
Régularisation des Padhue : déçus, les syndicats appellent à aller plus loin
Les organisations représentatives des praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue) ont réagi après la publication, jeudi 29 mai, de deux décrets modifiant la procédure de régularisation. "Insatisfaits", ils déplorent des textes qui ne sont que des "ébauche[s]" et appellent à aller plus loin.

"Cette réforme est un acte de confiance dans les équipes médicales et dans le travail rigoureux d'évaluation clinique." C'est par ces mots que le ministre chargé de la Santé, Yannick Neuder, s'est félicité, jeudi 29 mai sur ses réseaux sociaux, de la publication au Journal officiel de deux décrets modifiant la procédure de régularisation des praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue).
Parmi les principales avancées, l'ouverture d'une nouvelle voie d'accès "interne" aux Epreuves de vérifications des connaissances (EVC). Cette voie vient reconnaître "le parcours des professionnels qui exercent déjà sur notre territoire ou y ont travaillé au moins deux ans récemment", a précisé le ministre de la Santé. Les médecins éligibles à cette voie n'auront désormais plus qu'à passer une seule épreuve qui portera sur une vérification des connaissances fondamentales – contre deux épreuves auparavant, dont une pratique.
De plus, il sera désormais possible de moduler le parcours de consolidation des compétences (PCC) – qui dure deux ans dans un terrain de stage attribué - pour accélérer l'autorisation d'exercice pour les praticiens reconnus compétents sur le terrain. Les décrets publiés apportent également quelques aménagements dans la procédure d'autorisation d'exercice provisoire et pour le dispositif dérogatoire dont bénéficient certains territoires d'Outre-mer.
Mais ces textes, attendus de longue date, ne vont pas assez loin pour les représentants de Padhue. "Si nous saluons certaines avancées", en particulier la création d'une voie interne au concours des EVC, "nous restons insatisfaits", avance ainsi la Fédération des praticiens de santé (FPS) dans un communiqué, diffusé dimanche 1er juin.
L'organisation syndicale, qui représente les Padhue, pointe plusieurs éléments, dont le fait que la nouvelle voie d'accès aux ECV reste organisée sous la forme d'un concours "classique". "La demande de la FPS d'organiser ces épreuves sous forme d'un véritable examen, plus représentatif d'une évaluation adaptée des compétences a été rejetée", dénonce le syndicat qui estime, en outre, que la création d'une voie interne "ne constitue pas une avancée révolutionnaire".
Une nouvelle voie qui "ne régularise rien"
"Pour que cette voie interne du concours ait un réel impact pour les candidats exerçant depuis plus de deux ans en France, il serait essentiel d’ouvrir au moins 5 000 postes au concours interne en 2025, en incluant toutes les spécialités médicales et chirurgicales", poursuit notamment le syndicat.
L'association Ipadecc* estime, de son côté, que le décret créant cette voie interne "ne régularise rien". "Il remplace un système opaque par un concours théorique verrouillé, déconnecté de notre exercice quotidien et vidé de tout lien avec la réalité du terrain", écrit l'association. "Le décret crée une prétendue 'voie interne', réservée aux praticiens en poste, mais fondée uniquement sur une épreuve théorique en QCM, identique à celle du concours classique", insiste-t-elle. Tandis que l'épreuve "pratique", "déjà contestable dans sa forme antérieure (un cas clinique sur dossier), est purement et simplement supprimée", abonde l'Ipadecc.
De plus, "le jury conserve le pouvoir de fixer la barre d’admission après l’épreuve, et peut modifier à sa guise le nombre de lauréats, indépendamment du nombre de postes ouverts", déplore l'association, pour qui ce mode de sélection reproduit "les dérives" déjà dénoncées ces derniers mois.
Pour la FPS toutefois, les adaptations apportées au PCC, ainsi que l'extension à toute la France du dispositif dérogatoire accordé aux Padhue exerçant en Outre-mer et justifiant d'au moins cinq ans d'exercice pour se présenter directement devant la commission d'autorisation d'exercice, sont de véritables avancées.
La fédération "se félicite" aussi de l'implication des coordinateurs universitaires dans le suivi du PPC pour les lauréats du concours des ECV. "Nous veillons à ce que l’inscription universitaire, désormais obligatoire, soit financée par les hôpitaux […] Il est également essentiel que cette voie universitaire soit suffisamment ciblée pour répondre aux exigences des commissions d’autorisation et qu’elle soit accompagnée d’un temps de formation adéquat", précise cependant le syndicat.
La Dre Kahina Hireche Ziani, parole-parole de l'association SOS Padhue, pointe, elle, des "décrets [qui] ne sont qu'une ébauche". Il faut les travailler davantage car ils contiennent encore beaucoup de vides juridiques", a précisé la praticienne, sur le réseau social LinkedIn. "Quid des lauréats EVC et Stock [dispositif dérogatoire] déjà en cours de PCC. Ils doivent aussi pouvoir bénéficier de cette dérogation."
Dénonçant fermement ces nouveaux textes, l'Ipadecc refuse, de son côté, d'appeler "cette réforme une régularisation". "Elle ne reconnaît rien, ne répare rien, et n'a qu'un effet : institutionnaliser l'exclusion de ceux qui sont déjà là, compétents, engagés, et indispensables", lance l'association.
*Intégration praticiens à diplôme étranger engagés contre la crise.
La sélection de la rédaction
Le concours visant à régulariser les Padhue est-il trop sélectif?
Anne-Astrid Brasseur
Non
Combien de jeunes motivés dont le rêve est d’être médecin sont dégagés à la fin de la 1ere année pour quelques centiemes de points... Lire plus