Bras de fer avec les intérimaires : les médecins libéraux pourraient être réquisitionnés
Alors que le syndicat des médecins intérimaires prédit un mois d'avril "dramatique" dans les hôpitaux, du côté du ministère de la Santé, on se prépare à voir "apparaître transitoirement" des "difficultés". La mise en application de la loi Rist d'avril 2021, qui permet de bloquer les rémunérations supérieures au plafond légal et de mettre un terme aux "dérives" du "mercenariat", à compter du 3 avril, pourrait entrainer un retrait, potentiellement massif, des médecins intérimaires qui comblent quotidiennement les 30% de postes de praticiens hospitaliers vacants, en particulier aux urgences, dans les maternités et dans les blocs opératoires. Mais pour le ministère, "le contrôle des dépenses de l'intérim médical" constitue "une étape essentielle pour remettre l'éthique et la solidarité au cœur du système de santé, écrit-il dans une "fiche", datée du 15 mars, dont Egora a eu copie.
Le document liste les "principaux outils de mobilisation RH pour accompagner l'encadrement des dépenses d'intérim médical et des contrats de gré à gré". En premier lieu, les mesures de droit commun : mises à disposition de personnels d'un établissement à un autre, voire du privé au public, réorganisation des circuits de patients sur le territoire, aménagement du fonctionnement des services (ouverture/fermeture), recours aux heures supplémentaires et au temps additionnel pour les professionnels volontaires ou encore mobilisation des personnels retraités de moins de 6 mois…
De 80 à 105 euros de l'heure pour les médecins libéraux recrutés en renfort
Certaines mesures "dérogatoires" qui avaient été décidées l'été dernier pour pallier la crise des urgences vont été prolongées. Le ministère annonce ainsi que des textes seront prochainement publiés afin de maintenir au-delà du 31 mars la majoration de 50% des indemnités de garde pour les médecins hospitaliers et les internes.
Jusqu'au 30 avril, des "dispositifs exceptionnels de recrutement et de rémunération de professionnels libéraux par les établissements de santé" sont également mis en place. Les médecins libéraux installés en cabinet qui accepteraient...
de prêter main forte aux équipes hospitalières seront rémunérés 80 euros de l'heure en journée et en semaine, et 105 euros de l'heure la nuit, le samedi après-midi, le dimanche et les jours fériés.
Les internes pourront remplacer à l'hôpital
Jusqu'à la fin du mois également, les docteurs juniors pourront réaliser du temps additionnel. Par ailleurs, la possibilité pour les internes de remplacer des praticiens absents au sein des établissements de santé "est désormais pérennisée", informe le ministère, qui rappelle toutefois que "l'étudiant ne peut réaliser de remplacement dans l'entité au sein de laquelle il est accueilli en stage".
Ces dispositions pouvant s'avérer insuffisantes, le recours à des "mesures coercitives de réquisition" n'est pas exclu. Le ministère rappelle que cette "mesure de police" doit répondre aux conditions de nécessité et de proportionnalité. "L’exigence de nécessité signifie qu’il ne doit pas exister d’autres solutions disponibles et plus efficaces. L’exigence de proportionnalité implique, quant à elle, que la mesure ne doit pas être trop générale", développe-t-il.
Réquisitionner "en priorité" les médecins intérimaires… "mais aussi" les libéraux
Les ARS devront "prioriser / cibler les professionnels pouvant faire l’objet de réquisitions au bénéfice des établissements les plus 'critiques', et ce pour éviter les populations sensibles ou qui seront déjà fortement sollicitées pour assurer la continuité des soins avec la mise en place de l’encadrement des dépenses de l’intérim médical". Il s'agira de réquisitionner "en priorité" les médecins intérimaires et vacataires. "Mais aussi potentiellement les professionnels libéraux et les professionnels des établissements identifiés comme « moins critiques » dans les schémas de continuité", ajoute le ministère.
Le recours à la réquisition peut se fonder sur deux bases légales : le 4° de l’article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales en cas d’"atteinte constatée ou prévisible au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publiques" (le préfet est à la manette) et l’article L. 3131-8 du code de la santé publique (CSP) lorsque "la situation sanitaire le justifie" (réquisition du préfet, sur demande du directeur général de l'ARS). Et la fiche ministérielle de préciser que les indemnités dues aux professionnels réquisitionnés "compensent uniquement la perte matérielle, directe et certaine que la réquisition impose". "Aucune indemnité n'est due pour la privation du profit qu'aurait pu procurer au prestataire la libre disposition de la continuation en toute liberté de son activité professionnelle."
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