Permis de conduire : une proposition de loi pour soumettre les plus de 75 ans à un examen médical

  En 2018, à l’âge de 28 ans, la vie de Pauline Déroulède, joueuse de tennis, bascule. Elle est fauchée par un nonagénaire alors qu’elle était en scooter, sa jambe gauche doit alors être amputée. “Le conducteur a confondu les pédales de son véhicule, laissant penser qu’il n’était pas en pleine capacité de le conduire”, indique le député Modem, Bruno Millienne, dans l'exposé des motifs de sa proposition de loi. Pour prévenir ce type d’accidents, ce texte impose un examen médical à tout conducteur de plus de 75 ans. “Tout détenteur du permis de conduire de soixante-quinze ans ou plus doit fournir un certificat médical délivré par un médecin agréé auprès de la préfecture du département et attestant de sa capacité totale ou partielle à conduire", indique le texte, qui prévoit de renouveler ce certificat tous les cinq ans.  

Pour rappel, le permis de conduire n’est valable que 10 ans dans la plupart des pays européens. En France, il est valable toute la vie. “Ainsi, à l’exception d’affections médicales incompatibles avec l’obtention ou le maintien du permis de conduire ou pouvant donner lieu à la délivrance de permis de conduire à durée de validité limitée, il n’existe pas de dispositif de contrôle régulier du conducteur”, mentionne l'exposé des motifs, qui souligne que c’est le “devoir de chaque conducteur d’être responsable de sa conduite”.  

Le texte reconnaît aussi qu’il est “parfois complexe de s’autoévaluer, et de renoncer à une habitude de plusieurs dizaines d’années”, notamment pour les plus de 75 ans, qui peuvent constater des “capacités manifestement affaiblies”. “Il est scientifiquement prouvé que les capacités physiologiques et cognitives nécessaires à une bonne conduite peuvent diminuer dès 45 ans”. En cause : “des réflexes moins affutés, une baisse de la vue et de l’audition, des rhumatismes qui peuvent contraindre l’amplitude des mouvements, la prise éventuelle de médicaments ayant un impact sur la vigilance, un problème de coordination” … D’autant que pour les plus de 65 ans, la première cause identifiée d’accident est “ l’inattention et les difficultés pour respecter les priorités”. Alors que pour les autres tranches d’âge, la principale cause reste la vitesse. 

Certains pays européens ont déjà franchi le cap et mis en place une visite médicale : à partir de 75 ans aux Pays-Bas, dès 70 ans en Finlande et dès 60 ans au Portugal. D’autres pays ont un système légèrement différent, comme l’Italie, qui demande un certificat médical tous les 10 ans jusqu’à l’âge de 50 ans, puis tous les 5 ans entre 50 et 70 ans et enfin tous les 3 ans à partir de 70 ans. Pour les dépositaires de cette proposition de loi, il faut un “contrôle régulier de l’aptitude à la conduite automobile pour tous les conducteurs en France”, qui permettra au médecin de déterminer l’une des trois options suivantes :  

-la validation “des pleines capacités du conducteur” 

-le recours à “une interdiction totale de conduire”, comme pour les usagers ayant des “problèmes cardio-vasculaire, de vision…” 

-le recours à  “une interdiction partielle de conduire”, qui serait soit à durée déterminée soit liée à des facteurs comme “l’interdiction d’emprunter le réseau autoroutier par exemple”.  

Même si le député est conscient que sa proposition de loi n’aboutira peut-être pas, il veut au moins “rouvrir le débat sur les aptitudes des seniors à la conduite", confie-t-il à nos confrères de Capital. "Nous ne sommes pas très restrictifs, et rendre obligatoire cette visite médicale n’est pas non plus dramatique, c’est faisable, il s’agit de leur propre protection et celle des autres. Il faut qu’on fasse quelque chose de la manière la plus humaine qui soit, voir jusqu’à quel point la médecine peut aider à définir leur capacité.”