Salariat, déconventionnement, reconversion : 80% des généralistes franciliens envisagent de changer leur pratique

13/02/2023 Par L. C.

Un sondage de l’URPS Ile-de-France montre que 8 généralistes sur 10 seraient prêts à modifier leur activité si les propositions de loi d’accès direct ou coercitives étaient votées et si les propositions de la Cnam dans le cadre des négociations conventionnelles devenaient une réalité.   Alors que les médecins libéraux sont appelés à battre le pavé demain pour défendre leur profession, l’URPS Ile-de-France publie les résultats d’un sondage sur leurs perspectives. Réalisée du 7 au 10 décembre auprès de 1593 praticiens* de la région, cette enquête s’inscrit dans un contexte de tensions exacerbées : PPL Rist en passe d’être débattue au Sénat, négociations conventionnelles au point mort... Les médecins sondés étaient invités à réfléchir à ce qu’ils décideraient de faire dans l’hypothèse où les propositions de loi jugées "méprisantes" par la profession et les propositions de l’Assurance maladie dans le cadre des négos devenaient une réalité.

Les résultats sont sans appel, et représentatifs de la colère de tout un secteur. Parmi les 1593 répondants, une écrasante majorité (73%) modifiera son exercice, ce qui aura des conséquences lourdes pour l’accès aux soins : 358 se disent prêts à se déconventionner et à poursuivre leur activité médicale, 168 praticiens envisagent de prendre leur retraite – en particulier ceux de plus de 60 ans, 114 de partir exercer à l’étranger et, enfin, 104 médecins pensent à se reconvertir dans un autre domaine que la médecine. 188 envisagent de développer une activité médicale hors champ conventionnel. Pour 359 médecins franciliens, l’adoption de propositions de loi coercitives et la signature éventuelle de la convention médicale ne changera pas leur exercice libéral, qu’ils ne modifieront pas. Seuls 36 répondants envisagent d’adhérer au contrat d’engagement territorial (CET) – qui a provoqué le départ des syndicats médicaux des groupes de travail techniques avec la Cnam, et à s’inscrire "dans l’esprit de la loi". D’après le sondage, les plus jeunes apparaissent les plus déterminés à bouleverser leur activité, qu’il s’agisse d’un déconventionnement, d’un virage vers le salariat ou d’une reconversion par exemple.

Source : URPS Ile-de-France

  Chez les médecins généralistes de la région, l’hypothèse d’une modification de l’activité est plus forte. Quatre généralistes sur 5 changeraient leur pratique si les propositions de loi jugées "délétères" passaient et si la future convention imaginée par la Cnam – notamment une hausse d’1,5 euro du tarif de la consult’ - devenait une réalité. Ils sont 270 à songer à se déconventionner, 138 à considérer un poste salarié, 108 à envisager de prendre leur retraite, et 87 à penser partir exercer à l’étranger. Seuls 29 se disent prêts à adhérer au CET.

Source : URPS Ile-de-France

Si la PPL Rist sur l’accès direct ou encore les propositions de loi du socialiste mayennais Guillaume Garot de régulation à l’installation, entre autres, sont votées, "il faudra se préparer à une diminution de la qualité de notre système de santé et une augmentation des risques dans un système de soins en France déjà mis à mal par une longue chaîne de réformes. Les médecins franciliens rejettent ces lois qui contribuent à dégrader la pratique médicale, quitte à opter pour le déconventionnement", alerte l’URPS Ile-de-France, dans un communiqué.

L’Union prône plusieurs "solutions concrètes" afin de "sauver la médecine libérale". En premier lieu, l’URPS appelle à "rendre le modèle d’exercice attractif et simple" afin de susciter des installations de jeunes. "La valorisation de l’exercice doit tenir compte des coûts réels de pratique", écrit-elle, estimant que l’harmonisation des tarifs de consultations et d’actes sur la moyenne européenne permettrait de redonner "la possibilité aux médecins d’avoir un exercice médical innovant et soutenu par un secrétariat". L’emploi d’"assistants administratifs en toute autonomie sans subventions éphémères et complexes" doit être encouragé. Objectif : gagner du temps médical. Les "complexités administratives et certificats inutiles" doivent être supprimés, souligne l’URPS. Le ministre de la Santé, François Braun, a justement annoncé la semaine dernière 15 mesures afin de réduire les tâches administratives des médecins. Une chasse aux lapins doit également être lancée, estime l’Union, qui a enquêté sur ce fléau l’été dernier. Alors que nombre de praticiens, éreintés, envisagent de prendre leur retraite, l’URPS prône une incitation fiscale pour les médecins de plus de 65 ans afin qu’ils poursuivent leur carrière. Enfin, face au manque de praticiens disponibles, il apparaît indispensable "d’anticiper le nombre de médecins à former chaque semestre adapté aux besoins des territoires et du zonage en encourageant la formation des internes par des stages en médecine libérale".   *La moyenne d’âge des répondants est de 48 ans, soit plus jeune que la population interrogée (57 ans).

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