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"On sait que derrière c'est la punition assurée" : les maires de France s'opposent à la régulation à l'installation des médecins

Auditionnés mardi 1er avril par la commission d'enquête relative à l’organisation du système de santé et aux difficultés d’accès aux soins, les représentants des maires se sont, de façon unanime, opposés à une régulation de l'installation des médecins. 

03/04/2025 Par Louise Claereboudt
Politique de santé
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"Un vote historique". Ce mercredi 2 avril, peu avant minuit, les députés ont adopté un amendement visant à rétablir l'article 1er de la proposition de loi Garot, qui avait été supprimé en commission des Affaires sociales une semaine avant. Cet article instaure une régulation de l'installation des médecins par le biais d'un mécanisme d'autorisation des ARS. L'amendement, qui réintroduit cette disposition, précise que l'installation d'un médecin exerçant à titre libéral "ou salarié" est soumise à l'autorisation préalable du directeur général de l'ARS. Si cette autorisation est délivrée de droit en ZIP ou en ZAC, elle est conditionnée, hors zonage, au départ d'un confrère de même spécialité.

La veille, les représentants des maires de France, interrogés par Stéphanie Rist dans le cadre de la commission d'enquête relative à l’organisation du système de santé et aux difficultés d’accès aux soins, ont fait part de leur opposition franche à ce mécanisme de régulation. Une prise de position forte, car de nombreux élus demandent régulièrement que soient prises des mesures coercitives pour améliorer l'accès aux soins dans leurs villes. "On sait derrière que, pour nous, c'est la punition assurée", a déclaré Gilles Noël, maire de Varzy et vice-président de l'association des maires ruraux de France (AMRF), qui s'était déjà rangée aux côtés des médecins dans une tribune dénonçant cette mesure.

"Pour nous, la régulation, c'est le miroir aux alouettes du milieu rural qui, derrière, se retrouvera chocolat", a poursuivi le vice-président de l'AMRF, qui représente les communes de moins de 3500 habitants, ce qui correspond à "33% de la population française". Et de souligner que les jeunes médecins "vont aller vers le salariat, vont se détourner, aller vers des secteurs intermédiaires, un peu en banlieue aussi quand même".

La position de l'association des maires de France (AMF), qui représente les communes de toutes tailles, sur la PPL Garot, n'était, elle, pas officiellement connue. Face au rapporteur Christophe Naegelen (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires) et aux quelques députés présents dans la salle, ce mardi, Patrick Genre, président de l'AMF dans le Doubs, a rappelé que son association juge que "les incitations financières ne fonctionnent pas" pour favoriser l'installation des médecins. Ce qui ne justifie pas, à ses yeux, de réguler la profession. En revanche, il plaide pour "lier l'installation, par un moyen X, Y, Z, à l'obligation d'assurer la PDSA".

"C'est une exigence, un impératif, parce que c'est ce qui détermine aussi parfois l'afflux de la bobologie dans les services d'urgence", a-t-il estimé. "A Pontarlier [sa ville, NDLR], la CPTS a créé en face des urgences une maison médicale de garde ; en trois mois, [on a] 30% de moins de visites aux urgences", vante le maire Divers droite. "On a regroupé cinq secteurs de garde dans cette nouvelle maison médicale de garde, même pour les médecins c'est beaucoup plus intéressant parce qu'ils font des gardes beaucoup moins souvent et on couvre beaucoup plus de patients."

De son côté, Gilles Noël, de l'association des maires ruraux, pense "que cette installation libre doit être compensée". "A l'installation libre sur les territoires des médecins, il est nécessaire qu'il y ait un engagement à exercer au moins une journée par semaine dans des territoires sous dotés ; dans des maisons de santé pas sur la place du village… On n'est pas dans la médecine foraine", a-t-il défendu, appelant l'Etat à "mettre tout le monde autour de la table".

Également présent, Philippe Gouet, président de la commission santé de l'association des départements de France et kinésithérapeute de formation, a également fait part de son scepticisme vis-à-vis de la régulation. "Je ne pense pas qu'en créant un aspect coercitif sur une installation dans une zone dite 'surdotée' – parce qu'elles sont vraiment très très peu dans notre pays – on modifie quoi que ce soit sur l'accès aux soins. D'ailleurs, on s'aperçoit que même dans Paris, on a des difficultés d'accès aux soins pour des prises de rendez-vous chez des médecins généralistes. Ce n'est pas parce qu'on va dire que Paris est en zone surdotée que ça va changer quoi que ce soit…"

Si la régulation a été mise en place pour d'autres professions, dont les kinésithérapeutes, "[leur] densité est quand même supérieure", "sur la médecine générale, ça me semble beaucoup plus compliqué". "Vu l'état global de l'accès aux soins et du manque de médecins dans l'ensemble de notre pays, je ne vois pas l'intérêt d'aller vers un dispositif d'une régulation coercitive des médecins généralistes", a martelé le représentant de l'association des départements de France. Et de mettre en garde sur "un manque d'attractivité" pour les nouveaux étudiants en médecine. "Si les internes se mettent en grève et ne travaillent plus, on va complètement déstabiliser nos hôpitaux publics, ça va être un véritable problème de santé publique !"

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Claire FAUCHERY

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1 débatteur en ligne1 en ligne
Photo de profil de lor 42
548 points
Incontournable
Neurologie
il y a 8 mois
Génial ! On est en pleine schizophrénie, les maires, sur le terrain n'en peuvent plus non plus de cette bureaucratie et étatisme hors-sol. L'assemblée nationale et le gouvernement sont complètement déconnectés surtout coté gauchistes. Et si on changeait de paradigme après 44 ans d'étatisme? Le président des maires de france David Lisnard est un candidat 2027 intéressant qui prone la liberté, ils ne sont pas si nombreux !
Photo de profil de Gérard NOËT
2 k points
Débatteur Passionné
Pharmaciens (CNOP)
il y a 8 mois
Les maires sont en première ligne pour gérer leurs communes. Ils sont en général plus pragmatiques que politiques. Malheureusement, les maires des grandes villes pensent plus à leurs carrières politiques qu au bonheur de leurs administrés. Les caricatures de ces maires type noblesse de l ancien régime sevicent à Paris, Bordeaux, Marseille, Grenoble.
Photo de profil de ERIC BERNARD
2,2 k points
Débatteur Passionné
Médecine générale
il y a 8 mois
merci aux maires, qui, eux, ne sont pas déconnectés de la réalité du terrain
 
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