Prostate, bibine et amputation : vos meilleures histoires de remplacement

07/09/2019 Par A.M.
Témoignage
Tout au long de l'été, vous avez été nombreux à partager vos anecdotes de remplacement, en réponse à notre appel à témoignages. Voici un florilège d'histoires courtes.
 
 

 

"Des jetons de loto pour prendre son tour"

Petitbobo "En 1968, bien avant l'arrivée du gros du babyboom, les médecins installés étaient peu nombreux et (déjà) surchargés. Mon premier remplacement fut dans une banlieue très populaire de Grenoble. La secrétaire était omniprésente, je n'ai jamais rencontré le médecin remplacé. Il était prévu que je garde "tout" sauf les AT-MP, art 115, AMG, etc. Il y en avait beaucoup mais... Pas de salle d'attente, mais des jetons de loto pour 'prendre son tour' dès le petit matin, et ensuite aller faire son tour à la grande surface. Pas de chaise pour que le 'patient' s'assoit, il restait debout, avait droit à une seule plainte. Le médecin devait rester assis pour ne pas perdre de temps. Table d'examen recouverte de revues. C'était de l'abattage mais les gens acceptaient ça... Quelques années après cette expérience, j'ai appris que le confrère remplacé s'était reconverti salarié..."      

La prostate du sénateur

Jean "Il y bien longtemps, j'ai eu lors d'un remplacement à réaliser une échographie (c'est ma spécialité) de la prostate par voie endorectale à un sénateur. Il n'était pas très à l'aise, moi encore moins. Tout s'est bien passé, il n'y avait rien de grave. Je ne l'ai pas interrogé sur l'intérêt d'un tel examen pour l'ensemble de ses collègues. J'ai fait allusion à la caméra cachée pour le détendre, mais n'ai pas abordé le problème de la pression fiscale car c'était hors sujet et il aurait pu m'en tenir rigueur."    

"Combien buvez-vous?"

Dr Pierre Carré "C’était il y a quelques dizaines années… Un de mes premiers remplacements en médecine générale, lors de la visite chez le médecin pour premier contact. En visitant la maison, mise entièrement à ma disposition, avec le médecin et en entrant dans la cuisine, ce dernier me pose une question qui me désarçonne : 'Combien buvez-vous?' Comment? Je suis très étonné et il m’explique : 'lors d'un dernier remplacement, un de vos prédécesseurs m’a sifflé des bouteilles auxquelles je tenais et qui étaient dans la cave. Maintenant, je ferme la cave à clef mais je demande au remplaçant sa consommation prévisible et je lui laisse le nombre de bouteilles qu’il faut dans la cuisine."    

Sous étroite surveillance

Vozigues "Il y a un quart de siècle, avant que je ne m'installe, j'ai remplacé sporadiquement, à l'année, un dimanche par ci, des vacances d'été (2 mois) par là, un médecin à quelques mois de la retraite alors qu'il se destinait à transmettre toute sa clientèle à sa fille, et qui allait jusqu'à m'appeler chez moi, en période intermédiaire, pour me faire des observation avec son accent grec: - Vous avez vu 4 personnes, dimanche dernier, dans une famille et vous avez compté le supplément du dimanche qu'à une seule ! - Vous êtes revenu voir une personne le lendemain et vous n'avez pas fait payer la deuxième visite ! - Vous voyez plus de 3 personnes, vous faites payer autant de visites que de gens, sinon vous changez la date! - Et quand vous faites une prise de sang, vous rappelez pour une consultation de "résultats" il faut qu'il (elle) vienne une deuxième fois ! Et tout à l'avenant, tout ce qui ne fallait pas faire et pour des faits rapportés par la clientèle qui le mettait pas très à l'aise : 'Mais de quoi on a l'air ?' Il avait été un médecin très actif, hyperactif, avec son épouse (assistante-secrétaire, et cuisinière, qui ne se présentait jamais dans la salle d'examen, mais restait dans le bureau pendant l'entretien qui précédait les consultations "bondées", pour passer la fiche à remplir, et palper chèque à encaisser !)"    

Une belle jambe

Flyingpapy "J'étais alors médecin-chef d'un hôpital d'un pays du Sud Sahel. J'étais dans mon bureau-cabinet, quand une forte rumeur s'amplifie à ma porte, qui s'ouvre brutalement - ce n'était pas habituel - et un gendarme outré pose une jambe en parfait état sur mon bureau et me demande : 'C'est à vous, ça ?' Quelque peu interloqué, je convoque illico tous les responsables de l'hôpital et leur pose la même question En fait, le chirurgien, après une amputation, avait chargé un infirmier du bloc d'aller incinérer la pièce et ce dernier, pour se débarrasser de cette corvée, avait jeté la jambe dans une décharge, un chien l'ayant trouvée s'en était emparé pour en faire son déjeuner et avait traversé la village avec la dite jambe en travers de sa gueule et eu le succès assuré !"    

Médecine : vache de métier

Hubersanté "Pendant 4-5 ans, dans les années 70, j’ai remplacé régulièrement deux médecins associés dans un petit village rural à 30 Km au sud de Toulouse… Un matin, j’arrive à leur cabinet où selon l’habitude, une litanie de visites à domicile m’attend, toutes inscrites sur un cahier ad hoc. J’organise ma 'tournée' et les premiers servis seront les G… une tribu d’origine italienne, exploitante agricole dans le village depuis trois générations. Je ne les ai jamais vus et ils ne me connaissent pas. Je rentre dans la cour et à peine ai-je eu le temps de couper les gaz de ma voiture qu’un trio de quadras (le mari, la femme et le frère de celle-ci) accourt à toutes jambes et me saute dessus : - 'Ah, vous êtes le remplaçant du docteur, on vous attend !' - 'Hé oui', leur réponds-je tout en me demandant en mon for intérieur pourquoi la notion d'urgence n’avait pas été signalée sur le fameux cahier des visites. - 'Suivez-nous ça presse et on est très embêtés'. Et ils me conduisent dans l’étable où meugle une vache prête à vêler, dans la difficulté apparemment. Voyant tout de suite ma circonspection et soupçonnant une incompétence implicite ils s’écrient : - 'Mais alors, vous n’êtes pas le remplaçant du Dr D., le vétérinaire de Carbone ?' - 'Non, moi je remplace le Dr F., ici au village' - 'Ah oui, c’est que ça. Il faut simplement renouveler les médicaments pour la tension du papi, c’était pas urgent ! Il est là dans la pièce à côté'. Priorité à la vache, Pépé, ça peut attendre. À les voir, sûr que cette pensée les traverse tous les trois à cet instant critique. Tout en me montrant l’itinéraire, la 'patronne' m’attrape le coude 'Vous auriez pas 2 minutes, juste pour la regarder notre vache, médecins et vétos vous êtes tous des docteurs après tout'. Heureusement à peine finie cette phrase, le remplaçant du véto débarquait."         Merci à tous et rendez-vous l'été prochain pour une nouvelle série !  

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