Face aux abus, ces médecins veulent inscrire "l'interdit sexuel" médecin-patient dans le Code de déontologie

27/03/2018 Par Catherine le Borgne
Déontologie

Une pétition lancée par des médecins, dont le Dr Dominique Dupagne, célèbre blogueur, et des féministes demandent au gouvernement d'inscrire dans le Code de déontologie l'interdiction faite aux praticiens d'avoir des relations sexuelles avec leurs patientes et patients, ce qui n'est pas le cas actuellement. Malgré les abus dénoncés au travers de plusieurs témoignages, l'Ordre considère que les textes se suffisent à eux même et qu'il n'y a pas lieu de les faire évoluer, sauf à contrevenir au principe de liberté des personnes.

"Un patient n'est pas un simple adulte libre de ses choix. La relation thérapeutique crée une vulnérabilité bien connue appelée amour de transfert", estiment les premiers signataires de la pétition, dont Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France, Irène Frachon, pneumologue à l'origine de l'affaire du Mediator, Baptiste Beaulieu, généraliste et dessinateur, Marilyn Baldeck de l'Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail, la dessinatrice Pénélope Bagieu, ou la psychiatre Muriel Salmona.   Abusées sexuellement par leur pyschiatre   S'appuyant sur les témoignages de trois femmes qui disent avoir été abusées sexuellement par leur psychiatre et ont témoigné sur le blog du Dr Dupagne, les signataires demandent à la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, que soit ajouté un nouvel article au Code de déontologie médicale ainsi rédigé "Le médecin doit s'interdire toute relation sexuelle avec les patients dont il a la charge". Si les psychiatres sont les plus exposés, une situation identique peut exister avec un médecin généraliste ou avec d'autres spécialistes, font-ils valoir dans un dossier de presse. Selon eux, "si le Serment d'Hippocrate reste essentiellement symbolique et n'est pas opposable au médecin, le Code de déontologie médicale est validé par décret ministériel et s'impose réglementairement aux médecins, passibles de poursuite devant leur Ordre s'ils l'enfreignent".   Empêcher de nuire les prédateurs sexuels   L'opération "n'est pas destinée à jeter l'opprobre sur une profession qui fait la preuve au quotidien du dévouement et de la probité de l'immense majorité de ses membres. Il s'agit d'empêcher de nuire les rares prédateurs sexuels qui menacent toute une corporation", est-il précisé. "Ce qui est étonnant, c'est que cet interdit ne figure pas déjà dans les textes", juge auprès de l'AFP le médecin généraliste et romancier Baptiste Beaulieu, signataire. Les chiffres officiels manquent. Dans un rapport réalisé en 2000, intitulé "Pratique médicale et sexualité", le Conseil national de l'ordre des médecins indiquait que sa section disciplinaire avait "eu à connaître une quarantaine d'affaires de ce type au cours des dix dernières années". "L'incidence de ces écarts est difficile à évaluer. Elle est en augmentation apparente, entraînant des sanctions aggravées, probablement en raison d'une évolution vers une moindre tolérance à la fois des victimes, du public et du corps médical", est-il ajouté dans ce texte, qui précise que "psychiatres et gynécologues seraient plus exposés que d'autres".   Intrusion dans la vie privée   Dans un communiqué, l'Ordre a néanmoins jugé que la demande formulée de modifier le code de déontologie était "infondée et inopérante en pratique". Selon l'institution, l'interdiction par voie réglementaire de relations sexuelles "librement consenties" entre un médecin et son patient serait "une intrusion dans la vie privée de personnes libres et consentantes" dès lors que les textes actuellement applicables et appliqués "permettent de réprimer en droit disciplinaire tous les abus de faiblesse sur personne en situation de vulnérabilité, y compris en matière sexuelle". En outre, souligne l'Ordre, consulté avant le lancement de la campagne médiatique, "cela contreviendrait aux principes de la liberté des personnes", inscrit dans l'article 8 de la Convention européenne des Droits de l'Homme.

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