Arrêts de travail, régulation, intérim… Dix mesures qui vous concernent dans le budget de la Sécu 2023

26/09/2022 Par L. C.
Assurance maladie / Mutuelles
Si certaines mesures intégrées dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2023 ont été dévoilées il y a quelques jours par le Gouvernement lui-même, les ministères de la Santé, des Solidarités et des Comptes publics ont présenté officiellement et intégralement le texte ce lundi 26 septembre. Egora fait le point sur les mesures qui vous concernent. 

  "Dans un contexte où les comptes sociaux évoluent au gré des épreuves collectives et des progrès que nous voulons engager", les ministères de la Santé, des Solidarités et des Comptes publics ont présenté ce lundi le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour l’année 2023. Deux ans et demi après le début de l’épidémie de Covid-19 sur notre sol, qui a mis à mal les comptes de la Sécurité sociale, les ministères ont souligné un projet de loi qui cherche à "améliorer la vie quotidienne des Français". Dans le champ de la santé, le ministère concerné a évoqué des mesures visant à traduire les engagements pris par le Président de la République, mais aussi à "poser des premières briques pour la rénovation de notre système de santé". Ce premier PLFSS du nouveau mandat d’Emmanuel Macron entend également soutenir l’hôpital et instaurer "une logique de responsabilité pour la soutenabilité de notre système". Celui-ci commence à peine à sortir la tête de l’eau, après près de trois années plombées par la crise sanitaire. En effet, le déficit de la Sécu devrait observer une nette baisse et s’établir en 2023 à -6,8 milliards d’euros, contre -17,8 milliards cette année, -24,3 milliards d’euros en 2021 et -39,7 en 2020 – une année record. Et ce notamment grâce à la réduction des pertes de la branche maladie, qui devraient passer de 20,3 milliards d’euros à 6,5.

Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023.

En cause notamment, la diminution drastique des dépenses liées à la crise : 1 milliard d’euros ont été provisionnés dans l’objectif national de dépenses d’Assurance maladie (Ondam) 2023 au titre des coûts liés au Covid (0,6 milliard pour la campagne vaccinale et les besoins de Santé publique France et 0,4 milliard pour les tests de dépistage). En 2022, les dépenses exceptionnelles liées au Covid se sont élevées à 11,5 milliards d’euros.

Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023.

