L’insuffisance cardiaque : mal connue et mal reconnue

21/09/2022 Par Brigitte Blond
Cardio-vasculaire HTA
L’Assurance maladie lance une vaste campagne pour lutter contre le déficit de prise en charge de cette pathologie largement sous-estimée

  L’insuffisance cardiaque (IC) est mal connue de la population générale, peu visible jusqu’à un stade avancé, et insuffisamment bien prise en charge. C’est de ce constat qu’est née la campagne promue par l’Assurance maladie (AM) qui pour ce premier round débute le 25 septembre pour 5 semaines : "insuffisance cardiaque : et si votre cœur essayait de vous dire quelque chose ? L’objectif est ici de sensibiliser les usagers et les médecins, et en parallèle accompagner la mise en place d’un parcours de soins dédié, du diagnostic à la prise en charge coordonnée, sur un territoire donné", annonce le directeur général de l’AM, Thomas Fâtome. L’enjeu justifie cette mobilisation… 1,5 million de personnes en France souffrent d’IC, une prévalence nettement croissante au-delà de 60 ans (10% des personnes de plus de 70 ans), qui pourrait progresser de 25% tous les quatre ans à la faveur notamment du vieillissement de la population. 400 à 700 000 patients IC ne sont pas identifiés. Or il s’agit de la première cause d’hospitalisation après 65 ans, en tout 200 000, par an. L’IC provoque par ailleurs 70 000 décès chaque année. Signes d’alerte Les points de rupture du parcours de soins commencent par la méconnaissance des signes d’alerte. Ainsi, 19% seulement des plus de 60 ans citent spontanément l’un des quatre signes d’alerte de l’IC : l’essoufflement, la prise de poids rapide, les œdèmes ou la fatigue intense (EPOF). Si, lorsqu’on les guide, ils identifient bien l’essoufflement et la fatigue, ils le font beaucoup moins bien pour les œdèmes et surtout la prise de poids rapide. Par ailleurs, les plus de 60 ans évoquent toujours assez peu l'apparition de ces signes, en consultation. Et de façon symétrique, les médecins aussi : ils ne sont que 36% à s’en inquiéter lors de l’interrogatoire. "L’IC peut donc longtemps passée inaperçue et sa mortalité n’est pourtant pas négligeable, insiste le Pr Christophe Leclercq, président de la Société Française de Cardiologie (CHU Pontchaillou de Rennes), les pathologies cardiovasculaires sont la 2e cause de mortalité en France, la 1re pour les femmes". Si l’on meurt moins d’infarctus du myocarde, les survivants présentent à son décours une IC qui compromet le pronostic. Fausses croyances "Le repérage de l’IC est ralenti au sein du grand public par de nombreuses idées reçues, constate-t-il, beaucoup croient encore que la maladie est peu fréquente, peu grave (le serait moins que certains cancers), qu’on ne peut pas reconnaître les signes d’une IC, que les médecins ne savent pas l’identifier, que l’on n’y peut rien… » L’IC est à l’évidence une pathologie grave, complexe, pour laquelle il existe des traitements efficaces et des pistes d’amélioration. Reste que ces patients -plus de 12 000 nouveaux cas par an- doivent pouvoir entrer dans un parcours de soins coordonnés. La démographie médicale, cardiologique en particulier, s’y prête mal (185 cardiologues formés versus 220 qui partent à la retraite chaque année), et les disparités régionales accentuent les difficultés de prise en charge… Les solutions pour y pallier ? Une collaboration forte ville/hôpital, des efforts pour la prévention, la réadaptation cardiovasculaire, le développement de nouveaux métiers (infirmières de pratique avancée), le télésuivi, etc., autant de pistes régulièrement avancées. Rôle majeur du médecin traitant Au médecin généraliste d’abord de poser le diagnostic sur des symptômes peu spécifiques, très prévalents, sur des signaux même faibles, qui touchent des patients déjà complexes. L’optimisation du traitement doit être permanente et la mobilisation du spécialiste possiblement rapide, la délégation de tâches facilitée. "Les solutions numériques peuvent être un atout qui permettent d’évaluer le degré d’urgence ou de moduler le traitement, mais on doit veiller à la fracture numérique qui intéresse davantage les populations les plus âgées et les plus précaires", met en garde le Dr Julie Chastang (Collège de la Médecine Générale). L’Assurance maladie, en parallèle de la campagne (pluriannuelle) destinée au grand public de sensibilisation aux signes d’alerte, met à disposition des établissements de soins plusieurs dispositifs. Le premier, Prado (qui a fait ses preuves au retour de maternité), permettra de les accompagner pour structurer une organisation de soins pour les patients IC à leur sortie de l’hôpital. L’AM fournira également aux établissements, à partir du premier trimestre 2023, des outils de diagnostic territorial pour mettre en lumière les points de faiblesse de ce parcours dans la zone qui les concerne. Par ailleurs, pour optimiser l’accès et l’efficience des soins, l’AM participera à la structuration de filières spécialisées en ville en créant des équipes de soins spécialisées en cardiologie, s’appuyant en partie sur la délégation de tâches, la téléexpertise et la télésurveillance (avec au minimum une balance connectée et des auto-questionnaires de suivi des symptômes). Des leviers financiers complètent ce dispositif (dont l’indicateur Rosp des médecins traitants sur le risque cardiovasculaire).  

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