Alzheimer : l’amnésie serait en fait faiblement prédictive de la maladie
Leurs recherches sont parties du principe que l’amnésie constitue généralement le point de départ d’une suspicion de maladie d’Alzheimer car elle est considérée comme le symptôme le plus fréquent et le plus précoce de cette pathologie dégénérative. Or ce symptôme est présent dans de nombreuses autres pathologies neurologiques. Il « est par exemple présent dans 50 % des cas de dégénérescence fronto-temporale, mais le pronostic et l’évolution de cette maladie ne sont pas les mêmes que pour la maladie d’Alzheimer et les solutions thérapeutiques proposées diffèrent. Chez ces patients, une prise en charge spécifique de pathologie Alzheimer peut être délétère » précisent les auteurs de cette étude. Leurs travaux ont donc porté sur la spécificité de l’amnésie dans la maladie d’Alzheimer. Pour cela ils se sont appuyés sur des analyses neuropathologiques post-mortem de cerveaux de patients. Au total les cerveaux de 91 patients souffrant de diverses maladies neurodégénératives dont la maladie d’Alzheimer, mais aussi la dégénérescence fronto-temporale, la maladie à corps de Lewy, de Creutzfeldt-Jakob, ou de lésions cérébro-vasculaire progressives ont été analysés. Des évaluations de leurs performances cognitives avaient été réalisées dès les stades précoces de la maladie, permettant de classer les patients en 3 groupes : non amnésiques, modérément amnésiques, et sévèrement amnésiques. Les auteurs ont alors mis en évidence qu’il n’existait qu’une correspondance modérée entre la sévérité de l’amnésie et la présence d’une maladie d’Alzheimer. En effet, un tiers des patients Alzheimer n’avait pas de troubles de mémoire. A contrario, près de la moitié des patients sans pathologie Alzheimer était amnésique. La présence d’une amnésie apparait donc comme faiblement prédictive de la maladie d’Alzheimer. « Nos résultats confirment que le diagnostic fondé sur l’amnésie comme marqueur systématique de la maladie d’Alzheimer a une pertinence limitée, souligne Maxime Bertoux (Lille), premier auteur de cette étude, il invite à repenser la manière dont cette maladie est diagnostiquée afin de réduire l’errance diagnostique et la mauvaise orientation de certains patients et d’améliorer la reconnaissance clinique et sociétale des autres maladies neurodégénératives. » Ces données pourraient aussi avoir des conséquences en matière de recherche. En effet, le critère de l’amnésie est souvent primordiale dans les essais cliniques visant à tester des traitements contre la maladie d’Alzheimer recrutent leurs participants sur un critère d’amnésie. « Associer systématiquement une perte de mémoire à la maladie d’Alzheimer pourrait biaiser les inclusions dans les protocoles de recherche », ajoute Maxime Bertoux.
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