Pour l’année 2023, l’Ondam poursuivra sa progression : + 3,7% hors dépenses liées à la crise sanitaire, soit une augmentation de 8,6 milliards d’euros par rapport à l’année dernière. Mais "en raison de la baisse des dépenses liées à la crise sanitaire, sur l’ensemble du périmètre, l’évolution serait de - 0,8 % par rapport à l’Ondam rectifié 2022". Pour traduire son soutien aux établissements de santé, le Gouvernement prévoit d’augmenter l’enveloppe dédiée aux dépenses relatives à ces structures de 4,1% (hors dépenses liées à la crise) en 2023, pour s’établir à 100,7 milliards d’euros, "soit un rythme deux fois plus rapide qu’au cours de la décennie 2010". Ces financements nouveaux permettront de financer la fin de la montée en charge des mesures du Ségur et des Assises de la santé mentale. Elle permettra également de financer "en année pleine, la hausse du point d’indice dans la Fonction publique et des revalorisations dans les établissements privés non lucratifs", ainsi que le rythme des "évolutions tendancielles". Le Gouvernement ne compte pas demander d’"économies" à l’hôpital – compte tenu de ses fragilités révélées avec la crise sanitaire. L’enveloppe allouée aux soins de ville, elle, progressera de 2,9%. Comme l’indique le PLFSS, l’Ondam 2023 intègre en ville entre autres "la montée en charge" de la convention des infirmières libérales et des pharmaciens, ainsi que des mesures de l’avenant 9 à la convention médicale – signée en juillet 2021. "Il permettra également le financement des nouvelles conventions à venir des médecins et masseurs-kinésithérapeutes". Lors de la présentation du PLFSS, le ministère a mis l’accent sur les grands enjeux de ce texte, qui sera débattu dans les prochaines semaines au Parlement : virage préventif, accès à la santé pour tous, soutien à l’autonomie, lutte contre les abus et les fraudes… Egora fait le point en détails sur les mesures phares de ce budget 2023 :   Ouverture de la prescription des vaccins à d’autres professionnels de santé "Dans une logique de démocratisation et de meilleure prévention", le Gouvernement entend en premier lieu élargir le nombre de professionnels de santé habilités à prescrire et à administrer les vaccins sur la base des recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS). Cette mesure "créera une nouvelle compétence de prescription vaccinale pour les pharmaciens et les infirmiers, tout en élargissant la liste des vaccins que ces derniers sont autorisés à administrer". Les compétences vaccinales des sages-femmes, elles, ne seront plus limitées aux enfants et aux femmes.   Soutenir les équipes de régulation Dans la continuité des mesures mises en place dans le cadre de la mission flash – dont l’efficacité est évaluée par l’Inspection générale des affaires sociales, le PLFSS inscrit le renforcement des équipes de régulation... "Les mesures prises cet été pour faciliter le recrutement des médecins libéraux régulateurs vont être pérennisées dans ce PLFSS 2023", peut-on ainsi lire.   Une 4e année d’internat médecine générale La nouvelle est tombée ce dimanche 25 septembre. Les ministres de l'Enseignement supérieur et de la Santé ont annoncé dans un communiqué conjoint l’ajout d'une 4e année au DES* de médecine générale à la rentrée 2023 qui devra être réalisée "exclusivement" en ambulatoire, et "préférentiellement" en zone sous-dense. La mesure, prévue par la réforme du 3e cycle des études de médecine et qui figurait dans le programme de campagne d’Emmanuel Macron, est intégrée dans ce PLFSS 2023. Une nouvelle qui n’a guère plu aux organisations étudiantes, qui ont d’ores et déjà annoncé une grande mobilisation en octobre. Bien que les ministères aient indiqué avoir lancé une mission de concertation avec les parties prenantes sur les modalités de cette 4e année, les syndicats dénoncent eux une "décision précipitée" et une absence de dialogue. "Il ne s’agit pas d’aller vite et de ne pas discuter ces conditions", a prévenu le ministère de la Santé ce lundi. "On essaiera en priorité d'avoir ces exercices dans les zones sous-denses, mais il ne s'agit pas là d'une obligation", a-t-il ajouté. Le projet de loi, lui, vante les mérites de cette 4e année : "la réalisation de cette année supplémentaire de troisième cycle, réalisée exclusivement en ambulatoire sous la supervision de maîtres de stages universitaires, permettra d’enrichir la formation de nos futurs médecins. Elle permettra ainsi d’aligner la formation des médecins généralistes sur le même modèle que l’ensemble des autres spécialités. Un véritable projet pédagogique permettra […] d’accompagner les futurs médecins à leur installation rapide."   Déremboursement de certains arrêts de travail prescrits en téléconsultation Egalement annoncé ce dimanche par le ministre de l'Action et des Comptes publics dans un entretien au Journal du Dimanche, le PLFSS 2023 prévoit que les arrêts de travail prescrits en téléconsultation par un autre professionnel que le médecin traitant ou un médecin vu au cours des 12 derniers mois ne seront plus remboursés, sauf exceptions. Objectif avancé par Gabriel Attal : "éviter que certains enchaînent les consultations en ligne jusqu'à trouver celui qui voudra bien leur délivrer un arrêt maladie". "On a constaté une explosion des arrêts maladie donnés, en téléconsultation, par un professionnel qui n'est pas le médecin traitant. Ce sont près de 100 millions d'euros l'an dernier", argumente-t-il. Le ministère de la Santé ajoute que la mesure permettra de "garantir la qualité de prise en charge". Selon Ségur en effet, "80% des arrêts de travail prescrits par téléconsultation le sont pour des personnes qui ont un médecin traitant". Selon l’AFP, si elle est votée, la mesure doit entrer en vigueur au 1er juin 2023.   Le déconventionnement d’urgence étendu aux offreurs de soins Parmi les autres mesures de l’arsenal anti-fraude, le PLFSS inclut d’étendre la possibilité de déconventionnement d’urgence d’un professionnel de santé à "l’ensemble des catégories d’offreurs de soins et prestataires de services en cas de violation particulièrement grave des engagements conventionnels ou de préjudice financier important". Objectif de ce vaste plan de lutte - qui se veut "ferme" : augmenter le taux de fraudes sociales détectées. En 2021, les montants détectés s’élevaient à 1,5 milliard d’euros. Par ailleurs, des pouvoirs de cyber-enquêtes seront confiés aux contrôleurs des caisses de Sécurité sociale. Et les échanges d'informations seront renforcés, par exemple entre les caisses et les tribunaux de commerce "pour mieux prévenir les fraudes en matière de cotisations et de charges sociales", a précisé le ministère des Comptes publics. Un comité indépendant de lutte contre la fraude sociale sera également installé dans les prochaines semaines    Généraliser les guichets uniques dans les territoires Le PLFSS inscrit également la volonté du Gouvernement de rénover la politique d’installation. "Aujourd’hui nous avons des dispositifs [contrats, NDLR] pour les médecins qui sont très nombreux, très empilés et souvent très peu lisibles ce qui fait qu’ils ont du mal à s’en saisir", a déploré le ministère de la Santé. "On a fait le choix pour l’ensemble des professionnels d’avoir une discussion conventionnelle permettant d’avoir un contrat unique d’installation, plus clair." "Nous souhaitons en parallèle de cette disposition, généraliser les guichets uniques dans les territoires" permettant de répondre aux interrogations des jeunes médecins, et aux élus et à l’Etat, par le biais des comités territoriaux, d’"avoir la politique d’incitation à l’installation la plus attractive", poursuit le ministère.   Des consultations de prévention aux âges clés de la vie Parmi les mesures phares de ce PLFSS, certaines ont déjà été dévoilées par le ministre, notamment la mise en place de consultations médicales gratuites de prévention aux âges clés de la vie : 25, 45 et 65 ans. C’était d’ailleurs un engagement du Président de la République. Pour les jeunes adultes de 25 ans, l’accent sera mis sur la prévention primaire. Il s’agira de "faire le point sur les vaccins, leur activité physique, d'éventuelles addictions ou difficultés liées au début de la vie professionnelle", expliquait François Braun le 18 septembre dernier. Pour les adultes de 45 ans, les consultations de prévention serviront à prévenir l’apparition de maladies chroniques (cancer, diabète, maladies cardiovasculaires). Le dépistage y sera évoqué. Pour la dernière tranche, les adultes de 65 ans, il s’agira de repérer les premières fragilités ou l’apparition d’une perte d’autonomie. "L’objectif sera de lutter contre les inégalités de santé car l’enjeu sera d’aller chercher les personnes les plus éloignées du système de santé", a précisé le ministère ce lundi. D’autres avancées figurent dans ce PLFSS...

