Asthme : 1 cas sur 5 en relation avec le travail

06/06/2019 Par Corinne Tutin
Pneumologie

L’asthme de l’adulte peut être aggravé ou provoqué par une exposition allergénique ou des facteurs irritants ou physiques sur le lieu de travail. La rythmicité professionnelle des symptômes doit faire évoquer ce diagnostic. L’asthme est la principale affection respiratoire en lien avec le travail. "Il en existe deux grandes catégories : des asthmes professionnels (AP) proprement dits, causés directement par l’environnement du travail, et des asthmes au départ non professionnel mais qui sont aggravés par des stimuli de l’environnement de travail tels que des facteurs irritants ou des paramètres physiques comme le froid, la chaleur…", explique le Dr Émmanuelle Penven, qui exerce au centre de consultation des pathologies professionnelles du CHRU de Nancy. "Les données épidémiologiques suggèrent que de 15 à 33 % des asthmes de l’adulte seraient en relation avec le travail, le chiffre de 20 % étant souvent décrit dans les études récentes". Les asthmes professionnels sont eux-mêmes différenciés en deux types : des asthmes non immunologiques aujourd’hui regroupés sous le terme "d’asthme induit par les irritants" (Apii) et des asthmes immuno-allergiques (Apia). On estime actuellement que 10 à 15% des asthmes apparaissant à l’âge adulte seraient des asthmes professionnels. Le Réseau national de vigilance et de prévention des pathologies professionnelles (RNV3P), qui centralise les informations de 32 centres français de consultations de pathologies professionnelles, a recensé entre 2007 et 2017 3850 cas d’asthmes en relation avec le travail (ART). L’analyse des données a confirmé que les métiers les plus concernés sont actuellement ceux impliquant l’utilisation de produits désinfectant/détergents (professionnels de l’entretien ménager (15% des cas), professionnels du milieu de soin (5% des cas)…) . On retrouve ensuite des professions traditionnellement exposées à ces ART comme les boulangers/pâtissiers (12 %) "qui sont souvent en contact avec des allergènes assez puissants, farines, levures", précise le Dr Penven, les coiffeurs (10 %), les peintres (4 %). "Depuis quelques années, les cas favorisés par les isocyanates qu’on retrouve dans les matériaux de revêtement, les laques, les vernis, les peintures diminuent, de même que ceux liés aux aldéhydes ou aux gants au latex, (généralisation des gants médicaux sans latex ou en latex non poudré), tandis que la part des produits d’entretien s’accroît", complète le Dr Penven. Les Apia impliquent des allergènes de haut poids moléculaire, notamment des protéines (farines de céréales, phanères d’animaux, enzymes, latex…) ou de bas poids moléculaire comme des substances chimiques.   Y penser si l’asthme disparaît pendant les vacances "Le rôle du médecin généraliste est d’évoquer un asthme en relation avec le travail si celui-ci réapparait chez un jeune adulte alors qu’il avait disparu à l’adolescence, qu’il s’atténue le week-end ou encore plus pendant les vacances. Il faut penser à rechercher une rythmicité professionnelle des symptômes", souligne le Dr Penven. En cas de suspicion d’ART ou d’AP, on pourra adresser le patient à un pneumologue ou un pneumo-allergologue, à un centre de maladies professionnelles, au médecin du travail qui pourra évaluer les risques en milieu professionnel. Le bilan effectué consistera à établir le lien avec le travail, notamment en mesurant le débit-expiratoire de pointe en milieu professionnel, réaliser des prick-tests cutanés pour mettre en évidence une sensibilisation dépendante des IgE. Quelques rares centres comme celui du CHRU de Nancy peuvent aussi entreprendre des tests de provocation bronchique réaliste pour étayer le diagnostic. La reconnaissance des allergènes responsables d’Apia peut être difficile car, "si une dizaine de substance seulement (céréales, latex, phanères d’animaux, enzymes, isocyanates, bois, métaux, persulfates, aldéhydes, fumées de soudage) sont à l’origine de 60 % à 90 % des cas d’AP répertoriés dans les programmes de veille sanitaire ou les statistiques médico-légale de réparation en maladie professionnelle, plus de 400 substances ont été décrites comme allergisantes dans la littérature", rappelle le Dr Penven. La responsabilité des allergènes est en général plus facile à mettre en évidence, par prick-tests, pour les substances protéiques de haut poids moléculaire que pour les molécules chimiques de bas poids moléculaire.   Les mesures de prévention sont essentielles en milieu professionnel : bonne aération et ventilation, système d’aspiration à la source, port d’équipement de protections individuels. "Il est indispensable pour les produits ménagers de bien respecter les conseils d’emploi, qui peuvent d’ailleurs être fournis par l’industriel : dilution, utilisation en atmosphère ventilée, non recours aux aérosols", rappelle le Dr Penven. Certaines entreprises commencent à faire des efforts pour communiquer les bons gestes à suivre, mais ce n’est pas toujours le cas.  

 
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