Prédiabète : est-ce vraiment un problème ?

25/10/2021 Par Brigitte Blond
Diabétologie
Le diabète est précédé d’un prédiabète qu’il convient d’identifier pour retarder, voire empêcher que surviennent les complications dont les déterminants sont en place dès le stade de prédiabète. Un point sur ce thème a été fait lors du récent congrès de l’European Association for the Study of Diabetes (EASD, 27 septembre - 1er octobre).

Fonction de l’âge et de l’IMC, le prédiabète concerne 25 % des personnes de 40 à 75 ans ; à 60 ans, 5 % en ont un quand leur IMC est <25, 40 % s’il est au-dessus de 35. Or le risque de décès d’origine vasculaire croît linéairement en fonction de la glycémie, dès 6 mmol/L, et ce indépendamment de l’âge, du sexe, de la pression systolique, du statut tabagique, du mode de vie, etc. 

 

Partie invisible de l’iceberg “diabète“ 

Au stade de prédiabète déjà, débutent les dommages des organes cibles d’une hyperglycémie, rétine, cerveau, peau, rein, etc. Ainsi, le diamètre des artérioles rétiniennes ou de la peau est modifié dans le sens d’une dilatation. Or, une maladie des petits vaisseaux, et notamment cérébraux, augmente le risque de porosité de la barrière hémato-méningée, de microsaignements et ainsi d’AVC, de troubles cognitifs, de dépression. L’hyperglycémie est une toxine pour les cellules endothéliales et les neurones des systèmes autonome et périphérique. La vitesse de conduction nerveuse est compromise dès le stade de prédiabète, ainsi que la fréquence cardiaque. La longueur des fibres nerveuses de la cornée est réduite ; la couche des fibres nerveuses rétiniennes est amincie autour du disque optique et de la macula. Par ailleurs cette neurodégénération rétinienne est associée à une atrophie cérébrale, dans la substance grise et blanche, hippocampe compris, et à une incidence accrue de symptômes dépressifs (à 7 ans). 

S’agissant plus spécifiquement des polyneuropathies, leur prévalence est équivalente au stade de prédiabète (quand coexistent une hyperglycémie modérée à jeun et une intolérance au glucose), et de même niveau que pour un diabète avéré (Etude Maastricht*). Le risque est associé à un test oral perturbé de tolérance au glucose. Or les patients préDT (et leur médecin) sont très peu conscients de ces risques, concernant le pied diabétique notamment. Par ailleurs, les femmes sont plus à risque de neuropathie et de douleurs associées.  
Enfin, la prévalence de la neuropathie autonome cardiaque, associée à un risque (quintuplé) de mortalité cardiovasculaire, est augmentée au stade de prédiabète. Les facteurs de risque pour une neuropathie diabétique sont l’âge et la taille non modifiables, d’une part, le poids, la glycémie post-prandiale, une hypertriglycéridémie et une inflammation chronique de bas grade d’autre part. 

 

Réversible 

La bonne nouvelle est que le DT2 peut être évité à ce stade de prédiabète par les modifications du mode de vie surtout et/ou la metformine, le bénéfice de ces interventions étant mesuré en particulier sur les neuropathies. Pour ce qui est des complications micro-vasculaires, ce sont les femmes qui profitent le plus d’un changement de mode de vie. Quoi qu’il en soit, bilanter les personnes prédiabète à la recherche de neuropathies est nécessaire ; de la même manière, une neuropathie a priori idiopathique doit inciter à rechercher un préDT par un test oral de tolérance au glucose. 

 

L’HbA1c, marqueur de risque cardiovasculaire, dès le stade de prédiabète 

Le risque de décès CV croît avec la glycémie post-prandiale, qui est un meilleur facteur prédicteur que la glycémie à jeun. En cas d’hyperglycémie modérée, 6,1 à 6,9 mmol/L de glycémie à jeun, ou d’intolérance au glucose à son début, le risque de décès cardiovasculaire est augmenté de 20 %. Et l’on sait que les changements de mode de vie affectent dans le bon sens le risque de diabète et de décès cardiovasculaire. Or la glycémie post-prandiale (PP) n’est pas réalisée en routine, et peut varier d’un jour à l’autre… L’HbA1c est à l’évidence un meilleur test diagnostique du prédiabète, conjugant praticité, précision et preuves cliniques. 

La moitié des variations de l’HbA1C des personnes indemnes de diabète s’explique par des facteurs non liés à la glycémie (âge, sexe, etc.). Mais dès le préDT, l’HbA1c évolue majoritairement en fonction des variations de la glycémie à jeun ou PP : les patients prédiabète (d’après leur Hb1Ac) ont effectivement un risque de maladie cardiovasculaire augmenté de 20 %, versus les personnes normoglycémiques.  

Une réduction du risque de maladie cardiovasculaire ou de décès n’est toutefois observée que pour les personnes dont le prédiabète était défini sur la glycémie PP et qui reviennent à une glycémie normale. Par ailleurs, la glycémie à jeun n’améliore pas la prédiction du risque cardiovasculaire chez des personnes non diabétiques. Enfin, le risque augmenté d’évènement cardiovasculaire pour des personnes prédiabétiques est dû essentiellement aux niveaux anormaux des autres facteurs de risque cardiovasculaire conventionnels. 

*Ritter R et al, Cardiovasc Diabetol 2021 ; 20 :102 

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