 et ont déjà été annoncées, à commencer par l’élargissement du dépistage sans ordonnance à d’autres IST pour les moins de 26 ans. Le PLFSS 2022 avait déjà rendu possible la prise en charge intégrale du dépistage du VIH en laboratoire sans prescription. La liste de ces infections sera fixée par arrêté. Ces dépistages seront intégralement remboursés par l’Assurance maladie pour ce jeune public. Autre mesure annoncée il y a peu : la gratuité de la contraception d’urgence pour toutes les femmes, quel que soit leur âge.   Un meilleur encadrement de l’intérim médical Le ministère de la Santé a également fait connaître son vœu de remettre "l’éthique au cœur du projet de santé". A ce titre, il veut mieux encadrer les pratiques d’intérim, alors que le recours aux professionnels de santé intérimaires "s’est continument accru au cours des dernières années". Le ministère soulève en effet le coût faramineux de cette pratique dans les budgets des établissements de santé. "Pour l’hôpital public, ce coût annuel est passé de 500 millions d’euros en 2013 à 1.4 milliards d’euros en 2018." Le ministère estime par ailleurs que la hausse du recours à cette pratique "déstabilise les services et les équipes". "En plus de prendre des engagements sur l’application de la loi dite Rist sur l’encadrement des rémunérations des intérimaires, nous encadrerons la pratique de l’intérim à la sortie écoles pour que les jeunes soignants démarrent leur exercice sous d’autres formes", annonce le ministère de la Santé. Le projet de loi précise que cette évolution cible "un ensemble large de professionnels".   Recrutement de 3.000 aides-soignantes et infirmières en Ehpad Ce PLFSS 2023 poursuit également "la transformation des Ehpad afin qu’ils soient plus médicalisés" mais aussi "plus humains ". Ceci intègre le plan de recrutement de 50.000 professionnels soignants (infirmiers et aides-soignants), tel qu’évoqué par Emmanuel Macron lors de sa campagne présidentielle. "Une première marche est franchie" dans ce PLFSS avec "+ 3.000 postes qui vont être financés", indique le ministère des Solidarités, démarrant ainsi "la trajectoire". Cela devra s'accompagner d'un travail sur "l'attractivité", a ajouté le ministère des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées. Par ailleurs, à la suite des scandales qui ont éclaté dans le secteur ces derniers mois, les contrôles et la transparence seront renforcés "pour restaurer la confiance", a indiqué le ministère des Solidarités.   Les complémentaires devront mettre la main au portefeuille A travers ce projet de loi, le ministère de la Santé fait également savoir qu’il souhaite engager des discussions avec les organismes complémentaires. "Alors que la part des dépenses financées par l’Assurance maladie obligatoire augmente régulièrement, l’effort entre les deux financeurs sera repartagé, en concertation avec les organismes complémentaires. Une réduction des dépenses d’Assurance maladie obligatoire à hauteur de 150 M€ a été intégrée à ce titre en 2023." Par ailleurs, toujours dans le but de limiter les dépenses, 1,1 milliard d'euros d'économies sont prévues sur les produits de santé (dont 900 millions pour des baisses de prix et 200 millions de clause de sauvegarde). 250 millions d'euros d'efforts seront également demandés au secteur de la biologie médicale, "dans l’hypothèse d’une absence d’accord entre l’Assurance maladie et les biologistes" ; et 150 millions dans le secteur de l'imagerie médicale.   *Diplôme d'études spécialisées 

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