supprimer l'obligation de DPC

Un rapport propose de supprimer l'obligation de DPC pour les médecins

Dans un rapport rendu public ce mercredi 12 mars, l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) étrille l'Agence nationale du développement professionnel continu (ANDPC) qui "n'a pas su accompagner la généralisation" de cette obligation qui incombe à environ 2 millions de soignants. Elle recommande de supprimer l'obligation de DPC pour les professions de santé à ordre, concernées par la certification périodique, qui se met en place dans la douleur. Et va jusqu'à remettre en cause l'existence même de l'ANDPC.

14/03/2025 Par Louise Claereboudt
DPC Certification
supprimer l'obligation de DPC

Depuis la mise en œuvre, en janvier 2023, de la certification périodique pour les sept professions de santé à ordre (chirurgiens-dentistes, infirmiers, masseurs-kinés, médecins, pédicures-podologues pharmaciens, sages-femmes)*, l'avenir de l'obligation de développement professionnel continu (DPC) semble compromis. Jugeant les deux dispositifs à la fois redondants et en partie contradictoires, la Cour des comptes a proposé fin septembre de les fusionner. Missionnée par le ministère de la Santé en novembre 2023, l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) semble, elle aussi, avoir un avis tranché sur la question.

Dans un rapport remis ce mercredi, les inspecteurs Erik Rance et Marc Penaud jugent nécessaire de "reconsidérer" la place du DPC du fait de l'instauration de la certification périodique, qui "recouvre le champ du DPC" tout en "embrassant une palette beaucoup plus large". Si cette nouvelle obligation de certification, dont le non-respect sera sanctionné par les ordres, est perçue comme "très complète", elle a été mise en œuvre "sans être prête", "laissant des points majeurs en suspens", déplore l'Igas. Les référentiels des actions qui permettront de valider cette obligation ne sont pas "harmonisés", des textes réglementaires manquent encore à l'appel, le pilotage par l'Etat est "insuffisant", "faute de moyens", etc. Elle "nécessite des évolutions substantielles".

Afin de "garantir la solidité et la lisibilité du dispositif d'ensemble", les auteurs du rapport suggèrent de supprimer l'obligation de DPC pour les professions à ordre en 2025, celles-ci ne comprenant pas "pourquoi maintenir deux obligations poursuivant des finalités similaires". Suppression qui suppose des dispositions de nature législative. Les auteurs appellent toutefois à la vigilance "sur le risque de dégradation de la qualité globale du dispositif français de maintien et d’amélioration des compétences et des pratiques si le dispositif de certification périodique ne montait pas progressivement en puissance quant à ses exigences minimales en termes de contenu et de qualité scientifique des actions proposées"

Pour les autres professions de santé non soumises à l'obligation de certification périodique, il convient de conserver le DPC, mais il apparaît indispensable d'en adapter le contenu. "L'actuel champ des actions de DPC proposées à ces professions est trop étroit pour leur permettre de satisfaire à leur obligation ce qui fait peser sur elles un risque médico-légal sans, pour autant, leur donner les moyens de satisfaire à l’obligation", constate l'Igas. Les auteurs préconisent aussi d'étudier, pour les professions n'ayant pas d'offre d'actions d'évaluation des pratiques professionnelles (EPP), "les moyens de développer cette offre", et, "de façon transitoire", de limiter la DPC à la formation continue. 

Pour "rendre les différents dispositifs plus cohérents et préfigurer une éventuelle extension à venir de la certification périodique à ces professions" de santé sans ordre, la mission Igas propose également d'aligner les durées des cycles de certification périodique, de DPC et d'accréditation des spécialités à risques sur "une durée de six ans".  

L'ANDPC sur le point de disparaître ? 

La mission préconise, en outre, d'harmoniser les outils de régulation de la certification périodique et du DPC en ne conservant, pour les deux dispositifs, "qu'un nombre restreint d'orientations de santé publique". Et demande que les conseils nationaux professionnels (CNP), qui élaborent les référentiels d'actions dans le cadre de la certification périodique, fassent de même pour le DPC. Ces actions devront faire l'objet d'une pondération par point. La mission invite par ailleurs les différents financeurs de la certification et du DPC à bâtir ensemble un "label commun d'agrément des organismes" dispensant des actions dans le cadre de ces deux dispositifs. 

