Le médecin envisage de démissionner

"Un jour j'arrêterai" : le médecin-écrivain Baptiste Beaulieu raconte avoir été agressé par un patient

Le médecin et écrivain Baptiste Beaulieu a annoncé dans une publication Instagram avoir été agressé et menacé de mort par un patient dans son cabinet toulousain, ce mardi 12 novembre. Il a déposé plainte.

13/11/2024 Par Louise Claereboudt
Violence
Le médecin envisage de démissionner

[Article mis à jour le 15/11/24 avec le dépôt de la plainte]

Plus de 50 000 likes en à peine 24 heures. Ce n'est pas pour faire la promotion de son nouveau livre (Tous les silences ne font pas le même bruit) ou défendre les minorités opprimées que le Dr Baptiste Beaulieu a pris son téléphone ce mardi 12 novembre et écrit ce post Instagram. Non, cette fois, c'est pour faire part de sa désillusion en tant que médecin généraliste. Ce matin-là, il a en effet été agressé par un patient dans son cabinet de Toulouse. Un patient qu'"[il aimait] bien", souligne-t-il. Un patient "pas chiant". 

Alors que sa salle d'attente était "comble" ce lendemain de jour férié, "un patient veut passer devant tout le monde sans motif médical valable", relate le médecin, qui refuse d'accéder à la requête de ce dernier – "il y a des bébés qui attendent". Le patient lui "parle mal", Baptiste Beaulieu "pose [ses] limites", mais l'homme "dégoupille". "Il a levé la main sur moi", écrit le généraliste suivi par plus de 400 000 personnes sur Instagram. "Je répète pour bien que les gens qui me lisent se rendent compte de ce qui se passe dans les cabinets médicaux : il a levé la main sur moi.

Le ton grave, le médecin médiatique poursuit son récit : "Il s'est arrêté au dernier moment, ensuite il m'a traité de sale P*, et agoni d'insultes en tous genres, avant de me menacer de venir 'un moment où il n'y aurait plus de patients en salle d'attente pour s'expliquer entre hommes'." Et indique qu'il a pris rendez-vous au commissariat pour porter plainte contre son agresseur, "un gars blanc et qui s'appelle Bernard", précise-t-il, anticipant l'instrumentalisation de son récit.

Ça devient de plus en plus dur de croire en ce métier

Dans une longue énumération, Baptiste Beaulieu se "désole". "Ce qui me désole, c'est d'entendre des confrères et consœurs me relater des faits similaires" ; "c'est que l'injustice sociale génère chez les plus fragiles du système une violence sociale" ; "que cette violence sociale s'exprime de cette manière (peut-être je ne sais pas, j'essaie de comprendre, pas d'excuser)" ; "qu'on vive dans une société où communiquer est devenu si difficile".

Et d'ajouter, en s'adressant directement au patient violent : "Ce qui me désole, c'est d'avoir demandé aux autres patients si j'avais été désagréable ou irrespectueux avec toi (comme si ça pouvait être ma faute si un patient en vient à me menacer de mort). Ce qui me désole c'est d'avoir entendu les patients me dire que non, je n'avais pas été irrespectueux, ce qui rend ta violence encore plus absurde (encore une fois je t'aimais bien)."

Le jeune papa regrette aussi que des enfants aient assisté à cette scène de violence.

"Ce qui me désole, c'est d'avoir mal soigné les gens ce matin car tu m'as volé un peu de ma bande passante avec ta violence", charge-t-il encore. "Ça devient de plus en plus dur de croire en ce métier et d'y trouver du sens, confie Baptiste Beaulieu, pourtant très engagé, entre deux traits d'humour. A la base, j'exerce ce métier car j'aime les gens. Je les aime de moins en moins et un jour j'arrêterai car mieux vaut arrêter que de continuer en haïssant le monde entier."

Ce n'est pas "la première fois" que le jeune généraliste toulousain subit une agression : "Parfois je me demande pourquoi je continue à me faire du mal en essayant de soigner des enragés."

