"Je souhaite que l'on puisse accélérer la généralisation du service d'accès aux soins au cours de cette année", déclarait Emmanuel Macron le 6 dernier lors de sa grande conférence de presse à l'Elysée. Et si la vitesse de croisière n'est pas assez élevée, son Premier ministre a prévenu lors de son discours de politique générale : il envisage de rétablir l'obligation de gardes des médecins libéraux les soirs et les week-ends, dans les territoires où la réponse aux besoins de santé de la population n'est pas suffisante. Un chiffon rouge pour les représentants de la profession qui n'ont pas manqué de souligner la méconnaissance du dossier. "Le SAS ne fonctionne pas aux heures de PDSA", a ainsi rappelé le Dr Jérôme Marty, président de l'UFML-S. De son côté, le Syndical des médecins libéraux (SML) craint qu'une telle mesure n'incite les praticiens retraités à déplaquer, et ne dissuade les jeunes de s'installer. Instauré dans le cadre du Pacte de refondation des urgences (2019), le service d'accès aux soins doit permettre d'"offrir à la population une prise en charge plus lisible et coordonnée entre la médecine de ville et les établissements de santé afin notamment de limiter les recours aux urgences évitables" mais aussi de "recentrer le personnel des structures des urgences sur leur cœur de métier" et d'"améliorer l'accès aux soins non programmés en ville", rappelle la DGOS, dans un bilan des 20 premiers SAS publié le 30 janvier. S'il devait être mis sur les rails à l'été, le dispositif a pris du retard du fait de l'épidémie de Covid-19. Les sites pilotes – qui couvraient 40% de la population dans 13 régions – n'ont été choisis qu'en novembre 2020. Alors que l'Etat presse pour passer à la phase de généralisation – à ce jour 80% du territoire est couvert par un SAS, le bilan de la DGOS – très attendu par les organisations de médecins libéraux notamment – "permet de mettre en évidence les bonnes pratiques organisations", dont découlent une série de recommandations. Il porte donc sur les 20 premiers sites pilotes, en fonctionnement entre le second semestre 2021 et le second semestre 2022.
"Gouvernance équilibrée" Premier enseignement de ce retour d'expérience : les sites pilotes ont pu compter sur une "gouvernance équilibrée" entre la ville et l'hôpital. Cinq acteurs principaux apparaissent au cœur de cette gouvernance : les Samu, les associations de PDSA et de médecins régulateurs libéraux, les CPTS, les URPS ou encore les conseils départementaux de l'Ordre des médecins. 75% des SAS lancés ont un statut juridique ou sont en cours de signature définitive de leur statut afin d'organiser le premier décroché dans le cadre de cette gouvernance. Structurer juridiquement le dispositif apparaît essentiel, estime la DGOS, tout comme formaliser la gouvernance ville-hôpital. 50% des sites pilotes ont opté pour une convention entre l'association portant la régulation ambulatoire* et l'établissement siège de Samu, jugée "plus souple et simple" à mettre en place. Cette forme est ainsi préconisée, au moins pour le lancement du SAS. 25% des SAS pilotes ont choisi de mettre en place un groupement de coopération sanitaire (GCS). "Le GCS a pu ensuite faire l’objet d’une seconde étape si les acteurs veulent se structurer davantage dans le cadre d’un groupement (gestion d’un budget commun, recrutement des personnels, etc.)." L'échelle d'action des SAS pilotes a été dans 93% des cas départementale, "du fait de l'adossement du SAS sur les moyens du Samu et les organisations préexistantes en matière de permanence des soins". Dans les départements "avec une faible activité" et "dans un contexte de rareté de la ressource médicale et ARM", la DGOS recommande "d'envisager une articulation territoriale des SAS pouvant bénéficier à plusieurs départements, notamment pour l'organisation du premier décroché". Il convient également de favoriser les liens avec "au moins un autre SAS de la région", avec lequel pourront être mises en œuvre "des solutions d'entraide", en cas de tensions. La plupart du temps (70%), les opérateurs de soins non programmés (OSNP) – métier créé dans le cadre du SAS et dont le rôle est de venir en appui du généraliste régulateur et de s'assurer du respect du parcours de soins par les appelants – sont embauchés par l'association portant la régulation médicale – dans les autres SAS, c'est le Samu qui s'en charge. "Cette répartition témoigne de la volonté de nombreuses associations portant la filière ambulatoire de se saisir pleinement de leurs missions d'organisation de la filière", peut-on lire dans le bilan. "Un afflux" d'appels "absorbé de manière satisfaisante" Entre le second semestre 2021 et le premier semestre 2022, les appels aux SAS ont augmenté de 24% en moyenne. Un afflux important mais "absorbé de manière satisfaisante lorsque l'articulation du premier décroché-second décroché par les filières est optimisée", note-t-on. Ainsi, un SAS a décroché en moyenne 483 appels journaliers sur la période. Depuis, cela a encore augmenté, puisqu'en février 2023, un SAS décrochait en moyenne 885 appels par jour, indique la DGOS. Tous les SAS utilisent le 15 comme numéro d'accès au premier décroché. Mais 1 SAS pilote sur 5 utilisait aussi des numéros d'accès à la PDSA, "qui sont réceptionnés au front office du SAS". Le document préconise fortement de "bien articuler la communication sur l'ouverture du SAS avec la montée en charge des effectifs, notamment en ARM, afin que ceux-ci soient suffisants pour absorber l'afflux d'appels". Toutefois, indique la DGOS, la mise en place du service d'accès aux soins permet de "contenir" voire "de faire baisser dans certains départements" l'évolution du nombre de dossiers de régulation médicale AMU, c’est-à-dire adressés dans les services d'urgences. Et ce, malgré l'évolution globale du nombre d'appels et du nombre de dossiers créés par le SAS. Le part de dossiers ne relevant pas des urgences vitales a ainsi tendance à augmenter plus fortement.
Des conseils médicaux "simples" 61% des décisions prises par les SAS sont des conseils médicaux "simples", et ce pour les deux filières (AMU et ambulatoire). "Cette part a tendance à s'accroître avec le temps", est-il écrit. "Cela témoigne d'un autre aspect important du déploiement du SAS pour la santé publique, à savoir l'éducation à la santé pour un bon usage des organisations de soin". 12% des appels mènent à une consultation en ville, 12% des appelants sont réorientés vers le médecin traitant et 15% sont dirigés vers les urgences. Impliquer plus de médecins Alors que 3622 médecins généralistes étaient inscrits sur la plateforme numérique nationale fin février 2023, la DGOS appelle à s'appuyer, entre autres, sur les CPTS afin d'"impliquer les médecins adhérents dans l'effection de soins non programmés". S'agissant de la plateforme numérique nationale, dont l'intérêt est de "présenter l'offre de soins non programmés des territoires et de faciliter l'accès aux soins et la prise de rendez-vous dans un délai de 48h", la DGOS confirme avoir observé "une forte attente" des professionnels concernant ses usages. Depuis juillet 2022, elle est utilisée dans 46 territoires. Elle fait l'objet de plusieurs préconisations. "Des référents territoriaux et gestionnaires de comptes doivent être identifiés comme correspondants et relais auprès des acteurs du territoire afin d'en promouvoir l'usage", peut-on ainsi lire. Par ailleurs, "les plateformes déployées localement devront être interfacées avec la plateforme nationale pour continuer à être utilisées par les équipes de régulation des SAS concernés". Ces observations et préconisations ont également nourri le décret définissant les modalités d'organisation et de fonctionnement du service d’accès aux soins, qui n'est pas encore paru. *81% des SAS lancés ont une association qui porte la régulation ambulatoire.
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