Dans l'objectif de "mettre en place un pilotage intégré de la certification périodique et du DPC", Erik Rance et Marc Penaud considèrent enfin que l'Agence nationale du DPC "ne peut être maintenue en l'état". Celle-ci a vu le jour en 2012 sous le nom d'Organisme gestionnaire du développement professionnel continu (OGDPC) et a été transformée en ANDPC en 2016. Elle est chargée de la définition du DPC, de la fixation de ses orientations et du suivi de l'obligation pour tous les professionnels de santé (environ 2 millions de personnes). Elle a également pour mission spécifique de financer "seulement" les libéraux et salariés des centres de santé (soit 453 800 personnes).

L'Igas esquisse trois scenarii d'organisation possible : transformer l'ANDPC en établissement public ; transférer ses moyens et ses compétences à un service à compétence nationale rattaché au ministre de la Santé ; ou transférer le pilotage scientifique et la gestion opérationnelle du DPC et de la certification à la Haute Autorité de santé (HAS). Ce troisième scénario est plébiscité par la mission. Il lui semble "le plus adapté", "dans l'objectif d'une cohérence entre les missions déjà exercées par la HAS en matière d'évaluation, de certification des établissements de santé et d'accréditation des professions à risque, et les objectifs du DPC et de la certification périodique"

Cette suppression permettra également de contribuer à l'atteinte de l'objectif des pouvoirs publics de rationalisation du nombre des opérateurs de l'Etat, avance la mission.

La mission estime indispensable d'arbitrer un nouveau schéma d'organisation avant la fin du premier trimestre 2025. Elle conseille également de reporter le début de l’obligation de la certification périodique "à une date" qui devra être déterminée après concertation "entre le ministère de la Santé, la HAS, les CNP et les Ordres"

 

Résultat du DPC : "très en deçà des attentes"  

Un autre rapport de l'Igas dresse le constat d'un déploiement du DPC "très en deçà des ambitions affichées", en raison "de l'absence de leviers" pour "inciter les professionnels à suivre des actions et pour les accompagner, notamment financièrement, dans cette démarche". La mission d'Erik Rance et Marc Penaud observe également que l'ANDPC "n'a pas su accompagner la généralisation du DPC". Seuls un peu plus de 100 000 professionnels éligibles au financement de l'ANDPC (libéraux et salariés des centres de santé) ont validé leur obligation triennale 2020-2022, soit à peine 22% d'une population "qui elle-même ne représente qu’un quart environ du total des professionnels de santé", note l'Igas.

"Ce très faible niveau d’atteinte de la cible s’explique par un cumul de contraintes imposées par l'ANDPC : amenée à gérer l’enveloppe fermée versée par l’Assurance maladie, elle doit en réguler la consommation d’une part en contingentant la demande par des orientations prioritaires éloignées des préoccupations de professionnels et cloisonnées, d’autre part en agissant sur l’offre de formation par une procédure lourde d’enregistrement des organismes et de validation a priori des actions", expliquent les auteurs. Ce qui a eu pour "effets pervers" de susciter un "faible intérêt des professionnels" et de décourager des organismes, à l'exception "[des] plus lucratifs et [des] mieux armés pour gérer les barrières à l’entrée".

L'agence dispose pourtant de "moyens non négligeables" qui "auraient pu être mieux mis au service d'améliorations qu’elle a tenté de porter", déplore la mission. "Confrontée à la faiblesse des résultats obtenus, dont l’impact sur les pratiques n’est toujours pas mesuré après huit ans, cette situation la place dans une situation de perte de crédibilité durable", soulignent encore les auteurs, qui ont pu prendre le pouls du "climat de défiance durable" entre l'ANDPC et "de nombreux acteurs".

 

*Ils représentant néanmoins plus de la moitié des professionnels de santé (1,125 million de personnes). 

Médecins, serez-vous prêts à aller exercer jusqu'à 2 jours par mois dans un désert ?

Foulquier Marie-Josée

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Si j'en ai la possibilité physique et organisationnelle, je ne suis pas opposée à aller aider des collègues ou des patients dans u... Lire plus

5 débatteurs en ligne5 en ligne
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Médecins (CNOM)
il y a 1 mois
J'ai connu un collègue qui faisait le tour de France pour vendre des formations sans réel crédit sur la qualité. Interrogé sur ce sujet les responsables sont restés de marbre et au lieu de m'écouter m
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408 points
Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 1 mois
Il faut naturellement dissoudre le DCP, inefficace et source de détournement de fonds public.
Photo de profil de Romain L
15,6 k points
Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 1 mois
Ça doit faire 2 ans que je me la suis "supprimée" unilatéralement. Qu'ils viennent m'interdire d'exercer, chiche !
 
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