 

 

"Le sentiment d'avoir été trahi"

Dans un nouveau post Instagram publié ce jeudi 14 novembre, le médecin-écrivain indique avoir officiellement porté plainte contre son agresseur, à regret : "D'abord ça prend un temps fou, puis j'ai l'impression de mettre ce pauvre type dans la merde", a-t-il confié à ses followers.

"Ce patient, je le soigne depuis des années. Pendant des années, il m'a demandé poliment comment allait mon mari, et depuis que je suis père comment allait mon enfant [...] Ca n'a pas eu l'air de lui poser problème d'avoir un médecin de famille homo jusqu'au jour où je lui dis non, et qu'il révèle son vrai visage ou tout le moins ce qu'il en pense vraiment", écrit-il.

Et de poursuivre : "Plus difficile à pardonner, car à la violence subie, il faut ajouter le sentiment d'avoir été trahi."

Comptez vous fermer vos cabinets entre le 5 et le 15 janvier?

Claire FAUCHERY

Claire FAUCHERY

Oui

Oui et il nous faut un mouvement fort, restons unis pour l'avenir de la profession, le devenir des plus jeunes qui ne s'installero... Lire plus

3 débatteurs en ligne3 en ligne
Photo de profil de Georges FICHET
6,3 k points
Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 1 an
Notre jeune confrère semble avoir des remords à porter plainte contre son agresseur alors que nous savons très bien que ces plaintes n'aboutiront le plus souvent à pas grand chose ! Si un jour l'un de mes patients m'agresse, je considérerait qu'il m'a trahi et n'aurai aucun scrupule à me débarrasser de lui à tous les sens du terme. Autrefois, on étouffait les enragés entre deux oreillers ! Mais en raison du rapport que j'ai établi avec ma patientèle, ça m'étonnerait grandement qu'un de mes patients m'agresse un jour pour les quelques mois ou années qu'il me reste à travailler. En effet, le fait de n'avoir jamais accepté le principe du tiers payant a progressivement sélectionné la patientèle. Mes patients m'ont choisi en connaissance de cause, et savent que ma façon de pratiquer la médecine leur convient. Incivilités ? Connait pas ! Il ya cinquante ans, il n'y avait pas autant de problèmes d'incivilité vis à vis des confrères et comme je travaille toujours comme on le faisait il y a cinquante ans... CQFD
Photo de profil de CHAMBON dominique
4,2 k points
Débatteur Passionné
Médecine générale
il y a 1 an
« A la base, j'exerce ce métier car j'aime les gens. Je les aime de moins en moins et un jour j'arrêterai car mieux vaut arrêter que de continuer en haïssant le monde entier." Messieurs (et dames) là-haut qui nous pondez tous les jours des idées plus stupides et plus tordues les unes que les autres pour résoudre les problèmes que vous avez consciencieusement générés! C‘est à vous et vos prédécesseurs que notre confrère s’adresse. Voilà tout le résultat de votre désastreux travail !
Photo de profil de HENRI BASPEYRE
14,8 k points
Résistant
Chirurgie générale
il y a 1 an
plainte classé sans suite? elle dégrade à elle seule les statistiques truquées présentée par le ministre! parfaitement
 
Vignette
Vignette

La sélection de la rédaction

Pédiatrie
Moins de médecins, moins de moyens, mais toujours plus de besoins : le cri d'alerte des professionnels de la...
06/11/2025
14
Concours pluripro
CPTS
Les CPTS renommées "communauté France santé" : Stéphanie Rist explique l'enjeu
07/11/2025
12
Podcast Histoire
"Elle était disposée à marcher sur le corps de ceux qui auraient voulu lui barrer la route" : le combat de la...
20/10/2025
0
Portrait Portrait
"La médecine, ça a été mon étoile du berger" : violentée par son père, la Pre Céline Gréco se bat pour les...
03/10/2025
6
Reportage Hôpital
"A l'hôpital, on n'a plus de lieux fédérateurs" : à Paris, une soirée pour renouer avec l'esprit de la salle...
14/10/2025
8
La Revue du Praticien
Diabétologie
HbA1c : attention aux pièges !
06/12/2024
2