Recalés de médecine après les oraux, des étudiants obtiennent une première victoire auprès du Conseil d’État 

04/01/2022 Par Marion Jort
PASS/LAS
Treize étudiants en Pass parisiens, recalés de médecine alors qu’ils étaient dans le numerus apertus après les écrits, viennent de remporter une première victoire contre l’Université de Paris, à laquelle ils demandent leur réintégration. Le Conseil d’État a tranché en leur faveur le 21 décembre dernier.  

Leur cas a fait la Une de l’actualité cet été. Pourtant dans le numerus apertus à l’issue des épreuves écrites à la fin de la première année commune aux études de santé en juin dernier, 42 étudiants en Pass (la nouvelle Paces) ont été recalés de médecine après avoir passé deux oraux servant à départager les candidats. La faute, selon eux, à un système de notation obscur imposé par la fac.  

A l’Université de Paris en effet, décision avait été prise lors de la mise en place de la réforme du premier cycle des études de médecine d’instaurer un système de “grands admis” (260 candidats qui ont pu accéder directement à la filière médecine, maïeutique, odontologie, pharmacie, kiné de leurs choix à l’issue du concours écrit). Les autres candidats ont été départagés après avoir effectué deux oraux, une mise en situation et une analyse d’articles. Pour effectuer son classement, le principe de note de rang a été adopté : “C’est une formule de mathématicien, selon laquelle on divise tout par un dénominateur N, qui est le nombre d’inscrits à la filière (...) Ils ont inventé ça, sauf qu'ils n'ont pas respecté les règles qu’ils ont inscrites dans le règlement. Ils étaient censés garder le même N, le fameux dénominateur, entre l’écrit et l’oral, et ils ont changé. Pourtant, tout le monde sait depuis le CP qu’on ne peut pas comparer deux groupes différents. Là, ils ont comparé un groupe de 675 à un groupe de 1800…”, expliquait Antoine, en Pass l’an dernier, à Egora.  

Problème : dans les faits, 42 étudiants qui étaient dans le haut du classement ont été propulsés vers le bas à cause de ce fonctionnement. “J’étais 300ème à l’issue des écrits, j’étais à 40 places du dernier grand admis. Je n’étais donc pas très inquiète. Pourtant, en étant la 40ème meilleure personne à passer l’oral, je me suis retrouvée 450 places derrière. J’avais 11 de moyenne à l’oral. Aux écrits, 16,5”, nous témoignait Juliette en septembre, l’une des concernées.  

Écoeurés, et dans l’impossibilité de redoubler, les étudiants se sont alors regroupés et ont fait appel à deux avocat pour attaquer la décision en justice. En août, premier revers pour 13 d'entre eux. Un juge des référés a en effet estimé que ces jeunes n’étaient pas dans l’urgence d’une solution, s’appuyant sur la réforme du premier cycle des études de santé qui prévoit maintenant deux voies d’accès (Pass et LAS) au lieu d’une Paces unique et qui accorde au total, entre ces deux voies, deux chances pour rejoindre les études de médecine.  

Mais, le 21 décembre, le Conseil d’État a cassé l’ordonnance du juge des référés, considérant que les étudiants étaient effectivement dans l’urgence d’une solution immédiate à l’époque. Un point de satisfaction pour ces jeunes, réunis en collectif. Mais leur joie est modérée, car le verdict comprend une subtilité : "À l'époque où nous avons porté plainte, début août, il y avait urgence. Mais, à l’heure actuelle, comme la rentrée est passée et que l'année est bien entamée, ils ont estimé que ce serait trop difficile pour l'Université de Paris de mettre en place ce qu'il faut pour nous réintégrer”, explique Antoine.  

Aucune solution...

concrète n’a donc émergé de ce verdict. Il faudra attendre celui du tribunal administratif, où une plainte et une médiation avec un médiateur académique sont en cours. Le verdict devrait être connu courant du premier semestre 2022. 

 

 

 

Le comportement de l’Université pointé du doigt  

Les étudiants reprochent par ailleurs à la direction de l’Université son mutisme depuis le début de la procédure. Renvoyant sans cesse vers les ministères de tutelle, elle a préféré laisser Frédérique Vidal trancher. Mauvaise poche : interpellée par un sénateur en octobre dernier, la ministre de l’Enseignement supérieur a botté en touche. “Je pense que personne ici ne souhaiterait que les jurys de concours soient menés par les politiques”, avait-elle notamment déclaré. Lors de la procédure devant le Conseil d’État, l’Université n’a pas non plus souhaité plaider par le biais de son avocat, selon les étudiants concernés.  

Ce qui a surtout provoqué leur colère, c’est de découvrir qu’en toute discrétion, le règlement du concours pour la promotion actuelle (2021-2022) a été changé. “Ce sur quoi on les attaque a été modifié pour la nouvelle promo”, appuie Antoine. Le principe de note de rang, d’abord, a été supprimé. Cette année, moins de candidats pourront accéder à l’oral. "Ça évite que des gens à la 1000ème place soient en concurrence avec des personnes dans les 200 comme ça a été le cas pour moi. C'est logique que ce soit adressé à des personnes qui ont déjà réussi les écrits.”  

Enfin, au niveau de l’oral, deux sujets sont désormais proposés aux candidats, alors que la promotion 2021 n’avait pas le choix. Les Pass 2022 auront également dix minutes de préparation avant chaque oral, ce qui n’était pas possible l’an dernier. “Pour nous, même s’ils ne le disent pas, c’est un aveu d’échec clair. C’est la preuve que l’injustice contre laquelle on se bat est bien réelle”, conclut Antoine. 

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