"La charge clinique était devenue insupportable" : PU-PH, il a quitté la France pour le Québec
Ex-chef du service de radiologie au CHU de Caen, le Pr Jean-Pierre Pelage a quitté la France en 2022 pour devenir « chair » de l’imagerie médicale à l’université McGill de Montréal. Témoignage.
Comment avez-vous pris la décision de quitter la France ?
J’avais rejoint le CHU de Caen en 2010-2011, avec un challenge fort : regrouper toutes les activités d’imagerie sur un seul site, équiper le service, lancer des activités de recherche… Au départ, tout s’est très bien passé, j’avais le soutien sans faille du directeur, du président de CME, du doyen… Mais au bout de quelques années, j’ai dû me rendre à l’évidence : la lune de miel était terminée. Une nouvelle direction était arrivée, avec une feuille de route intenable. Or en France, le pouvoir de la direction est très fort. J’ai subi ce que je n’ai pas peur d’appeler de la maltraitance institutionnelle, et j’ai commencé à faire savoir dans mon réseau que j’étais ouvert à toute proposition.
Comment la maltraitance institutionnelle dont vous parlez s’est-elle manifestée ?
L’élément principal, c’est le fait que la charge clinique était devenue insupportable, et impactait de façon extrêmement marquée les missions universitaires. Quand il n’y a pas de praticien pour assurer la partie hospitalière, les universitaires en font plus qu’ils ne devraient : j’étais d’astreinte une semaine sur deux, je travaillais sur le terrain cinq jours par semaine… Faire l’académique le soir et le week-end, ce n’est pas possible à long terme. C’est pourquoi quand des amis de Montréal m’ont indiqué que le poste de « chair » à McGill allait être disponible, j’ai présenté ma candidature.
En quoi le fonctionnement que vous avez trouvé au Canada diffère-t-il de celui que vous avez connu en France ?
La première chose, c’est que la composante académique est forte : on a du temps protégé pour l’enseignement et la recherche, ce qui n’est pas le cas en France. Pour la partie clinique, on a plus de praticiens, plus de machines, la pénibilité est bien moindre. Par ailleurs, j’ai des fonds de recherche substantiels pour mes travaux académiques, et j’ai un budget pour recruter un assistant de recherche à plein temps et un statisticien à temps partiel. Il y a également une plus grande volonté de collaboration entre les différents services de l’hôpital. Et bien sûr, les salaires nord-américains sont conséquents, même si dans mon cas, ce n’était pas la principale raison du départ. Le revers de la médaille, mais j’y suis favorable, c’est que mes performances individuelles sont évaluées de très près : nombre de publications, d’heures d’enseignement, évaluation des étudiants, etc.
Du point de vue français, on peut trouver que le départ de professionnels tels que vous est une forme de gâchis, qu’en pensez-vous ?
Oui, c’est du gâchis. Le système français est en train de couler. Mais la dégradation des conditions d’exercice est un phénomène mondial. Ici aussi, la situation est moins rose qu’auparavant. Il reste toutefois en Amérique du Nord des opportunités incomparables, alors que je suis très inquiet sur l’avenir des établissements et des universités en France.
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