Le diabète insipide central, ce mal nommé

24/10/2022 Par Pr Philippe Chanson
Diabétologie
Le diabète insipide central est une maladie neuroendocrinienne rare, due à un défaut de sécrétion de l’hormone antidiurétique (ADH ou vasopressine ou arginine-vasopressine, AVP) par l’hypophyse, ce qui qui entraîne une polyurie par diminution de la réabsorption d’eau au niveau du rein, en l’absence d’ADH, cette polyurie s’accompagnant d’une polydipsie destinée à compenser l’hyperosmolarité qu’entraine la polyurie hydrique.

  Dans cette maladie, souvent confondue avec le diabète sucré, les données concernant les effets secondaires liés au traitement, les comorbidités psychologiques et les erreurs de prise en charge sont très parcellaires, ce qui a amené une équipe internationale à analyser les perceptions des patients sur leur maladie via une enquête transversale anonyme, par internet. L’enquête a été développée par des endocrinologues et des représentants des patients afin de recueillir leurs opinions sur le diabète insipide central et sa prise en charge, sur les complications de la maladie, les comorbidités psychologiques, le degré de connaissance et d’information sur la maladie des professionnels de santé, tout cela afin de développer des arguments pour proposer un nouveau nom à cette maladie afin d’éviter la confusion avec le diabète sucré. Entre 2021 et 2022, 1034 patients ayant un diabète insipide central ont participé à l’enquête. 91 (9 %) des participants étaient des enfants et des adolescents dont 41 % étaient des filles et 59 % des garçons, d’âge médian 10 ans. 943 adultes, soit 91 % de la population de l’enquête, étaient des adultes (80 % de femmes et 20 % d’hommes, d’âge médian 44 ans). Près de la moitié des participants (47 %) avaient un diabète insipide central isolé et 53 % avaient un diabète insipide combiné avec un déficit ante-hypophysaire. Les principales étiologies étaient un diabète insipide idiopathique (30 % des cas) ou des tumeurs et des kystes de la région hypophysaire pour lesquels le diabète insipide précédait la chirurgie hypophysaire (21 % des cas) ou était apparu en postopératoire (25 % des cas). Le traitement du diabète insipide repose sur la prescription d’un analogue de l’hormone antidiurétique, la desmopressine ou dDAVP. Parmi les patients qui prenaient ce traitement, 260 (soit 26 %) ont eu au moins un épisode d’hyponatrémie conduisant à une hospitalisation. Cette hyponatrémie était liée à un surdosage en desmopressine ou à une prise excessive d’eau. Les patients qui avaient été éduqués à sauter ou à retarder une des prises de desmopressine de manière régulière afin de permettre une polyurie intermittente avaient une prévalence significativement inférieure d’hyponatrémie en comparaison de ceux qui n’avaient pas cette habitude (odds ratio = 0.55 ; IC 95 % = 0.39 à 0.77 ; p = 0.0006). Parmi les 535 patients qui avaient dû être hospitalisés pour une raison médicale quelconque, 71 (soit 13 % ; IC 95 % = 0.10 à 0.16) n’avaient pas reçu leur médicament, la desmopressine, alors qu’ils ne devaient pas boire car devaient rester à jeun et n’avaient pas eu, alors qu’ils étaient à jeun, de perfusion intraveineuse liquidienne afin de compenser les pertes liées à la polyurie en rapport avec l’absence de prescription de desmopressine au cours de leur hospitalisation, et ont rapporté des symptômes de déshydratation. 660 (soit 64 %) participants ont rapporté une moins bonne qualité de vie et 369 (soit 36 %) décrivaient des modifications psychologiques associées de manière subjective avec leur diabète insipide central. 823 (soit 80 %) des participants ont rencontré une situation au cours de laquelle le diabète insipide central était confondu avec le diabète sucré par des professionnels de santé. 884 (soit 85 %) des participants sont en faveur de renommer la maladie afin de ne plus la confondre avec le diabète sucré. Les noms les plus fréquemment proposés étant déficit en vasopressine ou déficit en arginine/vasopressine. Cette enquête est l’enquête la plus importante faite chez des patients ayant un diabète insipide central. Les patients rapportent une prévalence élevée d’effets secondaires liés au traitement, une prévalence également élevée de mauvaise prise en charge au cours de l’hospitalisation, de comorbidités psychologiques et confirme l’intérêt de renommer cette maladie. Ces données sont également les premières à indiquer l’intérêt de sauter régulièrement une prise de desmopressine ou de la retarder afin de diminuer le risque d’hyponatrémie.

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