolones. Souvent prescrits à mauvais escient alors qu'ils présentent des risques d'effets graves, ces antibiotiques sont moitié moins consommés depuis une dizaine d'années, sur fond de mesures restrictives, avait annoncé l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), en février dernier.
Côté judiciaire, une soixantaine de plaintes ont été déposées à partir de 2022, donnant lieu à des investigations au pôle santé publique (PSP) parisien. Dans un courrier adressé au printemps à plusieurs plaignants, et dont l'AFP a eu connaissance vendredi 26 septembre, une procureure du PSP écrit que les plaintes comportent une double dimension, notamment une "problématique générale" consistant à "évaluer les diligences effectuées au niveau de la pharmacovigilance, la prise en compte des effets indésirables graves et la prise de décision concernant les conditions de prescription de cette classe d'antibiotiques".
Après avoir sollicité l'ANSM en août 2023 et reçu plusieurs réponses en octobre 2024 et en février dernier, le pôle santé publique parisien écarte toute faute de la pharmacovigilance, car il y a eu "des modifications régulières des notices du médicament ; des décisions de restriction des indications thérapeutiques et une communication" à destination des professionnels de santé et du public, rapporte l'AFP.
Par conséquent, le parquet de Paris a clos ce volet et transmis les plaintes aux parquets de résidence des plaignants afin qu'ils traitent la seconde "problématique", à savoir une éventuelle faute "commise lors de la prescription par le médecin", et le lien entre les effets indésirables et les fluoroquinolones.
"La décision du parquet revient à jeter un voile pudique sur les dysfonctionnements de la police du médicament pour faire porter le chapeau aux seuls médecins, alors que nous soutenons que l'ANSM ne les a pas suffisamment alertés", a réagi Me Martin Vettes, l'un des deux avocats des plaignants, auprès de l'AFP. "Parquet par parquet, on va demander que les investigations soient élargies et ne se cantonnent pas à la responsabilité des médecins prescripteurs", a-t-il poursuivi.
Les avocats pointent un retard de l'ANSM, qui n'aurait communiqué qu'en 2019, "très tardivement" et surtout "timidement", là où des recommandations de restriction de l'usage de ces antibiotiques ont été émises par les autorités sanitaires américaines dès 2016 et au niveau européen en 2018. La communication de l'ANSM n'a, en outre, eu "aucun impact" immédiat sur la prescription des fluoroquinolones, selon les avocats.
Philippe Coville, président de l'Association fluoroquinolones France, qui affirme représenter "près de 800 victimes des effets indésirables graves des fluoroquinolones dont de nombreuses personnes polyhandicapées à vie et reconnues comme telles par les maisons départementales pour les personnes handicapées (MDPH)", dénonce "un ministère qui ne fait pas son boulot". Il "refuse de nous recevoir et […] considère que tout va bien madame la marquise, on peut continuer d'intoxiquer les Français avec des médicaments extrêmement toxiques".
Selon Philippe Coville, il existe "plusieurs plaintes avec constitution de partie civile sur le sujet", ce qui pourrait permettre d'obtenir l'ouverture d'informations judiciaires confiées à des juges d'instruction. Cinq plaintes de ce type ont été déposées cet été (4 à Paris et 1 à Versailles), a confirmé une source proche du dossier à l'AFP.
[avec AFP]
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