BILAN ET PERSPECTIVES - La prévention par la vaccination et le dépistage sont plus que jamais indispensables. Le Pr Christophe Bureau*, hépatologue à l’hôpital Purpan de Toulouse, et secrétaire général de l’Association française pour l’étude du foie (Afef), commente l’actualité 2018 en matière d’hépatites.
Egora : Quelles sont les actualités marquantes de l’année 2018 concernant la prise en charge des hépatites ? Pr Christophe Bureau : Nous avons été surpris et satisfaits de l’annonce par le gouvernement de l’obligation vaccinale début 2018, qui concerne aussi le vaccin contre l’hépatite B. La France est l’un des pays les plus en retard en matière de vaccination contre l’hépatite B. Il est donc indispensable de vacciner les nourrissons et de mettre en place un rattrapage vaccinal chez les jeunes non vaccinés. Nous avons constaté une pénurie de vaccins au début de l’année. Mais, celle-ci n’existe plus et il n’y a donc plus lieu de polémiquer. L’autre fait positif est que l’une des mesures de la Stratégie nationale de santé 2018 soit représentée par l’intensification des actions de prévention et de dépistage pour obtenir l’élimination du virus de l’hépatite C à l’horizon 2025. Ce qui va dans le sens des préconisations de l’Organisation mondiale de la santé, qui souhaite l’élimination du VHC en 2030. Nous attendons encore les arbitrages de la Haute autorité de santé, qui devraient être prochainement rendus publics. Mais, normalement et, comme l’Afef l’a préconisé dans ses recommandations de mars 2018**, tous les médecins devraient pouvoir prescrire les traitements de l’hépatite C au premier trimestre 2019. Cette mesure, qui correspond à l’objectif de santé publique, devrait faciliter l’accroissement du nombre de patients traités. Il aurait été contradictoire que le traitement contre le VHC, qui est relativement simple, et avec peu d’effets secondaires, demeure réservé à une spécialité médicale. Les médecins généralistes devront vérifier l’absence de maladie hépatique sévère, de cirrhose et, si le feu est vert, pourront prescrire demain une association de sofosbuvir et de velpatasvir pendant 12 semaines ou de glécaprévir et de pibrentasvir durant 8 semaines. Grâce à ces associations pangénotypiques d’inhibiteurs de protéase et d’inhibiteurs de polymérase, le taux de guérison est actuellement de 98-99 % en première ligne de traitement. Pour aider les praticiens, l’Afef a mis au point un tutoriel**. Y a-t-il eu des progrès en matière d’hépatites B et quels espoirs peut-on avoir pour améliorer la prise en charge ? Si l’on veut se débarrasser du virus, il faut avant tout vacciner. Parvenir à éliminer le VHB chez les personnes infectées est plus compliqué que pour le VHC, car ce virus à ADN s’intègre au génome des cellules. Aujourd’hui, nous disposons de thérapeutiques efficaces, notamment à base d’analogues nucléosidiques comme l’entécavir et le ténofovir. Mais, le problème est que ce traitement est purement suspensif car nous ne parvenons pas à éliminer le VHB. On peut cependant espérer y parvenir demain grâce à des traitements de longue durée, par exemple en favorisant une destruction des cellules infectées par le VHB, le foie ayant ensuite la capacité de se régénérer à partir de zones de tissus non infectés. L’idée qui prévaut est qu’il faudra pour être actif stimuler le système immunitaire grâce à des immunomodulateurs, dont de nombreuses classes thérapeutiques sont actuellement testées, en plus de freiner la multiplication virale. Qu’en est-il dans les autres hépatites, notamment l’hépatite A ? Dans les années 1960-1970, l’hépatite A tendait à disparaître en France et les risques étaient surtout liés à des défauts d’hygiène avec des zones d’endémie en Inde, en Afrique. D’où l’intérêt de vacciner les voyageurs non immunisés. Depuis quelques années, il existe un nouveau mode de transmission avec un risque d’infection chez les hommes ayant des relations sexuelles avec les hommes (HSH), en association ou non avec des infections sexuellement transmissibles. Le généraliste doit rechercher la présence d’anticorps chez les HSH et vacciner ceux d’entre eux qui n’ont pas été en contact avec l’hépatite A. L’hépatite E est une autre cause fréquente d’hépatite aiguë. Mais, elle est en général bénigne sauf chez certains malades (immunodéprimés, patients atteints d’une maladie chronique du foie avec fibrose sévère). Un dépistage sur l’ensemble de la population n’est pas justifié, à l’heure actuelle. *Le Pr Christophe Bureau déclare participer ou avoir participé à des interventions ponctuelles pour Gilead et AbbVie **Recommandations Afef (Association française pour l’étude du foie) pour l’élimination de l’infection par le virus de l’hépatite C, en France. Mars 2018. www.afef.asso.fr *** Disponible sur www.youtube.com – ame afef
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