Hépatite C : les hépatologues pour une prise en charge de proximité

21/03/2018 Par Chantal Guéniot
Infectiologie

L’Association française pour l’étude du foie (Afef) demande que les antiviraux directs puissent être prescrits par tous les médecins, condition « indispensable » pour augmenter le nombre de patients traités. 

L’OMS s’est donné pour objectif l’élimination de l’infection par le virus de l’hépatite C en 2030. Mais, pour l’Afef, toutes les conditions sont réunies pour atteindre cet objectif avant 2025 en France, puisque l’on dispose de traitements efficaces et bien tolérés, accessibles à tous les patients depuis début 2017. Pourtant, aujourd’hui 120 000 personnes infectées restent à traiter, dont au moins 75 000 ne sont pas identifiées. L’Afef vient de rendre public ses recommandations pour l’élimination du virus. Concernant le volet thérapeutique, celles-ci stipulent d’emblée trois grands principes : - les traitements doivent pouvoir être prescrits par l’ensemble des médecins ; - leur suivi peut être réalisé par un personnel soignant non médecin ; -les antiviraux directs doivent être disponibles dans toutes les pharmacies. Le dernier point est déjà acquis : Marivet, qui vient d’être commercialisé, est le premier antiviral d’action directe (AAD) autorisé en France à être délivrée en officine de ville. Les autres AAD devraient y être disponibles dans les prochains jours. L’expérience de pays étrangers indique que la prescription du traitement par tous les médecins permet d’augmenter le nombre de patients traités, estime l’Afef. Pour favoriser une prise en charge de proximité, celle-ci propose un parcours simplifié, s’adressant aux personnes n’ayant pas de facteurs de gravité, c’est à dire la majorité des patients.  "Il faut tisser un vrai réseau sur l’ensemble du territoire, pour que les patients puissent être aussi bien traités dans des régions désertifiées que dans des grandes villes", explique le Pr Victor de Lédinghen (CHU de Bordeaux).   Un dépistage de chaque adulte au moins une fois dans sa vie   Le bilan initial comprend la recherche de coinfections par le VIH ou le VHB, et de comorbidités (consommation d’alcool, syndrome métabolique, diabète, obésité), ainsi que l’évaluation de l’atteinte hépatique par Fibroscan, Fibrotest ou Fibromètre. Le sérotypage n’est pas nécessaire, l’Afef recommandant deux options thérapeutiques pangénotypiques : Epclusa (sofosbuvir+velpatasvir), 1 comprimé/jour pendant 12 semaines, ou Maviret (Glecaprevir+pibrentaxvir), 3 comprimés/jour pendant 8 semaines.  L’efficacité de ces deux traitements est supérieure à 95 %, de sorte que le choix doit se faire selon la préférence des patients. Les consultations de suivi sont optionnelles, précise l’Afef, le seul impératif étant de vérifier que la charge virale est indétectable 12 semaines après l’arrêt du traitement, ce qui signe la guérison. Dans ce cas aucun suivi n’est plus nécessaire. En revanche la persistance du virus impose une prise en charge spécialisée. Celle-ci reste également nécessaire, d’emblée, en cas de coinfection, d’insuffisance rénale sévère, de comorbidité mal contrôlée ou d’atteinte hépatique sévère. Les échecs semblent liés principalement à un défaut d’observance ou à des interactions médicamenteuses, à repérer en s’aidant du site hep-druginteractions.org ou de l’application HEP iChart, conseille l’Afef. L’élimination du VHC ne peut se concevoir sans élargir le dépistage.  "On est arrivé au bout du dépistage pour les patients ayant des facteurs de risque", estime le Pr Christophe Bureau (CHU de Toulouse), secrétaire général de l’Afef. "Il faut un dépistage universel et tous les acteurs de santé doivent y participer". L’Afef recommande la réalisation d’au moins un dépistage (VHC, VHB et VIH) au cours de la vie adulte et le remboursement à 100 % de tous les tests, Trod compris.   Un Plan national de santé publique bientôt présenté   En cas de sérologie positive une charge virale est indispensable pour déterminer s’il s’agit d’une infection actuelle ou passée. En cas de facteurs de risque persistant, le dépistage doit bien sûr être répété. Le coût n’est pas un obstacle puisque les prix dépendent du volume des ventes, au point que les derniers traitements prescrits en 2017 "ont coûté très peu", précise le Pr Lédinghen. Par ailleurs, après discussion avec le Comité économique des produits de santé, le prix de tous les antivirauxdevraient s’aligner sur celui du Marivet (28 000 euros pour 8 semaines de traitement). Les experts de l’Afef attendent maintenant avec impatience la présentation prochaine du Plan national de santé publique, fin mars, pour voir si leurs suggestions ont été retenues. Pour le Pr Bureau, "il n’y a pas d’arguments pouvant s’opposer à cette prescription élargie", tandis que le Pr Lédinghen précise : "nos recommandations ont été présentées au Ministère en janvier, elles n’ont pas semblé choquer".                                                            Elimination n’est pas éradication   L’éradication virale est la disparition complète de l’infection. L’OMS s’est fixé un objectif plus modeste, qui est "l’élimination de l’hépatite virale comme problème de santé publique", ce qu’elle définit par "une diminution de 90 % des nouvelles infections et une diminution de 65 % de la mortalité associée". Les hépatites virales sont devenues au cours des dernières années la première cause de mortalité par infection dans le monde.   *Un tutoriel expliquant les étapes du parcours simplifié sera mis en ligne sur youtube (youtube.com-ame afef)  

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